Page 23 sur 31

Posté : jeu. 12 juin 2014 18:14
par Zaebas
Alors je vais essayer de répondre à tes deux interrogations.En ce qui concerne S, c'est un bel ouvrage. L'histoire, ou plutôt les deux histoires, ne sont pas super intéressantes et il n'y a pas de grandes prouesses scénaristiques, mais on passe un bon moment. Mais le point fort de ce livre est justement le livre en lui même, c'est beau, c'est travaillé, on joue avec, les fac-similés ont vraiment de la gueule. C'est à voir, si vous avez les moyens jetez vous dessus car c'est une expérience de lecture.Il est juste extrêmement difficile de le trouver en bibliothèque car les divers fac similés compliquent la tâche car chacun est glissé à une page particulière pour une raison particulière.En ce qui concerne Tim Willocks, La Religion est un pur chef d'oeuvre comme on le disait plus haut tandis que Les Douze Enfants de Paris perd pas mal en consistance.Mattias Tannhauser reste un des héros de littérature les plus charismatique que j'ai pu rencontrer, mais l'histoire en elle même me semble très (trop?) saugrenue. Cela se déroule durant le massacre de la Saint Jean, et ce massacre dans le massacre m'a fait moyennement accroché à l'histoire. Après, j'attends quand même le troisième tome de la trilogie avec impatience car ce second tome à continuer de développer les personnages secondaires et le héros, comme je le disais plus haut, est extrêmement intéressant à suivre.Voilà, j'espère avoir répondu à tes questions.

Posté : dim. 15 juin 2014 11:16
par IbZz
Merci beaucoup pour cette réponse, ça m'aide beaucoup. Je crois que je vais me laisser tenter par S, sachant à quoi m'attendre pour le scénario. Ou carrément commander l'édition américaine et tenter de le lire en anglais? Tant pis si je zappe quelques pourcents du scénario. Pour La religion, je continue, sur tes conseils! On verra bien pour les suites, ce n'est pas toujours indispensable de les lire. Je me rappelle "Spin", de R.C.Wilson, dont je n'ai jamais tenté les suites, de peur d'être déçu tant le premier m'a immensément plu.

Posté : dim. 29 juin 2014 18:20
par Duarcan
Je viens de lire Arlis des forains de Mélanie Fazi, comme je le trouve pas sur le forum j'imagine qu'il n'est pas considéré comme un livre de fantasy. Excellent petit récit initiatique avec un monde qui ne devient fantastique que tardivement. J'ai beaucoup aimé l'ambiance.

Posté : mer. 2 juil. 2014 21:26
par Littlefinger
Un coup de cœur, vraiment important avec Le Monde D'Aïcha, aussi sur Just A Word :"Je suis comme un animal, je ne sais ni lire ni écrire. Mes filles ne doivent pas devenir comme moi, elles doivent aller à l'école."En 2013 parait en Italie une bande dessinée singulière intitulée Le Monde D’Aïcha. Entièrement réalisée en noir et blanc, elle s’inspire des notes et impressions de voyage de la photo-reporter Agnès Montanari, profondément marquée par son voyage au Yémen et sa rencontre avec les femmes de ce pays traditionaliste musulman. Porté par le dessinateur italien Ugo Bertotti, Le Monde D’Aïcha est enfin publié en France par les éditions Futuropolis et parait d’autant plus d’actualité dans notre pays puisqu’il s’intéresse au niqab, ce vêtement noir qui recouvre les femmes yéménites, ainsi qu'à la place de la femme dans la culture arabo-musulmane moderne.Agnès Montanari nous raconte au sein de cette BD la vie et le destin de ces femmes yéménites, plongées dans l’anonymat par le niqab et une société dominée par les hommes. Sabiha, Aïcha, Houssen, Ghada, Fatin…autant de prénoms qui deviennent inoubliables au fur et à mesure que l’on apprend à connaître leur parcours. Le