Witch a écrit :Tu peux apporter au débat en expliquant à ceux qui ne connaissent pas en quoi il y a selon toi un lien entre ces deux auteurs. Et s'ils le souhaitent les forumeurs te répondront.
Let’s go ! 
Si j'avais été au podcast avec les grands manitous et Maître Patrice Louinet, j'aurais évoqué les points suivants...Conan et sa grosse épée, Druss et sa grosse hache :
les héros musclé et musculeux occupent le devant de la scène dans les œuvres des 2 auteurs mais dans les 2 cas tout est loin de se résumer à cela.Je trouve que les auteurs réalisent toujours un bon mix action / réflexion dans leurs romans.Beaucoup d'action et d'aventure...là où d'autres auraient fait trainer ça en longueur sur plusieurs tomes ! (
Dark Schneider copyright)
On sent chez les 2 auteurs un intérêt pour le survival (le mot survival étant anachronique pour Howard certes) : combien de fois leurs personnages sont poursuivis, traqués, emprisonnés, assiégés… et pas toujours par des êtres humains.J’ai vu un parallèle entre les colons aquiloniens qui tentent d’échapper à l’invasion picte dans
Au-delà de la Rivière Noire et les rescapés qui tentent d’échapper à l’invasion thrace à la fin du
Bouclier du Tonnerre.Peut-être faut-il expliquer cette similitude par le fait que les 2 auteurs ont réutilisé à 50 ans d’intervalle les codes du western qui apparaissent même tels quels avec leur univers dans leurs parcours respectifs.
Les 2 auteurs un intérêt pour certaines activités sportives :Ainsi par exemple,
Le Lion de Macédoine contient un passionnant concours d’endurance,
Druss la Légende un long combat de boxe… (
La Légende de Marche-Mort, que je n’ai pas encore lue, contiendrait un concours de lutte)…on peut les retrouver dans les nombreuses courses de fond effectuées par les poursuivants ou les poursuivis (les personnages de Conan voyagent de cité à cité en traversant campagnes et contrées sauvages en courant comme l’ironisait John Doe dans le podcast) et les nombreux affrontements au corps à corps (duel de force entre Conan et Baal-Ptéor dans l
es Mangeurs d’Hommes de Zamboula et un bel affrontement à la lutte entre El Borak et Ptolémée dans
Les Epées des Collines) qui parsèment les récits howardiens.J’ai aussi vu une similitude entre Kaelin Ring escaladant les montagnes d’"Ecosse" et El Borak gravissant les falaises d’Afghanistan…Ce n’est pas un hasard si les 2 auteurs avaient un physique qui compte : R. I. Howard avec ses 1m78 dans le Texas des années 1930 avait déjà un fort beau gababit, David Gemmell ses 2m et ses 120 kilos étant lui aussi bien charpenté. Ils avaient un intérêt certain pour la boxe qu’ils ont pratiqué tous les 2 et cela se ressent régulièrement dans leur œuvre.
La place de la magie est assez semblable dans les 2 œuvres :Pas de rationalité avec le surnaturel, la magie, souvent noire d’ailleurs, est aussi mystérieuse que dangereuse : les héros en sont parfois les victimes, mais jamais les auteurs. On n'a pas de magiciens parmi les personnages principaux comme en high fantasy.
edit : sauf Duvodas dans Dark Moon (coeurdechene copyright)L’univers créé par David Gemmell a une bonne tête d’âge hyporien !Drenaï, royaume occidental avec ses frontières sauvages tenues par les pionniers = AquilonieTantria, empire oriental oscillant entre division et expansion = Turan (Le roi Gorben faisant pendant au roi Yezigerd)Montagnes de la Lune = Montagnes de Cimmérie ?Chiazte = Khitaï ? Opal = Punt ?
