

Et du coup en quoi le fait religieux serait mal compris? Il me semble pourtant que l'explication communément admise est justement celle-ci. (je trouve pas de smiley "c'est une vraie question pas un vulgaire troll" mais c'est l'idée).Foradan a écrit :Et je finis : la comparaison entre la religion du monde réel et historique avec les mondes fictifs a la première difficulté que le fait religieux est majoritairement très mal compris et connu.La portée de la religion, des religions, c'est tout de même essentiellement sur la mort, ce qu'il y a au-delà et comment s'en sortir au mieux (réincarnation, ré incorporation, résurrection, purgatoire, néant, changement d'état, deuxième chance...) en recommandant un mode de vie.
Pas sure que la compétition soit si marquée que ça, en tout cas sur Terre, après dans les mondes fantasy je ne dis pas. Même aujourd'hui, une religion monothéiste comme la religion chrétienne se paye quand même une pelletée d'anges, archanges, prophètes, sainte trinité et tout le reste. Un seul dieu certes, mais si on est capable d'accepter une notion vaguement élastique du divin on se retrouve avec un panthéon polythéiste en bonne et due forme sous les yeux. Si j'arrive à remettre la main dessus je vous mettrai des extraits intéressants d'un HS du Monde des religions qui date du début de l'été, ils discutaient justement de la naissance du monothéisme en argumentant du fait que les trois religions du livre, qui en sont les représentations les plus évidentes aujourd'hui n'étaient pas les premières à y avoir pensé. Il y avait même débat sur l'attribution de l’appellation "monothéisme" à la passade "Aton le seul et l'unique" de l'Egypte antique.Sintaël a écrit :La compétition entre polythéisme et monothéisme
Pour le coup le christianisme n'est de loin pas la seule religion qui donne dans le syncrétisme. Toutes les religions fonctionnent comme ça, on prend les mythes locaux, on bidouille, on propage, on se sépare en plusieurs courants qui ont chacun leur interprétation, on se rend compte que dans le village machin il y a une divinité locale donc on récupère... En matière de religion rien n'est apparu comme ça "pouf" au milieu du désert, on peut retracer les histoires de la Bible comme celle de tout texte religieux comme puisant à la source de mythes plus anciens mais remis au goût du jour.Au final chaque religion tente d'expliquer le monde avec sa propre grammaire, ce n'est donc pas étonnant qu'elle tente à son tour d'expliquer les mythes déjà en place. (et aussi parce que ça fait pas sérieux le "ah non mais ce miracle là on a aucune idée de comment c'est arrivé, c'est un coup d'un autre dieu". Ça fait un peu des trous dans la cosmogonie)Sur un sujet un peu similaire les parallèles entre mythes grecs et romains sont plutôt intéressants aussi, dans la catégorie "elles sont sympas tes histoires, ça te gène pas si je récupère?" on est face à des champions.Ce qui me permet de rebondir (merci Homère) sur le fait que en fantasy comme ailleurs la religion est forcément un outil politique (et ce n'est pas péjoratif), parce qu'un peuple qui accepte de vivre sur un même territoire et d'adhérer aux mêmes règles va généralement avoir des valeurs communes et une acception du monde qui l'entoure commune. Aujourd'hui dans des pays qui ont séparé Eglise et Etat ces valeurs sont républicaines, dans d'autres elles sont religieuses, et dans d'autres on mélange les deux, mais elles forment à chaque fois un socle utilisé pour légiférer et gouverner. Pour un exemple un peu ancien on peut prendre l'Enéide, récit épique de Virgile mettant en scène Enée qui fuit avec son père sur le dos les ruines de la ville de Troie. C'est un vrai récit fondateur de la mythologie romaine, et c'est une oeuvre de commande avec un cahier des charges: on s'inspire d'Homère qui est déjà un phénomène de librairie, on reprend les mythes existants qui marchent plutôt pas mal en écrivant la suite, on fait la promotion des valeurs fondatrices de l'Empire Romain (le courage, la fidélité, le respect des dieux et de la patrie), on secoue et on croise les doigts pour que ça aide à tenir en place l'Empire.Tout ça pour dire que ça m'intéresse bien comme sujet la religion en fantasy :)Et pour en revenir à Carey c'est aussi un aspect que j'apprécie dans ses romans cette façon de revisiter les religions actuelles en insérant un "et si" qui chamboule complètement le paysage.Sintaël a écrit :J'ai toujours vu le christianisme comme une religion spécialiste de la propagande et stratégie politique. Elle a récupéré les rituels, images du paganisme, soit en les singeant, soit en les fustigeant
C'est typiquement le genre de bouquins qu'on regrette de n'avoir pas cité au moment d'éteindre les micros.En tout cas merci pour ces premières réactions et ces débuts de discussion très intéressants. On a fait un podcast assez tranquille pour la rentrée, donc n'hésitez pas à approfondir, il y a encore plein de choses à dire sur le thème :)PS : une référence à Arrested Development s'est cachée dans ce podcast. Saurez-vous la retrouver ?Ayesha (évoqué en fin du podcast précédent d'ailleurs par Stéphane Marsan) aurait pu être évoqué car le thème religieux y est plutôt central.
