Alors par où commencer ? Tout d’abord, j’ai adoré Célestopol, un livre qui mêle Steampunk revisité, exploration lunaire, Grand Jeu géopolitique, arts, œnologie, et enquêtes policières. Je ne suis habituellement pas amateur des recueils de nouvelles (trouvant difficile de passer si rapidement d’une histoire à une autre), mais la construction du livre m’a permis de voir l’œuvre non pas comme un ensemble de nouvelles, mais plus comme une fresque chronologique de l’histoire de Célestopol. L’un des points forts du récit est pour moi le questionnement permanent quant à l’humanité des automates. Vu en premier lieu comme des machines, des objets, ils démontrent vite une capacité à parler, comprendre et ressentir. Cela amène à s’interroger sur le statut de ces automates : s’ils présentent les mêmes sentiments, la même empathie que les humains, ne devrait-on pas les considérer comme tels ?Les automates paraissent représenter « la pureté » de Célestopol. Dans une ville où complots, intrigues et mensonges sont monnaie courante, les robots apparaissent comme dépourvus de toute volonté malfaisante, et réagissent de façon presque candide
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(tel l’automate ayant compris comment parler, et ne souhaitant que rejoindre la ville pour y éprouver de nouvelles sensations)
. Je pense que c’est là le plus grand point fort de Célestopol : une réflexion sur la nature humaine et la possibilité d’y inclure de nouvelles formes de conscience. Si je devais citer quelle nouvelle a eu ma préférence, je dirais sans hésiter Oderint dum metuant. Le récit mélange allègrement complot « populaire » avec l’Oiseau de Feu, sorte de Robin des Bois aux motivations complexes, guerre industrielle pour le contrôle du sélénium, et géopolitique, avec les plans de Nikolaï pour faire sortir sa cité du giron de la Russie. On y découvre également une facette étrange du Duc, dans le fait qu’il se montre à la fois plus sensible
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(pleurant la mort de sa cousine et regrettant d’avoir dû l’impliquer) et paradoxalement plus impitoyable que jamais (car aucun regret ne l’aurait détourné de son but final)
. Si l’on y rajoute l’apparition des spetsnaz, similaires dans leur rôle et leur froideur militaire à leurs homologues réels, la nouvelle prend un sens encore différent, devenant un thriller politique à l’issue perturbante. Cette nouvelle est pour moi le point de départ de la dimension dramatique du livre, car une fois celui-ci achevé, il ne reste au lecteur qu’à contempler l’inutilité de tous ces plans et projets, balayés par le vide spatial en quelques minutes.
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Et c’est grâce à cette fin tragique qu’un parallèle entre Célestopol et la figure d’Icare peut être tracé : tous deux ont choisi de s’élever, pour finalement s’effondrer sous le poids de leurs ambitions.
Bref, une excellente lecture !