R. E. Howard et David Gemmell rompent avec le côté chevaleresque et féerique, d’où cette intérêt pour les héros marginaux, renégats (qui est d’ailleurs le titre d’un livre de David Gemmell) ou hors-la-loi : pas de princes, de princesses et de chevaliers bien propres sur eux. Nous on a droit à des voleurs, des assassins, des mercenaires… bref des individus le plus souvent sans foi ni loi.(Gemmell met en scène Waylander, son héros assassin bien avant que
L’Assassin Royal et
Assassin’s Creed ne lancent la mode de la fantasy à capuche soit dit en passant)
R. E. Howard et David Gemmell aiment les héros vindicatifs : Conan, El Borak, Solomon, Kane, Turlogh Dubh O'Brien, Cormac McFitzGeoffrey sont-ils très différents d’un Druss, d’un Jon Shannow ou d’un Skilgannon quand ils partent tous seuls au bout du monde assumer la vengeance qu’ils se sont promis à eux-mêmes où qu’ils ont promis à d’autres ???R. E. Howard et David Gemmell malgré des univers virils peuplés de multiples demoiselles en détresse ne négligent en rien les
personnages féminins aussi forts qu’indépendants ! Par exemple, Karis dans
Dark Moon est-elle si différente de la Sonya la Rouge dans
L’Ombre du Vautour (les 2 personnages qui s’illustrent dans un siège long et sanglant avant d’admettre qu’elles peuvent bien se permettre d’avoir un compagnon sans perdre leur indépendance)R. E. Howard et David Gemmell présente souvent des héros monolithiques, du coup pour
il est nécessaire de leurs adjoindre des personnages secondaires hauts en couleur qui les mettent en relief. Le Conan d’
Au-delà de la Rivière Noire est mis en valeur par le point de vue de Bathus, le Druss de
Légende est mis en valeur par le point de vue de Rek.Je me faisais cette réflexion pour El Borak : le personnage ne prend de la consistance qu’auprès du sidekick volontaire ou involontaire qui lui sert finalement de faire-valoir.Autre exemple, le prince Murillo de
la Maison aux Trois bandits m’a vraiment fait penser au prince Sirano de
Dark Moon.
Chez R. E. Howard et David Gemmell on sent un intérêt pour la chose militaire, même si cette dernière m’est pas forcément mise en avant. Par exemple, moi j’ai vu des ponts entre la bataille des
Rois de la Nuit et une de celles du
Lion de Macédoine.Dans
les Rois de la Nuit :
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Bran Mak Morn confie à Kull le commandement de Nordiques, équipés solides cottes de mailles, qui doivent tenir une vallée coûte que coûte face « aux légions bardées d’acier » tandis que les archers pictes et les chars gaël prennent les Romain à revers.
Dans l’univers parallèle du
Lion de Macédoine :
► Afficher le texte
Parménion équipe des hilotes comme des hoplites, les place au centre de la ligne de bataille et leur ordonne de tenir coûte que coûte tandis que les hoplites spartiates déguisés en hilotes vont écraser les ailes pour prendre les troupes d’élites adverses à revers
C’est un des classiques de la stratégie, mais dans leur description, j’y ai vu une approche similaire
Chez les 2 auteurs on devine la tentation de faire du roman historique, mais que le cadre du roman historique était trop étriqué pour leur imaginaire qui va de l’Antiquité au western.Je ne vais pas reprendre tout ce qu’à dit Patrice Louinet dans ses postfaces, mais concernant David Gemmell :Etape 1 :
Le Lion de Macédoine1ère partie majoritairement historisante, le surnaturel apparait occasionnellement2ème partie majoritairement fantasy, l’historique apparaît au début et à la fin du récitEtape 2 :
RiganteDavid Gemmell crée un monde secondaire pour s’affranchir des contraintes historiques mais écrit 2 histoires qui rentrent parfaitement dans le cadre du péplum ou du capes et d’épées tellement la ressemblance entre les Rigantes et les Pictes/Ecossais est flagrante. Néanmoins le fantastique / la fantasy ont leur place dans les 2 récits.Etape 3 :
TroiePour ne pas s’enquiquiner des références historiques David Gemmell écrit sur des temps mythologiques mais ne peut pas s’empêcher de nous reconstituer un âge du bronze finissant truffé de références historiques dans lequel le fantastique est presque absent.Cette parenté avait été fortement défendue par
Fabien Lyraud et
Dark Schneider, et débattue par
John Doe et
Gillossen.Maître
Patrice Louinet avait tranché : « Gemmell a parfois retrouvé le souffle howardien » mais pas toujours car la noirceur et le pessimiste, ponctuels chez Gemmell, sont quasi permanents chez Howard. De plus Gemmell est plus dans la mélancolie alors que Howard est davantage inspiré par une certaine forme de nihilisme. De plus la thématique de la rédemption chère à Gemmell est étrangère aux héros howardiens, bien souvent aussi mystérieux qu’avares d’informations à leur sujet.Autre différence, Howard excelle dans le huis-clos (
les Clous Rouges), genre que n'a pas exploré David Gemmell.A vous la parole !
PS :J’ai quand même mis du temps pour réaliser ce comparatif, donc du coup tous mes arguments ne sont pas forcément à l’avenant et aussi bien étayé les uns que les autres… Je me réserve le droit de compléter ce message au fil du temps.