Je dis mal compris de par mon observation, de personnes qui se font une macédoine de croyances, sans vraiment y penser, parce que "la réincarnation c'est cool", comme si on pouvait choisir ("attention, par contre, je veux pas me réincarner en cafard, hein"), mais ils font baptiser leur enfant "au cas où, ça peut toujours servir".Et je dis mal compris, parce qu'à une époque, où il suffit de cliquer pour avoir de quoi s'informer (même pas besoin d'ouvrir un livre), je vois et j'entends beaucoup de confusion, d'approximations, voire de mensonges par manque de recherche, parce que c'est plus facile de ne pas se poser de questions.Et je serais justement curieux du nombre de personnes qui répondraient spontanément que la religion concerne l'au-delà, et pas simplement une contrainte sur la vie, avec des règles qu'on ne comprend pas toujours.En fantasy, comme on a à peu près tout sous la main, on trouve des zélotes, des infidèles, des païens, des divinités qui influent directement sur la vie des hommes (et comme je repense aux Chocs des titans, la vie des femmes aussi, parce qu Zeus a les yeux qui brillent et un appétit sans fin), et des divinités lointaines, qui n'interviennent jamais directement de manière trop visible, parce que le monde n'est PAS son théâtre de marionnettes.Et si on ne parle pour ainsi dire jamais de la religion des hobbits, sous une forme qui nous soit familière, c'est parce que le hobbit ne se pose pas forcément la question de la mort et après (sauf les philosophes hobbits).Nausikaa a écrit :Et du coup en quoi le fait religieux serait mal compris? Il me semble pourtant que l'explication communément admise est justement celle-ci. (je trouve pas de smiley "c'est une vraie question pas un vulgaire troll" mais c'est l'idée).Foradan a écrit :Et je finis : la comparaison entre la religion du monde réel et historique avec les mondes fictifs a la première difficulté que le fait religieux est majoritairement très mal compris et connu.La portée de la religion, des religions, c'est tout de même essentiellement sur la mort, ce qu'il y a au-delà et comment s'en sortir au mieux (réincarnation, ré incorporation, résurrection, purgatoire, néant, changement d'état, deuxième chance...) en recommandant un mode de vie.
C'est pas faux tiens. Faire table rase des croyances existantes est particulièrement peu crédible, et pas vraiment jouable sans rencontrer des oppositions assez violentes. Enfin sauf si tu peux laver le cerveau de tout le monde (hé! on peut reparler de Kushiel là, Imriel t3, et hop c'est fait) ce qui n'est pas aisé. A mon avis, la difficulté d'écrire une religion qui ne soit pas un bloc monolithique réside dans la profonde complexité des croyances, les notres se sont forgées sur des millénaires d'histoire, de croisements entre cultures, au gré des voyages et de la propagation de l'écrit. Du coup il faut bien avoir l'obsession d'un Tolkien pour réussir à faire quelque chose de subtil.Sintaël a écrit :Ce qui me semble, après coup, manquer de subtilité.
