NeoSib a écrit :j'avoue ne plus lire ce qu'écrit Milieuterrien depuis un bon moment et n'avais donc pas vu ça, effectivement. Mea culpa.
Faute avouée, faute à-demi pardonnée ;)Et pour la moitié qui reste à pardonner, comme on m'a invité à moins évoquer untel ou untel ici je m'efforce de ne plus parler que des films, donc je conçois qu'aux yeux de ceux qui accordent peu d'intérêt aux films même quand ils visitent la section du forum consacrée aux films, mes interventions aient perdu un peu de leur saveur...Pour en revenir aux perspectives d'adaptation du Silmarilion, j'ai vu évoquer ici un point qui me semble susceptible d'aiguiller la conversation :
La vente des droits que Warner et PJ utilisent, elle n'a pas été faite par amour passionné du cinéma et la volonté farouche de voir Legolas surfer devant ses cousins elfes au gouffre de Helm ; elle n'a pas été faite non plus par goût du lucre, mais par un besoin d'argent (ça n'a pas été vendu si cher que ça).
Cette observation me paraît remettre en situation, et même en question, l'argument livriste à tout crin, selon quoi les 100 millions de livres vendus se suffisent à eux-mêmes comme légitimité et en dehors de ça seraient 'trahis' par l'adaptation filmée.Car tout de même, n'escamote-t-on pas là tout l'appel d'air suscité au bénéfice de la vente des livres par la multitude de travaux d'adaptation venus s'inspirer de la Terre du Milieu et s'y greffer ? Pour les films, l'adaptation récente n'a pas, à ma connaissance, nui au prestige des livres, mais elle est plutôt arrivée à point nommé pour relancer une franchise menacée d'étouffement face à la floraison des univers parallèles et para-dragonneries de tous acabits. Mais avant même les films, il y a aussi eu 30 ans de jeux de rôle, régulièrement passés sous silence alors qu'ils ont par leur nature même fédéré les myriades de rencontres créatives et au final une explosion de la fantasy que rien n'avait laissé prévoir à cette échelle-là lorsque seuls les livres étaient sur la table. Les jeux de rôle, c'était plein de choses au plan social et même commercial : les figurines, les mini-décors, les scénarios, l'identification aux héros, etc. C'est à leur époque, et pas avant, qu'on a vu fleurir partout les boutiques à jeux et babioles en vitrine.Alors que le SdA a emprunté la plupart de ses créatures au monde réel et à des mythologies qui n'avaient pas attendu Tolkien pour pondre des trolls, des nains, des aigles, des magiciens et des dragons ou des chevaliers, le livre a été porté par la vague des JdR un peu comme Microsoft a été porté par IBM lorsque sont nés les personal computers. Selon mon expérience, on ne peut pas comprendre l'impact contemporain de Tolkien si l'on n'a pas idée de l'impact de D&D by Gary Gigax voici 30 ans. Il se trouve que la Terre du Milieu de Tolkien était très JdR-compatible, car porteuse d'un bestiaire nourri et d'une trame manichéenne très lisible : players vs monsters, sur laquelle les dessinateurs notamment ont pu s'en donner à coeur joie. Mais si Gary Gygax avait choisi un autre univers, par exemple un univers de SF genre Dune, tout aussi culte à l'époque, ou même les mondes planétaires de la Guerre des Etoiles, pour y inventer son role-playing game, l'Histoire de la Fantasy aurait peut-être pris un tout autre tournant.Ce n'est pas déprécier la portée proprement littéraire de l'oeuvre de Tolkien que de signaler l'autonomie par rapport à toute littérature de la dynamique suscitée entre joueurs et illustrateurs. ... Une dynamique dont le Tolkien Estate n'a pas été le plus mal loti, en termes de retombées.Pour les films, c'est un peu pareil. Personne n'avait anticipé le prestige atteint par l'adaptation de P Jackson, les millions d'entrées du box-office et surtout l'entrée de plain-pied dans la cour des grands du cinéma avec une avalanche d'oscars jusque-là jugée totalement inaccessible aux univers dérivés de la Fantasy. N'oublions pas qu'il s'agissait bien de récompenses proprement cinématographiques (effets spéciaux, bande originale, décors, costumes, etc.) et non pas simplement littéraires.Sans avoir à se montrer apôtre de PJ, cela tient du simple constat, et l'idée même de 'piétiner' PJ est d'emblée teintée d'humour, comme si une libellule avait idée de se poser sur un Mumakil en déclarant 'Je piétine le Mumakil' :lol:Aujourd'hui, la question qui peut se poser au Tolkien Estate, c'est : est-il imaginable de tirer une troisième fois le gros lot, cette fois à partir du Silmarilion et toujours au cinéma ? Car aussitôt se posent les questions corrélatives : - Le TE ne s'est-il pas coupé de toute possibilité adaptative par P Jackson lui-même à force de l'avoir canardé ?- Trouvera-t-on encore des réalisateurs tentés d'adapter le Silmarilion en voyant comment le TE a canardé P Jackson pour 'trahison' ?Le purisme agressif, c'est bien beau, mais combien de kilomètres tient-on dans le désert avec seulement ça dans la gourde ?