Je reviens de la séance.Je me suis pris une bonne claque, je suis content !

Impressionnant de maîtrise pour son temps en terme d'animation et de qualité de dessin. Un travail énorme assurément le film étant assez dense.Je pense que Nausicaa inaugure l'oeuvre de Miyasaki : annonces des thèmes favoris, de l'ambition visuelle de ses films ultérieurs et c'est la première vrai apparition de l'héroïne Miyasakienne, celle que l'on va retrouver déclinée en leit-motiv dans pas mal de ses films : Nausicaa en est la figure la plus "femme" (beauté naturelle, maturité), Satsuki (Totoro) en est la version plus "enfant"(candeur, innoncence) , Kiki la version plus "adolescente"(elle se cherche, toujours en rire ou en larme), San (Mononoke) la version la plus "sauvage"(mystérieuse, indomptable, déterminée) et pourtant c'est bien ce joli visage pur qu'on retrouve nuancé à chaque fois et qui semble être la pureté même chez Miyasaki, son idole féminin en quelque sorte.Nausicaa est un film globalement épique et dense, homérique (référence grecque nausicaa), symbolique, très onirique, avec un gout du momental, donc très différent de la période "soft" de Miyasaki qui va progressivement lui succèder ( avec pour chef d'oeuvre Totoro, l'art de faire une animation superbe à partir d'une histoire faussement simple et au regard porté sur les petites choses qui deviennent importantes) Puis, notamment avec Princesse Mononoke & le Chateau Ambulant , il semble que Miyasaki repart vers des films denses.Nausicaa, comme Princesse Mononoke, a une dimension écologique affirmé, mais il semble que la pensée de Miyasaki a évolué depuis le temps, comme le monde d'ailleurs.Nausicaa est bien ancré dans les années 80 et on y ressent le penchant post-apocalyptique des films, livres, mise en scène de l'époque, comme Blade Runner, Mad Max (ou encore le Wagner de Chéreau) etc...C'est le contexte de la guerre froide qui torture l'imagination humaine et fait craindre le pire. Perte de confiance absolue dans le comportement des hommes, l'histoire démarre quand le mal est fait, mais il y subsiste toujours une clé d'espoir, un sens du bon, de la raison et de la justice qui peut faire changer les choses. C'est le cas dans Nausicaa, désastre industriel déjà survenu dès le début du film créant une forêt toxique et une princesse lucide et juste qui trouve la solution grace à sa sagesse et à sa science. Dans l'optique de Nausicaa, tout laisse paraître que l'industrie mène forcément à ce genre de désastre. C'est une fatalité aux yeux de l'époque.A l'inverse dans Princesse Mononoke les jeux ne sont pas faits du tout (pas de fatalité) et, dès le début, on peut tout faire changer au moindre instant, ça tient pas à grand chose en fait. D'ailleurs pour ce qui est du désastre les hommes en sont autant capables ( les forges qui sacagent la forêt) que les démons de la nature (les tatari-gamis qui dévastent leur propre forêt par leur colère aveugle). La Nature ne relève plus forcément du bien ou du mal, les hommes non plus d'ailleurs, tous deux commettent des malheurs lorsqu'ils sont en conflit. Et finalement le malheur c'est le conflit tout court ( la "haine") . Le héros Ashitaka apparaît alors comme un médiateur qui est capable de penser la conciliation entre les hommes et la nature, d'imaginer qu'ils peuvent vivre ensemble dans le respect. Mononoke est plutôt dans l'optique les années 90 avec la fin de la guerre froide, et toujours d'actualité (avec par exemple l'essor de la notion de développement durable qui marque les consciences écologiques dans le monde)Entre Nausicaa et Princesse Monoke on voit toute la pensée de la Nature évoluer et se ressentir dans l'oeuvre de Miyasaki. Princesse Mononoke est quand même nettement moins onirique que Nausicaa, ce qui permet à Mononoke d'avoir une portée plus large car plus "sociale" dirons-nous : il décrit des faits culturels rentrés dans l'Histoire et des phénomènes de sociétés en plus du récit écologique, ce qui lui donne une dimension plus grande pour le spectaeur, renseignant sur le Japon, par exemple. La notion de "Patrimoine" existe chez Mononoke alors qu'elle est très limitée chez Nausicaa qui reste un film très onirique et symbolique.Enfin d'un point de vue des animations, Nausicaa a certes vieilli, c'est sensible, mais la qualité des dessins est déjà là, la décomposition des gestes est de très grande qualité, et la rapidité du montage impressionne de maîtrise!!!L'expression de la princesse est soignée et vive, les scènes de vol sont d'un dynamisme absolument monumental, le montage est très "cut" pour l'époque, il est capable de couper au plus fort de l'action pour jouer sur des récits parralèles et maintenir le suspens!! Ce qui fait qu'on accroche irrésistiblement, c'est très poignant.Pour la musique le thème de Nausicaa est très beau mais certain trucs ont un peu vieilli : les sonorités et rythmiques de synthétiseurs dans les scènes d'actions ont l'air assez ringarde aujourd'hui, on se croirait un peu dans les années 70 et ses sitcoms...Mais bon, le thème de Nausicaa domine largement et celui-là qu'on retient. Miysaki et Hishaishi ont d'ailleurs laissé tomber ce genre de chose dans les prochains films. Le thème de Nausicaa n'est pas sans rappeler le nostalgique thème de Porco Rosso ou le très pur thème du Chateau dans le Ciel.Bref un film à voir, il s'avère important pour tous les gens très sensibles à l'oeuvre du grand maître de l'animation japonaise.