Haïr les gens, c'est mal

J'avais découvert ce petit bouquin de Robbe-Grillet en prépa, et il avait un tel don pour balancer des coups de pied dans à peu près toute la fourmilière des Grands Sujets Trollesques de la Littérature que c'en était franchement réjouissant. Comme tous les textes ayant une prétention au statut de manifeste, il en fait des caisses, oui, mais au fond ni plus ni moins que l'interview de célèbre écrivain américain moyenne - ou que le manifeste du surréalisme d'André Breton, pour prendre des références plus anciennes. Et je trouve qu'il ouvre des portes (bon : qu'il défonce des murs) qui sont autant de pistes intéressantes.
Comme tous les manifestes, d'ailleurs, il n'a jamais vraiment été appliqué à la lettre. Les autres auteurs rattachés à l'époque au Nouveau Roman avaient en fait chacun son univers et sa démarche qui se distinguaient assez nettement de Robbe-Grillet. Aucun, à ma connaissance, ne renonçait
complètement à toutes les notions (personnage, récit, auteur, etc.) dénoncées par lui. Mais ils avaient l'avantage de creuser dans des directions nouvelles.
Une anecdote : en étudiant le Nouveau Roman, j'avais mis le nez dans
La Modification de Michel Butor, célèbre pour sa narration à la 2e personne du pluriel où le narrateur semble raconter l'histoire en s'adressant au personnage principal et en le vouvoyant. Très peu de temps après, je suis tombé, dans la revue
Faeries, sur une nouvelle de fantasy de Fabrice Colin, "Comme des fantômes", où il utilise le même procédé. Souvenir de Butor ? Possible. Comme quoi, il y a quelque chose à en tirer

(Et ça donnait un beau texte, d'ailleurs.)