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Quand on regarde le sommaire du numéro spécial de Lightspeed, People of colors destroy SF, on a aussi bien au sommaire des afro-américain, des asiatiques, des arabo-américains et même des auteurs amérindiens ( Karine Lowachee)http://www.destroysf.com/people-of-colo ... e-fiction/. Donc la notion de people of color déborde bien aujourd'hui la simple question des afro-américains et déborde sur d'autres minorités ethniques.

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Chez nous, à la différence des États-Unis, toute critique du « White Male of Life » (je vais y revenir) suscite d'emblée un procès – parfois virulent, souvent naïvement de bonne foi – en « communautarisme ». C’est-à-dire que, dans nos pays, le mâle blanc hétérosexuel, de préférence aisé et de plus de 50 ans, est la norme “naturelle” à partir de laquelle on regarde le monde. Hors, c’est tout le paradoxe (bon, je sais, la SF en est friande !), il s’agit en réalité… d’une minorité ! Mais cette toute petite minorité est à peu près à tous les postes de commande : direction des sociétés du CAC40, mandats électifs majeurs, etc. C’est vrai aussi en littérature, mais d’une moindre façon : les préjugés existent, mais nos lectorats sont généralement ouverts. Aux États-Unis, au moins, ces questions sont discutées.Les plus jeunes l’ignorent peut-être, mais je me souviens d’un temps où, lorsque je croisais une femme dans un festival de SF, je me demandais de qui elle était la petite amie… Aujourd’hui, fort heureusement, je me demande si elle est auteure, directrice de collection, traductrice, libraire, blogueuse… Mais si, en France, les femmes ont enfin acquis (il y a quelques années seulement !), l’égalité juridique totale, à défaut d’une égalité réelle, si le monde de l’imaginaire s’est nettement féminisé, combien voyons-nous, en 2016, d’auteurs noirs ou arabes dans nos maisons d’édition, revues, festivals, etc. ? Poser la question, c’est y répondre (et presque tous sont des moins de 35/40 ans). Pour dire net : en France, à la différence des États-Unis, le problème est nié au nom d’un prétendu « universalisme » cher au pays des droits de l’homme… N’oublions pourtant pas ce que soulignait récemment un certain : « La France n’est pas le pays des droits de l’homme, c’est celui de… la Déclaration universelle des droits de l’homme !J’ai donc tiqué en lisant certains messages (toujours courtois, et de bonne foi, ceci dit…). Prenons donc quelques exemples, et poussons un peu plus loin la discussion :La question […] ne se limite pas à la représentation ethnique. Elle se pose pareil pour la représentation des femmes, des handicapés, des personnes corpulentes ou que sais-je encore...C’est très juste. Ces critères sont d’ailleurs quelques-uns de ceux qui sont reconnus par nos lois comme critères de discrimination :http://www.jeunes.gouv.fr/interminister ... iminationsJe rappelle aussi que, lors de la tentative de l’extrême-droite américaine d’éliminer ouvertement des nominations au prix Hugo toutes les personnes féministes, non blanches et LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Transgenres), ce sont malgré tout les progrès (cartes trop lents et insuffisants) de la diversité qui ont amené à faire échouer cette contre-offensive grossière, sexiste, raciste et homophobe.le fait d'être une femme ne m'empêche pas de m'identifier à un personnage masculin, et j'ose espérer que des lecteurs arrivent à s’identifier à un personnage féminin. Les lectrices s’identifient sans problème à un héros masculin, l’inverse étant nettement moins vrai. Il semblerait que cela commence à changer, en particulier chez les hommes de moins de 35 ans. Je parle bien sûr de ceux qui lisent (ceci dit, regardez combien il y a de blogueurs et de booktubeurs mâles… Pas des masses !).Du coup, je me demande pourquoi une personne noire, par exemple, ne pourrait pas s'identifier à un personnage blanc, ou autre (toutes les combinaisons sont possibles).C’est très juste. Et en soi, ça ne pose aucun problème. Une personne LGBT peut tout aussi bien s’identifier à une personne hétérosexuelle. Le problème surgit quand 100% des personnages principaux, ou peu s’en faut (un contre-exemple ici ou là ne change rien au problème… Ici, c’est la masse qui fait fond !), sont mâles, blancs, hétérosexuels. Regardez les couvertures des ouvrages d’imaginaire : c’est encore plus édifiant. Le problème des auteurs afro-américains c'est que leur minorité a ses propres maisons d'éditions et ses propres magazines.Les homosexuels aussi… La vraie question, c’est : pourquoi ? Par goût (inné ou acquis ?) du séparatisme ? Ou pour se protéger, s’organiser, et lutter contre les discriminations ? Ceux qui connaissent l’histoire de la SF américaine n’ont pas oublié ce rédac’chef de revue qui, face à une nouvelle de Theodore Sturgeon, ne s’est pas contenté de la refuser, mais a appelé tous ses confrères à boycotter l’auteur ! Sturgeon était blanc et hétérosexuel ; pourtant, dans les années 50/60, publier une histoire considérée comme « choquante » vous exposait aux réactions sectaires des puritains. Alors, imaginez si vous étiez membre d’une minorité…la discussion est quasi inexistante en France, la preuve : la plupart ne voit même pas ou se situe le problème. Pourtant il est bien là, toujours aussi présent, ailleurs comme en FranceLa première démarche pour améliorer une situation, c’est en effet de reconnaître qu’elle existe. Dans cette affaire, le grand mérite de Jemisin, c’est d’avoir posé publiquement la question. En bénéficiant de la reconnaissance personnelle que son talent lui a gagné, elle fait œuvre utile pour la communauté noire américaine, mais aussi, au-delà, pour toutes les minorités, et même pour tous les êtres humains.Deux anecdotes personnelles pour conclure. À mon usage (intentionnel) du néologisme « écrivaine », un jeune festivalier m’avait fait remarquer : « écrivaine, ça rime avec vaine ». Je lui ai simplement demandé avec quoi rimait écrivain… Plus tard, un ami auteur, hostile à l’adoption des couples homosexuels, m’a affirmé avec force qu’un « couple, c’est fait pour avoir des enfants ». Outre une vision très restrictive et traditionnelle du couple, le hasard fait que j’ai une fille et que son couple est sans enfants… Bien sûr, cet ami, mâle, blanc, hétérosexuel, est un fervent contempteur du soi-disant “communautarisme” !J’ajoute que mon expérience personnelle m’a obligée à revoir mes visions naïvement universalistes d’autrefois. Et de souligner désormais qu’un universaliste sincère se préoccupe du sort des minorités. C’est-à-dire, au final, de tous et toutes.Je remercie donc Elbakin de s’être fait l’écho de l’interpellation de Jemisin. Cela m’a donné envie de poser à mon tour la question de la place des minorités dans nos genres préférés, qu’il s’agisse des personnages ou des auteurs eux-mêmes. Je connais même un festival assez ouvert pour aborder très volontiers le sujet. En mai 2017, par exemple.