lecteur plonge dans un monde qui semble d’un autre âge, gangrené par une tradition fondée sur quelques écrits coraniques opaques, ou du moins interprété comme bon leur semblent par les hommes. Le Monde D’Aïcha se sépare en plusieurs chapitres, exposant et entrecroisant les vies de ces femmes, en commençant par Sabiha et son horrible histoire, tragique et presque incroyable par sa cruauté. Elle donne le ton par cette description méticuleuse et qui met, avant toute autre chose, la femme au centre de l’ouvrage.Car c’est bien le but d’Agnès Montanari, redonnez une voix et d’une certaine façon un visage à des personnes qu’on s’acharne à déshumaniser. Comme les deux petits apartés inclus dans la BD le rappellent, elles se voient obligés de se conformer à des préceptes soit nébuleux soit totalement archaïques, qu’ils soient issus de l’islam ou de la simple tradition ancestrale instaurée par une société machiste et rétrograde. Ainsi au cours de ces pages difficiles, Agnès aborde la question du mariage forcée et donc de la pédophilie – pratique courante et odieuse mais qui semble tout à fait normale dans une société qui la tolère depuis si longtemps – avec une sobriété et un tact qui force le respect. Les mots sont souvent froids et tranchants, heurtant de plein fouet son lecteur. On ne trouve pas de grandes tournures de phrases dans Le Monde D’Aïcha, simplement de grands mots à propos de la domination, de la brutalité et de l'injustice.Plus l’on s’immerge dans le quotidien de ces différentes femmes, plus la pensée même qu’il puisse toujours exister de telles choses en devient abjecte. La femme se fait fantôme, une ombre noire sans visage, qui, sous l’égide des hommes, ne doit pas, ne peut pas exister. Pour entretenir ce système écœurant, on les maintient dans l’ignorance et l’endoctrinement, pas forcément religieux d’ailleurs, l’habitude suffit. A tel point que les femmes se sentent coupables d’ôter leur voile ou quand un homme les observe. Là où Agnès Montanari frappe le plus juste c’est quand elle choisit de montrer l’immense courage de ces filles du niqab, désespérément en quête de cette liberté élémentaire dont nous jouissons au quotidien. Dès lors, une simple conduite automobile ou la gérance d’un restaurant prend des allures de défis. L’autrice leur rend non seulement leur humanité mais aussi justice et dignité. On s’aperçoit rapidement que la société bâtît par les hommes écrase tout, punit tout et que le destin, aussi cruel soit-il, n’est rien en comparaison de la force combattive de ces héroïnes voilées. Pour parfaire son entreprise, Agnès brise les dessins rudes et magnifiques de Bertotti – parfait évidemment – par des photographies, comme autant de rappels à la réalité et que, non, nous ne sommes pas devant une histoire inventée. Ce sont d’ailleurs les yeux, pleins de feu et de force, de toutes ces femmes qui terminent un récit inoubliable. Comment vous inciter davantage à vous procurer Le Monde D’Aïcha ? On ne parle pas ici d’une fiction mais d’une réalité, dure certes, mais auquel il faut se confronter. Agnès Montanari ne fait pas de son ouvrage un brûlot politique, et à raison. La politique ne rentre pas en compte devant l’obscurantisme et l’horreur de traditions aberrantes. Les voix de ces femmes résonnent avec une force d’autant plus impressionnante qu’elles renvoient aux revendications de certains et certaines en Europe sous prétexte de liberté religieuse. Le Monde D’Aïcha semble mettre en garde autant qu’il libère, concluant sa réflexion sur une postface impeccable de son autrice, qu’on ne peut que saluer pour son travail.Une immense bande-dessinée.

