Bon. Parce que je suis bon public, et parce qu'il n'en faut pas beaucoup pour me divertir, je trouve souvent la critique un peu rude envers les films grand public. Je me dis toujours que ça ne peut pas être aussi pire qu'on veut bien le dire. Et ben là, pour le coup, si...Je passerai sur le terme même "d'adaptation", parce que sinon je suis là demain matin, mais il faut n'avoir vraiment RIEN compris au roman pour faire de Peter un héros de prophétie venu délivrer le Pays Imaginaire de la tyrannie. Cela dit, ce n'est pas le sujet, et il y a de très mauvaises adaptations qui font des films tout à fait décents (oui, La Lettre écarlate, c'est à toi que je m'adresse). Là, non seulement l'adaptation n'a rien compris au matériau d'origine, mais en plus, le film à proprement parler n'a pas grand-chose pour lui et certains passages sont mêmes carrément embarrassants. Par exemple :
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- La mère supérieure de l'orphelinat est un personnage absolument ridicule, au-delà du cliché. Elle est même tellement méchante qu'elle vole leurs rations à de pauvres orphelins en temps de guerre, dites donc. Ce niveau de gros sabots est valable si on s'adresse à des enfants de moins de 5 ans, mais quand on a le niveau de lecture d'un adulte, un peu de subtilité serait la bienvenue.- J'ai lu quelque part que les acteurs du film trouvaient les chants de pirates ringards et qu'ils ont donc refusé d'en chanter. Résultat, on se retrouve avec des pirates qui chantent... du Nirvana. Oui, le Nirvana de Kurt Cobain. Pendant la Seconde Guerre mondiale, au milieu du Pays Imaginaire. Oui, c'est aussi absurde que ça en a l'air.- L'état major composé exclusivement de femmes, toute pomponnées comme si elles se rendaient à un dîner à Buckingham, qui jouent à la bataille navale en plein Blitz. Non seulement on se demande vraiment ce que ça vient faire là, mais en plus on est à la limite de l'insulte. Je pense vraiment que les officiers anglais avaient autre chose à faire de leur temps pendant que la Luftwaffe venait lâcher des bombes sur Londres.
Le scénario donne l'impression d'être composé de morceaux d'histoire mis bout à bout sans réel souci de liant, quand il n'y a pas carrément des trous ou des deus ex machina en cascade :
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- La prophétie annonce qu'un gamin qui sait voler viendra organiser une révolte contre Blackbeard, et celui-ci, quand on lui sert le gamin en question sur un plateau d'argent... le fait conduire dans sa cabine, lui offre des chocolats et tape un brin de discute, au lieu de lui détacher proprement la tête des épaules. Vous me direz, si les méchants apprenaient à tuer le gentil et à faire les grands discours APRÈS, on ne ferait plus du tout de films...- Le camp soi-disant "secret" des indigènes est tellement bariolé qu'on se retrouve avec une persistance rétinienne pendant 10 minutes, mais les vilains pirates n'ont jamais réussi à le trouver en 12 ans malgré des bateaux qui volent. Tous daltoniens, il faut croire.- La carte toute aussi "secrète" menant au pays des fées et pour laquelle les indigènes sont prêts à donner leur vie est juste posée au milieu de la tente du chef. You keep using the word "secret", but I don't think it means what you think it means.- Hook, trop fort, qui vous retape un bateau échoué sur des récifs, la coque éventrée et les voiles en lambeaux, en deux coups de cuillère à peau, et sans aucune matière première. Mon héros. Ou pas.- Les références lourdingues au VRAI "Peter Pan", à base de "Tu seras toujours mon ami, Hook, hein, dis ?" "Mais bien sûr, gamin, je ne vois pas ce qui pourrait nous séparer !" Ben tiens.- Je veux bien admettre un chouia de moments "TGCM" dans une histoire pareille, mais le "TG ça arrange le scénario même si ça n'a aucun sens", ça passe moins bien. Le lac aux souvenirs des sirènes entre dans la deuxième catégorie. Il n'aurait pas fallu faire PARLER les sirènes pour expliquer tout ça, non madame : Cara Delevingne est juste là pour faire joli, pas pour ouvrir sa bouche.
Le film ne peut même pas se targuer de belles trouvailles en matière de décors, cette version du Pays Imaginaire ressemble davantage à un Oz sous LSD qu'à l'idée qu'on s'en fait dans le roman de Barrie. Tous les acteurs surjouent (même si Hugh Jackman donne l'impression de s'amuser un peu), la palme du faux et forcé revenant à Garrett Hedlund en Hook falot et complètement dénaturé. Même la musique m'a paru à côté de la plaque, et pas seulement à cause de la chanson mentionnée en spoilers.Mes remarques font peut-être inventaire à la Prévert, mais c'était encore le meilleur moyen pour donner mon avis sur ce film sans liant, qui se voulait réécriture d'une œuvre culte et qui finit comme un mauvais film de fantasy. Même Hugh Jackman, que j'adore pourtant, n'a pas réussi à sauver le machin à mes yeux. Je ne voulais pas y croire, mais pour une fois je suis d'accord avec la critique : ce n'était vraiment pas bon...