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Très belle analyse. Bravo. Mais comme tu l'as ecrit, "je ne vois pas où est le problème" dans la SF & Fantasy française. Nous sommes tous différents par nos origines et nos cultures. Vouloir mettre en avant un auteur sur les seuls critères de la couleur de sa peau, son ethnie, sa religion, son genre, c'est faire de la discrimination (positive). A force de vouloir être universel, on en perd parfais l'essence. Cela ne devrait pas être "tous pareil" mais plutôt "heureux d'être tous différents". Nous sommes différents et tant mieux. Homme, femme, ethnie, culture. Sur le plan physique (Combien de blanc au 100m ? Combien de noir en natation ?), mais aussi émotionnel. La vrai diversité permet les rencontre, la création et la découverte. A mon humble avis, ce que recherche la majorité des lecteurs de SFF français, c'est un dépaysement, un voyage, une évasion dans un monde imaginaire. Alors que l'auteur(e) soit blanc, noir, jaune, bleu ou rouge permettra de découvrir une partie de son imaginaire, forgé par son passé et sa culture, qu'il veut nous faire partager. Les seuls critères importants sont "est-ce que les thèmes me plaisent ? Est-ce que le livre est bien ecrit ?"Que le héros soit un elfe noir ou un nain de montagne, un soldat de l'empire galactique ou un contrebandier wookie ... Que le livre soit ecrit par un homme blanc mormont, une afro-américaine ou une bretonne ... Du moment que l'histoire est bonne !