Je n'en trouve pas, mais il y a de bonnes chances que la transition polythéisme > monothéisme soit plus souvent mise en scène que l'inverse. Peut-être parce que l'on a tendance à voir le polythéisme comme archaïque et le monothéisme comme une évolution logique des choses. Ce qui est particulièrement ethnocentrique, mais c'est pas une grande nouvelle.***Witch > parce que tu crois vraiment avoir la liberté de prendre des vacances de podcast? Je suis outréeFabien Lyraud a écrit :Il existe des romans de fantasy parlant de la transition d'une société polythéiste vers une société monothéiste mais des auteurs ont ils tenté de mettre en scène la démarche inverse ?
Ca c'est un choix que j'adore personnellement, desfois je croise les doigts pour qu'en fait ce soient les vikings qui aient raison qu'on rigole un peu. "Sérieusement, on vous envoie Hemsworth et Hiddleston et vous avez toujours pas compris?"(...)Au delà de la simple paresse je pense que le poids des traditions joue beaucoup, baptèmes ou mariages peuvent être autant des rites sociaux que religieux. Les mariages civils sont intéressants à ce propos, dans le rituel on reprend des gestes du mariage à l'église mais en enlevant Dieu de l'équation pour unir un couple par un contrat légal. Ce qui montre, quelque part que le rituel est tout aussi important que le religieux, et que l'on peut séparer les deux.Foradan a écrit :"au cas où, ça peut toujours servir"(...)je vois et j'entends beaucoup de confusion, d'approximations, voire de mensonges par manque de recherche, parce que c'est plus facile de ne pas se poser de questions.
C'est sur qu'on ne peut pas vraiment l'accuser de subtilité. J'ai lu en diagonale vers la fin parce que c'est vraiment pas ma tasse de thé, mais il me semble que la dernière histoire des recueils est particulièrement expliciteRoland Vartogue a écrit :J'aime beaucoup aussi l’œuvre de C.S. Lewis, mais il évident qu'il n'a pas cherché à diluer autant ses images religieuses dans un récit complètement détaché du réel
Du coup ça nous fournit un exemple intéressant de livre très critique à l'égard de l'institution religieuse tout en proposant une véritable réflexion sur l'éthique et la morale.Roland Vartogue a écrit :De façon intéressante, sa démarche a créé un sentiment de rejet chez certains non-croyants, notamment Philip Pullman qui, de son propre aveux, a conçu A la croisée des mondes comme une "réponse" aux Chroniques de Narnia.
Sauf qu'une réflexion sur la morale et les valeurs humaines n'est pas forcément une réflexion puisant ses sources dans la religion, devant le comportement d'un personnage de fantasy, ou devant la description d'un univers, croyants comme non-croyants peuvent chacun y puiser ce qui les intéresse.Roland Vartogue a écrit :Comme quoi, il vaut peut-être mieux s'en tenir à des images religieuses que reconnaîtront ceux qui le veulent et que les autres pourront ignorer à leur convenance quand on écrit de la fantasy.
Si on parle du Docteur et de la foi, il y a aussi s06e11 The God Complex où la foi aveugle est questionnée qu'elle soit en une divinité ou pas.Foradan a écrit :Tiens, je commence à prendre goût à l'univers du Docteur (construit, référencé en interne et en externe, tout ce qui me plaît en fait) et j'ai repensé à ce sujet en voyant l'épisode double "la planète du Diable" (saison 2, épisodes 8 et 9).
Si on prend la magie comme explication du tout ce qu'on n'arrive pas à comprendre effectivement, un acte de foi est nécessaire, puisqu'il faut être persuadé que la meilleure explication pour la boule de feu qui vient de partir du magicien est d'ordre magique. Par contre dans certains mondes fantasy la magie est intégrée comme une force scientifique et les personnages "croient" en la magie comme ils "croient" en la gravité. En feuilletant le Nom du Vent par exemple je me suis rendue compte que la magie pratiquée par Kvothe est présentée comme un principe physique.Foradan a écrit :Croire en la magie est-il un acte de foi d'une certaine façon ?
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