Entièrement d'accord avec Papierkus sur plusieurs points. J'allais faire la même remarque sur les personnages des
Archives de Roshar.
Papierkus a écrit :[D'ailleurs, le traitement que fait Sanderson de la dépression, de la dépendance, de l'homosexualité, de l'autisme et de l'asexualité dans cette œuvre a été salué par la critique - et je ne dirais pas qu'il s'agit là de sujets simples à traiter...
Pour très bien connaître plusieurs de ces sujets, J'ai été épatée par la justesse avec laquelle il les aborde. Steris notamment, dans
L'Alliage de la justice et ses suites, est un très beau personnage de femme autiste. Et le passage sur l'asexualité de Jasnah Kholin, sujet encore très rare en fiction et traité ici sans clichés, a marqué pas mal de gens, moi la première. Avec le temps, ça devient un de mes aspects préférés de son travail, et ce qui donne une vraie profondeur humaine à ses récits. Il est en empathie avec ses personnages, dans toute leur complexité et avec toutes leurs zones d'ombre, et ça se sent. Il y a une vraie humanité qui se dégage de son écriture.
Papierkus a écrit :De la même façon, toujours dans les
Archives, je ne trouve pas son style forcément simpliste : cependant, j'ai lu les premiers tomes en français, donc mon avis est peut-être un peu biaisé. Mais j'ai du mal à croire que le passage ci-dessous, certes une traduction, extrapole le texte original.
“C’était le hurlement de mille guerriers sur le champ de bataille.
C’était le moment du toucher le plus sensuel et de l’extase.
C’était la douleur de la perte, la joie de la victoire.
[...].
C’était la chaleur de mille soleils, la béatitude de chaque baiser, c’étaient les vies de tous les hommes rassemblées en une, définie par tout ce qu’ils ressentaient”.
Justicière (Les Archives de Roshar, T3), chapitre 57.
Je confirme :
"It was the scream of a thousand warriors on the battlefield.
It was the moment of most sensual touch and ecstasy.
It was the sorrow of loss, the joy of victory.
(...)
It was the heat of a thousand suns, it was the bliss of every kiss, it was the lives of all men wrapped up in one, defined by everything they felt."
Ce n'est pas un auteur qui cherche à "faire du style", son écriture est au service de l'histoire, mais elle est toujours très maîtrisée (autrement, je ne prendrais jamais un tel plaisir à le traduire : un texte mal écrit est un vrai enfer à rendre en français à peu près potable). Et je le trouve effectivement particulièrement doué pour les dialogues et les voix des personnages. Ça m'a encore frappée quand j'ai découvert la version audio de
La Voie des rois : le lecteur et la lectrice ont adopté exactement les intonations, les voix que j'entendais dans ma tête quand je traduisais les textes, tellement les dialogues sont évocateurs.
La preuve en est faite avec l'autre passage que cite Papierkus : rien qu'en le lisant, et sans avoir aucun souvenir de cette phrase, j'ai reconnu tout de suite la voix de Malice.
"I enjoy things with curious properties, and stupidity is most interesting. The more you study it, the further it flees—and yet the more of it you obtain, the less you understand about it!"
Bref, tout ça pour dire que je pense qu'il faut vraiment distinguer le Sanderson qui écrit les Archives du Sanderson qui nous pond 6 romans en un an, car le soin accordé à l'œuvre n'est clairement pas le même.
Je nuancerai ce dernier point, ce n'est pas tant une question de soin que de vision du projet. Certains de ses livres sont davantage pensés comme des divertissements, mais ce sont de sacrés bons divertissements et il y a toujours des belles choses à découvrir au niveau de l'intrigue ou des personnages. Personnellement le troisième
Légion m'a vraiment chamboulée, et les deux premiers m'ont énormément fait rire. Ce n'est pas du Roshar et c'est ça qui est intéressant justement, de voir toutes ses différentes facettes. Mais sur les personnages et certains thèmes abordés, il me semble voir une progression. Ils ont effectivement plus de profondeur qu'à ses débuts (j'adore l'intrigue et l'univers de Fils-des-brumes qui avait été une claque pour moi, mais les personnages me semblent moins bien dessinés que ce qu'il a fait dans Roshar et par la suite).