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e remercie donc Elbakin de s’être fait l’écho de l’interpellation de Jemisin. Cela m’a donné envie de poser à mon tour la question de la place des minorités dans nos genres préférés, qu’il s’agisse des personnages ou des auteurs eux-mêmes. Je connais même un festival assez ouvert pour aborder très volontiers le sujet. En mai 2017, par exemple.
Aux Utopiales en 2009 je ne crois pas avoir vu un seul noir, ni un seul maghrebin.Quand j'ai voulu dire sur Actusf que le problème des auteurs de couleurs était sans doute plus présent en France qu'aux USA où les auteurs noirs, asiatiques et arabo-américains sont de plus en plus présents, on m'a répondu que dans les communautés noirs et maghrebines on ne s'intéressaient pas l'imaginaire. Et pire encore, une auteure qui se proclame de gauche qui ose dire quasiment : la plupart des gens des gens de ces communautés sont ouvriers, l'imaginaire ne fait pas parti de leurs préoccupations. Bref, en France c'est pas gagné.
Le problème des auteurs afro-américains c'est que leur minorité a ses propres maisons d'éditions et ses propres magazines.Les homosexuels aussi… La vraie question, c’est : pourquoi
Des auteurs afro-américains qui écrivent dans des maisons d'éditions mainstream, il y en a de plus en plus : N.K Jemisin, K Tempest Bradford, Tanarive Due, Nalo Hopkinson, Steven Barnes, Maurice Broadus, Alaya Dawn Johnson, Minister Faust.....Et c'est encore plus vrai pour les auteurs homosexuels.Le problème c'était en c'est encore des communautés qui ne veulent parler qu'à leur communauté, en grande partie à cause du regard d'une minorité conservatrice.

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Eolan, ce n'est pas qu'une question de mise en valeur. C'est se demander pourquoi il n'y a quasiment qu'un seul profil. Attribuer ça à des goûts de "communautés", c'est très réducteur (par exemple, dire qu'il n'y a pas de femmes en SF car les femmes n'aiment pas la science mais la rêverie. Non, c'est plus profond).Stéphanie, je suis tombée sur un article d'Actualitté il y a peu où Sylvie Lainé (je crois ? ou Denis, zut, je suis mauvaise avec les noms) parlait justement de cette histoire d'empathie.Les femmes sont tellement habituées à voir un héros blanc qu'elles sont habituées à avoir de l'empathie pour eux, et ça marche pour tous ceux qui ne sont pas un homme blanc. Par contre, l'inverse n'est pas vrai parce qu'ils ne sont pas habitués à voir d'autres profils, donc ils ressentent moins d'empathie. Et ça ne fonctionne pas qu'avec les livres, mais aussi les films, et nos réactions envers de vraies personnes.Mais là, c'est la différence entre représentation parmi les auteurs, et représentation des personnages. Un auteur blanc peut écrire sur d'autres personnages par exemple, mais du coup, c'est un autre problème que celui de la représentation des auteurs.

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Nariel a écrit :Eolan, ce n'est pas qu'une question de mise en valeur.
Tu as tout à fait raison.
Nariel a écrit :C'est se demander pourquoi il n'y a quasiment qu'un seul profil. Attribuer ça à des goûts de "communautés", c'est très réducteur.
Oui et non :)Il y a un profil qui ressort, celui du geek/geekette, amateur d'imaginaire, mais il y a plein d'autre profil. De la mère au foyer à la chef d'entreprise hyperactive, de l'éducateur sportif à l'avocat international, du prof de français à l'infirmière. Une des questions soulevées était : est-ce qu'il y a discrimination parmi les auteurs de l'imaginaire, par leur genre ou leur origine ?En France, aujourd'hui, je n'ai vraiment pas l'impression ? Et vous ?

