Bon, alors pour la beauté du geste (et vraiment parce que je ne veux pas me mettre à préparer mon cours de demain

).Hard science oui, mais ce n'est qu'une infime fraction de la SF, et pas la plus durable qui plus est. Si on devait rester sur du plausible, on ne pourrait plus lire les auteurs des années 30-50-70, qui sont pourtant respectivement des pères fondateurs et des fils prodigues de la SF, parce que leur "science" est largement datée. Pas la peine d'aller jusqu'à
Star Wars - pour lequel l'appellation science-fantasy, pour le coup, est assez pertinente - pour décrédibiliser une oeuvre sur sa vraisemblance !Van Vogt a fondé deux de ses oeuvres majeures sur des théories scientifiques complètement fumeuses :
A la poursuite des Slans décrit un monde dans lequel le "prochain maillon" de l'évolution est apparu, en quelques générations, avec de petites antennes sur le front et des pouvoirs télépathiques. N'importe quel biologiste contemporain sait que ça n'a pas de sens. Le cycle du non-A est fondé sur une approche non-aristotélicienne de la réalité : en tordant des concepts philosophiques il en tire des pouvoirs de l'esprit sur la matière ... un cycle très sympa, mais une théorie scientifique abracadabrantesque. Chez Norman Spinrad dans
Jack Barron et l'éternité, des scientifiques sans scrupules découvrent le secret de l'immortalité : il est dans les glandes, il faut s'injecter des glandes hormonales d'enfant pour ne pas vieillir (ce qui, accessoirement, les tue. Sympa, le dilemme moral !). Là aussi, la science est complètement absurde... de là a parler de science-fantasy... non, non et non !Et que dire d'un Cordwainer Smith, dont les
Seigneurs de l'Instrumentalité sont une des plus belles et des plus poétiques histoires du futur jamais écrites ? Et même James Blish, pourtant auteur de
hard science s'il en est, pourrait subir un démontage en règle sur le plan de la vraisemblance. A ce moment-là, la classification "science-fiction" proprement dite dépendrait-elle uniquement de la qualité de la poudre aux yeux jetée au lecteur ?Un dernier exemple pour la route :
Un cantique pour Leibowitz, de Walter M. Miller, raconte un futur post-apocalyptique ou la société humaine se restructure graduellement... autour de quelques congrégations post-chrétiennes, où des moines copistes ont gardé les dernières traces de savoir un peu comme ils l'ont fait aux heures les plus sombres du moyen-âge européen. Le postulat de départ est résolument SF (F de fiction, je veux dire !) : un futur direct de notre monde, une rationalité totale du récit, des bribes de technologie ayant résisté à l'hiver nucléaire...Pourtant, l'importance de la religion et l'obscurantisme qui sont racontés ne laissent pratiquement aucune place à la science : alors est-ce de la science-fantasy ?Non, vraiment, je veux bien que le terme de science-fantasy soit particulièrement adapté à quelques ouvrages dans lesquels la technologie spatiale ou futuriste n'est qu'un support à la création mythopoïétique, comme Star Wars, Dune, Pern ou Majipoor, mais de là a en faire un grand sac dans lequel on fourre toute la SF qui ne répond pas aux critères de ce Richard Risch... a ce moment-là, monsieur Risch se retrouvera tout seul en science-fiction, avec peut-être un Kim Stanley Robinson...La SF a été pour moi une passion d'adolescent et de jeune adulte, avant la fantasy. Et au fil de la lecture des Bradbury, Spinrad, Sturgeon, Resnick, Banks, Adams, Asimov, Heinlein, Van Vogt, Dick ou Keyes (Daniel), je dirais que la SF est au moins aussi variée que la fantasy, sinon plus.D'où la difficulté pour ceux qui veulent déterminer laquelle est un sous-genre de l'autre...