Posté : jeu. 17 juil. 2014 10:37
par Littlefinger
Un petit livre très beau, Quand Hitler s'empara du lapin rose de Judith Kerr :Judith Kerr a écrit en 1971 un livre pour enfants basé en grande partie sur sa vie. Anglaise d’origine allemande, elle est née en 1923 à Berlin. A l’âge de neuf ans, elle doit quitter son pays d’origine du fait de ses origines juives et de la renommée de son père écrivain. Après un périple qu’il l’amène à Londres, Judith prend la nationalité anglaise et attend quelques décennies avant de publier son premier roman : Quand Hitler s’empara du lapin rose. Livre essentiellement autobiographique (même si le prénom de la petite héroïne est Anna), il s’adresse surtout à un public jeune. Devenu aujourd’hui un classique de la littérature jeunesse, le roman raconte d’une façon douce et intelligente l’histoire d’une petite fille confrontée à la marche de l’histoire. Anna a neuf ans. Elle visite souvent le zoo avec son oncle Julius et écoule des jours paisibles avec son grand frère Max et ses parents. Malheureusement, Judith est juive et vit dans l’Allemagne Nazie en 1933. Fille d’un écrivain célèbre et ardemment anti-Nazi, Anna doit fuir Berlin pour la Suisse avant les élections qui, on le pressent, vont laisser un boulevard au parti national-socialiste. Ballottée de l’Allemagne à la Suisse, puis de la Suisse à la France, Anna doit s’adapter à son nouvel environnement et aux langues étrangères avec une rapidité peu commune. Malgré le manque d’argent et les multiples revirements de situation, Anna a d’autres soucis qu’Hitler, elle a surtout ceux d’une petite fille de neuf ans loin de chez elle.Ce qui surprend le plus dans Quand Hitler s’empara du lapin rose, c’est que le dictateur n’est pas le point de mire de toutes les attentions de Judith Kerr. L’histoire, racontée par la petite Anna, fait la part belle aux soucis quotidiens et pratiques d’une enfant qui doit abandonner la vie qu’elle a connu jusque-là. Si Anna ne manquera pas de disséminer des éléments sur la montée du nazisme dans son pays et le destin de son oncle Julius resté au pays, ceux-ci restent en arrière-plan. L’auteure a la riche idée de décrire réellement les événements d’un point de vue d’enfant de neuf ans. Dès lors, Anna s’inquiète de savoir si elle trouvera d’autres amis avec qui jouer, de si elle arrivera un jour à parler correctement français ou si elle réussira l’examen de couture du certificat d’études. La riche idée du roman, c’est de ne jamais forcer le trait et de livrer un récit authentique et touchant.Car touchante, Anna l’est bel et bien. Innocente et naïve, la petite se retrouve confrontée à des choses qui la dépassent largement. Comme lorsque des enfants allemands refusent de jouer avec elle et son frère parce qu’ils sont juifs, ou lorsque son père n’arrive à trouver ni argent ni éditeur dans une Suisse résolument neutre. Le roman adopte une dichotomie surprenante entre les tracas enfantins et anodins, mais qui passent forcément au premier plan du récit, et les événements d’envergure qu’Anna ne peut pas appréhender avec son jeune âge. De ce fait naît une certaine connivence avec le lecteur qui comprend mieux les choses que la petite fille. De même, le récit d’Anna ne manque jamais d’humour et décrit à travers ses yeux d’enfants les villes qu’elle traverse et notamment Zurich et Paris. Judith Kerr parle avec un humour tendre de ces Suisses affables et de ces Parisiens bruyants qu’Anna rencontre, partagée entre la peur de l’inconnu et l’excitation de la nouveauté. On suit les tribulations de la petite fille avec un sourire au coin des lèvres, étonné par le courage dont elle peut faire preuve (apprendre le français en moins de deux ans et obtenir son certificat d’études n’étant pas une sinécure…) mais aussi par l’amour qu’elle porte à sa famille et notamment son oncle Julius resté au pays. Le centre de l’histoire sera toujours porté par les relations qu’entretient Anna avec ses parents et son frère, entre tendresse, colère et moments de bonheur. Jamais tire-larmes et toujours très direct, Quand Hitler s’empara du lapin rose aborde