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En France, aujourd'hui, je n'ai vraiment pas l'impression ? Et vous ?
En théorie il n'y en a pas. Mais quand on regarde combien y a - t -il d'auteurs issus de la communauté maghrebine publiés dans les auteurs de l'imaginaire la réponse est deux : Karim Beroukka et Nabil Ouali. Je trouve que ça fait peu. En ce qui concerne les auteurs noirs je ne connais que Corinne Guiteau. En tout cas dans les auteurs pros. Dans les semi pros il y a Kwame Maherpa également.Et je peux sans doute en oublier un ou deux. Mais ça fait peu.il y a un mécanisme retors qui en marche. Les éditeurs d'un coté ont peur d'un échec commercial s'ils publient un ouvrage écrit par un auteur de couleur. D'autre part des auteurs ont tellement peur d'être victime de discrimination qu'ils n'envoient pas leurs manuscrits. C'est largement dommage d'autant plus qu'il y a un autre enjeu derrière : celui de l'élargissement du lectorat. Si il y a des auteurs issus des minorités, les minorités s'intéresseront aux littératures de l'imaginaire. C'est d'autant plus souhaitable que l'imaginaire peut être un vrai pont entre les gens.

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Je crois avoir dit l'essentiel dans mon post assez long pour exprimer (de façon nuancée, j'espère) mes analyses. Disons que vos réactions, toutes sympas, sont à la fois le signe (positif) qu'on peut dialoguer dans le milieu de l'imaginaire, et que les gens haineux, chez nous, sont peu nombreux et évitent de trop s'avancer... Signe (négatif, celui-là) : certains d'entre vous nient ou relativisent le problème des minorités au nom de l'universalisme franco-français.J'ai en particulier noté cette phrase : « Nous sommes différents et tant mieux. Homme, femme, ethnie, culture. Sur le plan physique (Combien de blanc au 100m ? Combien de noir en natation ?), mais aussi émotionnel. La vrai diversité permet les rencontre, la création et la découverte. Une des questions soulevées était : est-ce qu'il y a discrimination parmi les auteurs de l'imaginaire, par leur genre ou leur origine ? En France, aujourd'hui, je n'ai vraiment pas l'impression ? Et vous ? »S'intéresser aux minorités, et à leur statut, c'est d'abord apprendre à déconstruire les préjugés. Or nous en avons tous, par notre éducation, la propagande diffuse des médias et des institutions, etc. Notre ami fait un constat : il y a plus de coureurs noirs et plus de nageurs blancs. Pour lui (fausse évidence), cela relève du physique. Or un membre d'une minorité se posera tout de suite la question différemment et soulignera que pour nager de façon professionnelle, il faut avoir accès jeune aux piscines, aux clubs, etc. Et que ce n'est pas donné en majorité dans le monde aux enfants noirs. Une discrimination sociale et culturelle, et non des papattes de grenouille pour les Blancs, explique ce constat (appelé à changer dans le fureur si les choses évoluent). Un petit Noir qui va à l'école au Kenya par exemple a plus de chance de courir longtemps matin et soir 10, 15, 20 kilomètre qu'un écolier français, même du Cantal ou de la Meuse. Là encore, des raisons sociales et culturelles jouent et expliquent des faits trop souvent interprétés comme des différences innées, physiques que rien dans une étude biologique objective ne démontre. Autre exemple : plus une société est ouverte aux femmes, plus la différence de taille se réduit... Pourquoi ? Parce que, dans une société traditionnelle, patriarcale, on nourrit mieux le mâle que la femelle ! Un test fascinant a été fait récemment sur le rôle des clichés dans le comportement sexué : on donne un exercice à faire (le même) à des groupes de filles et de garçons. Dans 50% des groupes, on affirme qu'il s'agit d'un exercice de dessin. Les filles ont globalement les meilleurs résultats. On dit aux autres qu'il s'agit d'un