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Je pense que Luigi dans son premier message a bien résumé la position actuelle des auteurs de fantasy française: chacun essaie de repousser les limites de son côté, en visant le caractère original ou érudit. Il n'y a pas de vision d'ensemble de la fantasy française avec un ou deux genres spécifiques, avec le french touch, qui se détacherait des autres pays. Je suis en effet moins convaincu par l'existence d'une réelle french touch: certes, certains romans ont un caractère picaresque, un côté feuilleton ou un angle baroque, mais ces caractéristiques sont trop diluées et loin d'être universelles dans la fantasy française. Mathieu Gaborit, pour ne citer que lui, a certes créé deux univers résolument baroques avec Abyme et les chroniques du crépusculaire voire bohème, mais il a aussi écrit les chroniques des féals qui relèvent plus de la high fantasy. Après, on peut noter dans la fantasy française quelques rémanences du courant romantique ("les chants désespérés sont les chants les plus beaux, et j'en sai, immortels, qui sont de purs sanglots") qui rendent très rares les happy end, plus couramment utilisées chez les anglo-saxons. ;)De mon point de vue, la fantasy française cherche à se rapprocher d'autres genres tels que le roman historique, la mythologie ou encore le fantastique, sans pleinement se détacher. Il suffit de lire un Jarowski, un Pagel, un Fetjane, un Mauméjean ou encore un Marcastel pour s'en rendre compte. LA fantasy française, bien qu'abondante (plus qu'il y a deux décennies) peine à exister par elle-même. Concernant le point particulier de la high fantasy à la française, force est de constater que depuis Pierre Grimbert, Mathieu Gaborit, Nicolas Bouchard ou encore Fabrice Colin et Nicolas Jarry, les récits de ce type sont très rares. La situation est la même chez nos pays voisins tels que l'Allemagne et l'Espagne qui ont un sérail d'écrivain en pleine expansion mais dans des genres très différents des émules du sda (Funke et Bennman d'un côté, Aguileira de l'autre, à l'exception de Negrete qui a allègrement et avec bonheur puisé dans la high fantasy). De là à penser qu'il s'agit d'un trait de caractère, d'un genre plus propice à l'esprit des écrivains anglo-saxons... Cependant, cette constatation me semble erronée car il suffit de voir l'importante demande et la passion du public français pour ce type de roman. Le français est loin d'être réticent à la BCF et serait je pense très demandeur d'écrits français de qualité en high fantasy. Il nous manque peut-être un déclencheur au niveau de l'écriture française. Quand le trouverons-nous? 