son époque historique avec une grande pudeur. Anna ne devient pas une sorte de martyr du régime nazi, mais un témoin de ces familles contraint à l’expatriation pour échapper à ce qui sera le plus grand génocide de l’histoire. Et si Kerr ne manque pas d’humour, elle ne manque pas aussi de disséminer de multiples références sur les opinions nazis par rapport aux juifs de l’époque, comme la comparaison d’Anna avec le rat ou le parasite à propos de sa famille. Dans un sens, le roman ne cherche pas à nous émouvoir mais surtout à dresser le tableau d’une époque tout entière, de la porosité de l’idées nazies, même dans des pays comme la France, et comment des enfants peuvent appréhender des choses qui les dépassent totalement. En fin de compte, et malgré la simplicité de son écriture, le roman parait plus authentique que beaucoup d’autres sur les idées racistes de ces années là. Après tout, la vérité sort de la bouche des enfants et le nazisme vu par Anna s’avère bête, absurde et cruel. Des qualificatifs on ne peut plus juste. Quand Hitler s’empara du lapin rose s’impose comme un roman idéal pour de jeunes collégiens qui s’intéressent au sujet épineux de la montée du nazisme et ses conséquences. Le roman constitue non seulement une lecture agréable mais aussi intelligente derrière sa simplicité apparente. Il permet d’aborder une époque troublée avec une naïveté improbable mais salutaire. S’il s’affirme aisément comme un classique, le roman peut se targuer également de constituer un très beau récit sur l’enfance. A découvrir.

Posté : jeu. 17 juil. 2014 19:22
par Santino
Aah! Super bouquin que cette histoire de lapin rose. Que de bons souvenirs !! Je l'avais lu en VO quand j'étais au lycée. :)Je ne peux que le conseiller à mon tour.

Posté : mar. 22 juil. 2014 12:23
par Littlefinger
Critique de la magnifique BD, Madame Livingstone, que je vous recommande chaudement :2014 marque le centenaire de la guerre 14-18, certainement un des conflits les plus absurdes du siècle passé. Beaucoup de choses ont été dites et racontés sur cette guerre, notamment à travers divers romans, mais aujourd’hui, c’est une vision originale et à travers une bande-dessinée qui plus est, qui nous est proposé. Les éditions Glénat ont donné la chance au dessinateur Barly Baruti, d’origine congolaise, et au scénariste Christophe Cassiau-Haurie (sur un récit d’Appollo) de livrer une sorte de fiction historique autour d’un des faits d’armes de la Force Publique congo-belge pendant la première guerre mondiale…sur le continent Africain. Perspective alléchante et originale, elle permet non seulement de donner une vision inédite du conflit mais aussi, et surtout, de laisser libre cours au talent de ses auteurs pour accoucher d’une bande-dessinée magnifique.Dans la région des Grands Lacs, dans ce que l’on nomme à l’époque le Congo Belge, le lieutenant et aviateur Gaston Mercier se voit confier sa première mission d’importance sur ce continent sauvage : Détruire le cuirassé allemand Graf von Götzen qui navigue sur le lac Tanganyika. Lors de son arrivée, il fait connaissance avec un certain Livingstone, un métis qui prétend être le fils de l’écossais David Livingstone. Surnommé Madame Livingstone par les forces et officiers belges à cause du kilt dont il ne se sépare jamais, Mercier va apprendre à connaître non seulement un homme mais tout une civilisation, celle du Congo, où les Européens se disputent des terres dont ils ne savent rien.Etrange sensation que de plonger dans cette bande-dessinée. En un instant, l’espace de la magnifique préface de Jean Auquier, nous voici plongés près d’un siècle auparavant, au cœur d’une Afrique déchirée par la guerre. Madame Livingstone n’est pas une bande-dessinée comme les autres. C’est d’abord le trait de Barly Baruti qui enchante littéralement. Précise, subtile, magnifiquement découpée, chaque planche prend des allures de petit tableau d’aquarelle, autant de tableaux quasi-vivants et témoignages d’une époque terrible, le crayon de Baruti virevolte entre les hommes et leurs conflits, en retire la vérité profonde qu’il transmet à travers