exercice de maths. Les garçons ont globalement les meilleurs résultats ! Des exemples comme ça , on en trouve autant qu'on veut.Autre remarque que j'ai relevée :« Nous sommes tous différents par nos origines et nos cultures. Vouloir mettre en avant un auteur sur les seuls critères de la couleur de sa peau, son ethnie, sa religion, son genre, c'est faire de la discrimination (positive). »Je crois que personne ici ne souhaite (et surtout pas les membres des minorités) « mettre en avant un auteur sur les seuls critères de la couleur de sa peau, son ethnie, sa religion, son genre », mais simplement ne pas rejeter (comme ont tenté de le faire l'extrême-droite US dans sa mobilisation de 2015 pour expulser les femmes et les minorités techniques et LGBT de tous les prix littéraires d'imaginaire !) les membres des minorités sur ce critère-là. De ne pas bloquer parce qu'un personnage principal noir et gay rebuterait prétendument le public blanc (je crois que la majorité de ce public est heureusement plus universaliste qu'on ne le dit parfois).En ce qui concerne la discrimination, je pense en revanche qu'elle est rare dans nos milieux (je suis assez bien placée pour le dire ;-) Du moins consciemment. Mon expérience m'a amenée à corriger un peu cette vision idyllique. En effet, du fait de leur manque de confiance en elles, acquise dans la famille et à l'école hélas, les filles se mettent moins en avant. Du coup, un recruteur aura plus de candidatures d'hommes sûrs d'eux, sachant mettre en valeur leurs qualités, que de femmes capables de la même détermination, ce qui biaise les recrutements. Il ne me viendrait jamais à l'idée de choisir pour l'une de mes anthologies une femme plutôt qu'une homme pour cette unique raison. Mais je me défie de l'inconscient social collectif, et j'ai donc la préoccupation de vérifier si je n'ai pas, sans m'en rendre compte, choisi un pourcentage d'hommes – à talent égal – anormalement élevé par rapport à la statistique objective. C'est peu de choses, mais ce regard ouvert (produit de ma propre expérience de vie) me rend vigilante. Si je fais un café littéraire sur « la place des femmes en fantasy », pourquoi ne songe-t-on pas (sauf à y réfléchir) à celle des hommes ? Si je fais une sélection d'auteurs pour un échange sur le sentiment amoureux dans les romans de fantasy (sujet pour 2017...), le fait que je sois membre de minorités m'amènera à veiller à choisir des hommes et des femmes, un gay, etc. Bref de ne pas penser a priori que je dois y coller quatre femmes (l'amour, un truc de gonzesses ;-) toutes hétérosexuelles. Mon regard (a priori bienveillant, sauf avec les vrais discriminants) me poussera à offrir aux lecteurs une diversité de points de vue et de situations. Je pense qu'être membre de minorité est en France un handicap, un facteur de discrimination, alors qu'il devrait être un atout. Nous ne valons pas plus que les autres, mais notre regard un peu décalé devrait être perçu comme utile à toute la société, qui va mieux quand elle s'interroge positivement (et non en pleurnichant) sur ses défauts et les moyens d'y remédier.Un regarde ouvert, bienveillant et attentif sur le monde et sur les autres : nos amis hétéro(rte)s sont comptables de cette exigence, ni plus ni moins. C'est à ce prix que nos amis les mâles blancs hétérosexuels pourront faire reculer le “communautarisme”, qui n'est en fait qu'une réaction de défense de minorités agressées ! Quand je n'ai pas, dans mon pays, les mêmes droits que mes amis hétéros, j'ai un sentiment négatif sur le bla-bla universaliste. Vous voulez un pays universaliste : accordez l'égalité juridique totale à tous et toutes.En attendant ce rêve de droits humains (et non de l'homme !) universels, réfléchissons au sein de nos littératures pour introduire sans "militantisme", mais avec naturel, de la diversité. Et parlons-en !

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Tu as raison, l'aspect socio-économique est très important mais il n'explique pas à lui seul la différence de performance sportive. Concernant les sprinters, il existe des différences morphologiques et génétiques multiples (au niveau de la puissance des fibres musculaires, avec le gène ACTN3 par exemple)Deux courts articles : http://www.livescience.com/10716-scient ... stest.htmlhttp://www.caminteresse.fr/economie-soc ... s-1147608/Mais fermons le hors sujet, mon propos illustrait l'idée "tous différents et tant mieux" plutôt que le fait de "stigmatiser les minorités". Concentrons nous sur la Fantasy :Après la lecture de l'article de JK Jemisin et le premier message de Stephanie, je me suis posé la question suivante : "Est-ce important si certaines personnes, par leurs différences, ne lisent pas de la SF&Fantasy ?"Important, je ne sais pas, mais surtout dommage comme le dit très justement Fabien :
Fabien Lyraud a écrit :C'est largement dommage d'autant plus qu'il y a un autre enjeu derrière : celui de l'élargissement du lectorat. Si il y a des auteurs issus des minorités, les minorités s'intéresseront aux littératures de l'imaginaire. C'est d'autant plus souhaitable que l'imaginaire peut être un vrai pont entre les gens.
Très bel argument !Mais alors, en France, comment faire pour augmenter le nombre d'auteurs issus des minorités ?

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Le problème est noyé en France dans les discriminations sociales. Les enfants d'ouvriers n'ont pas les mêmes possibilités que les autres parce que le système scolaire est conçu est autour de la sélection des élites. On sélectionne ceux qui iront dans les grandes écoles. Les enfants des milieux populaires ne peuvent pas toujours accéder à certaines valeurs culturelles et pourtant il ne s'en faudrait pas de beaucoup. Le dialogue entre la littérature et les autres média (audio-visuelle, jeu vidéo notamment) doit exister. Enfants d'ouvriers en France c'est une minorité. Ce n'est pas le cas dans d'autres pays. (même si au niveau de l'orientation on est loin des délires des années 80 )L'existence de cette minorité sociale a tendance à éclipser celle des minorités ethniques puisqu'une grande majorité des enfants d'immigrés sont ouvriers ou appartiennent aux classes populaires. Nous avons une minorité enchâssée dans une autre minorité. Donc sa situation n'est pas enviable sur le plan culturel. Le problème des minorité ethnique est double à cause de l'appartenance à deux minorités de conserve.

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Je remercie donc Elbakin de s’être fait l’écho de l’interpellation de Jemisin. Cela m’a donné envie de poser à mon tour la question de la place des minorités dans nos genres préférés, qu’il s’agisse des personnages ou des auteurs eux-mêmes.
Merci, on essaie en tout cas ! :)
un échange sur le sentiment amoureux dans les romans de fantasy
Sujet intéressant. :)
Un auteur blanc peut écrire sur d'autres personnages par exemple, mais du coup, c'est un autre problème que celui de la représentation des auteurs.
Heureusement. ^_^ Je pense que peu importe le personnage, l'important, c'est avant tout comment exprimer sa personnalité qui compte, plus que de vouloir le coller dans une case. Ce qui n'est pas le même problème que celui soulevé initialement, c'est vrai.

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C’est-à-dire que, dans nos pays, le mâle blanc hétérosexuel, de préférence aisé et de plus de 50 ans, est la norme “naturelle” à partir de laquelle on regarde le monde.
Aux USA, il s'agit en fait du mâle blanc hétérosexuel chrétien. Car la religion entre ligne de compte dans la constitution du pays en minorité; Et paradoxalement les catholiques n'y sont pas considérés comme chrétiens d'ailleurs. Chrétiens = wasps conservateurs en fait. Aujourd'hui un auteur blanc mais athée, agnostique, païen, juif, musulman, bouddhiste ou catholique est considéré comme appartenant à une minorité religieuse (on sait par exemple que les Puppies sont avant tout des chrétiens conservateurs qui sont attachés à une vision conservatrice des USA, issu notamment de la culture du vieux Sud et opposé à l'expression des minorités).En France la religion n'entre pas en ligne de compte. Acquis de notre laïcité. Mais la représentation majeure se retrouve en fait être le mâle blanc hétérosexuel urbain, celui des grandes métropoles. Quand on habite dans la ruralité ou dan les communes rurbaines, on appartient à une minorité. Et cette minorité est enfermée également dans des clichés.

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Je dirais même parisien plutôt que urbain, quand je vois le peu de SFFF qu'il y a à Toulouse, par exemple... (deux très bonnes librairies, mais pas vraiment d'événements renommés, peu de dédicaces...)

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Nariel a écrit :Je dirais même parisien plutôt que urbain, quand je vois le peu de SFFF qu'il y a à Toulouse, par exemple... (deux très bonnes librairies, mais pas vraiment d'événements renommés, peu de dédicaces...)
C'est vrai qu'à ce niveau là le sud ouest est véritablement à la traîne par rapport au reste du pays. Peut être parce que c'est la partie la plus rurale de la France.A Toulouse au moins tu as des auteurs à commencer par Jean Claude Dunyach et sûrement pas mal d'autres. Les gens qui habitent dans des départements ruraux comme la Creuse ou la Lozère n'ont malheureusement pas cette chance.

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Fabien, tu as des "sources" pour certaines de tes affirmations genre la "frilosité" des éditeurs ou il est question de conversations informelles ? :) Parfois on ne sait pas trop si tu exprimes un avis ou un fait. ^^

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Gillossen a écrit :Fabien, tu as des "sources" pour certaines de tes affirmations genre la "frilosité" des éditeurs ou il est question de conversations informelles ? :) Parfois on ne sait pas trop si tu exprimes un avis ou un fait. ^^
Ce qui est clair c'est qu'il n'y a aucun racisme. J'en conclu qu'il s'agit de frilosité, de peur que ça ne se vende pas. Du coté des webzines ça se ressent moins. Par exemple Mots et Légendes a publié une jeune auteure issue de la communauté turque et un auteur d'origine asiatique.Outremonde avait lui publié un auteur d'origine africaine. C'est assez peu, c'est clair. Mais c'est mieux que Bifrost ou Galaxies.

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Avoir des auteurs majeurs "issu de la diversité" pourrait effectivement avoir un effet d'émulation et inspirer des vocations, comme il est démontré avec l'exemple du couple Obama :http://www.courrierinternational.com/ar ... -ecolieresJ'avais également lu un article disant que des élèves noirs américains réussissaient mieux un examen après avoir visionné un discours d'Obama, mais je n'ai malheureusement pas encore retrouvé sa référence.

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Conversation très intéressante. Pour info, je suis noir né en France de parents africains. De mon expérience, l'un des problèmes les plus prévalents dans la communauté africaine c'est le manque de curiosité dans les arts plus ... raffinés, comme la danse classique, le solfège, etc. Pour exemple, je me souviens que ma mère me me disait qu'on lui reprochait d'agir comme les blancs quand elle inscrivait ses enfants au cours de piano ... ce qui ne n'est pas surprenant.La pauvreté n'est pas physique, mais surtout mentale.Les africains n'ont pas nécessairement besoin de rôle model, mais de curiosité sur le monde qui l'entoure, et l'envie d'apporter sa pierre à l'édifice, plutôt que de se plaindre sur les autres races de le pas l'inclure dans son travail.Je suis moi-même un aspirant écrivain en fantasy. Est-ce que j'ai des modèles noirs en fantasy? Non, pas vraiment, et ceux qui le sont ne sont pas ce que j’appellerais des auteurs populaires ( Genre Mme Rowling, etc.) mais qui ont gagné des prestigieux awards ( surtout aux états-unis)Que les noirs et les autres races commencent d'abord à trouver des solutions sur le rayonnement de leur culture et surtout de leur sagesse et avec le temps, ces problèmes disparaîtront d'eux-mêmes.