ses illustrations qui n’ont de cesse de fasciner le lecteur. Mais là ne s’arrête pas la beauté de Madame Livingstone. On découvre rapidement la réalité d’un conflit qui n’a rien à envier à l’absurdité de son équivalent européen, bien au contraire. Sur ces terres encore sauvages, l’homme blanc se fait la guerre par l’intermédiaire de ses colonisés, Allemands et Belges recrutant tel ou tel peuple selon leur découpage historique du territoire dont ils se sont emparés. Les auteurs s’amusent d’abord à resituer les choses et le contexte, à dessiner les « propriétés » terrestres de chacun, les enjeux et les effectifs en présence. Puis arrive rapidement la rencontre entre deux personnages superbes, Madame Livingstone et Gaston Mercier. D’un côté se tient l’homme blanc, l’européen colonisateur, de l’autre le métis, la conjugaison de deux cultures qui n’en renie aucune et tente de les fondre en une. Et là, immédiatement, halte aux clichés, les deux protagonistes vont agir comme un pont, comme une synthèse des maux qui ravage non seulement l’Afrique, mais aussi qui gangrène l’humanité tout entière.Avec une intelligence et une roublardise formidable, les auteurs nous parlent de l’Afrique et de la colonisation. Par la bouche de Livingstone, ce qui semblait si naturel et logique aux yeux de Gaston devient flou et abstrait. Devant ses yeux se casse à la fois ses préjugés d’hommes blancs mais aussi son à priori sur la personne de Livingstone. D’un fait historique (l’attaque du cuirassé et de la région), Cassiau-Haurie parvient à tisser une fiction historique en se basant sur quelques notes et indices retrouvés dans la vie des ancêtres du dessinateur Barly Baruti. Il fond en une seule entité deux registres différents et accouche au fond de ce que l’on est obligé de qualifier de tour de force. Son récit, à la fois dur et incisif, remet en perspective les prétentions des Belges sur le Congo par l’amitié qui se noue entre Mercier et Livingstone. Ce dernier, d’ailleurs, est un régal. Un vrai. Touchant et juste, fort mais humain, il arrive à passer par-dessus les préjugés qu’il peut avoir des blancs – et certainement bien plus fondés que ceux des blancs sur les noirs – pour ouvrir les yeux de Gaston. En retour celui-ci fait ce qu’aucun autre Belge n’a fait jusque-là, considérer en égal un noir. Et c’est certainement là la plus grande beauté de Madame Livingstone.Outre la justesse du propos, Madame Livingstone délivre un récit haletant et prenant des événements militaires qui se déroulent au Congo. Loin des tranchées et de la boue européenne, on assiste à un conflit atypique, dans une jungle étouffante où les assauts se font sur des pirogues ou à travers une végétation étouffante. C’est aussi le constant rappel de la présence de villages et de civils au milieu de la guerre, comme ces petits villages congolais perdus dans la brousse, et qui, le temps de quelques pages, offrent plus de tendresse, de respect et de sourires que toutes les entreprises et les villes bâties par les Belges. Lorsque le retour vers la civilisation européenne se fait après cet interlude, le lecteur revient à une réalité sombre et fausse, comme si la présence des Belges salissait simplement la beauté de ce pays et en rompait l’équilibre fragile. Enfin viendra cette fin, cette conclusion, poignante et outrageusement belle, qui mêle au dramatique une touche de poésie : Dans l’horreur de la guerre et du colonialisme, deux hommes se sont aimés comme des frères.Si l’on ajoute des appendices géniaux qui renforcent la crédibilité historique de l’entreprise et apporte une foule d’informations passionnantes, Madame Livingstone peut prétendre au statut de chef d’œuvre. Touchant et dur, près de cent ans après, le récit de la vie (fictive ou pas) de Livingstone n’en est que plus nécessaire. Par sa justesse historique et sa vision des choses dénuée de clichés, le récit rapporte une époque et une façon de penser, mais témoigne par-dessus tout que tout commence à l’échelle humaine, entre deux hommes, malgré leurs différences. Indispensable, forcément.

Posté : lun. 4 août 2014 20:01
par Gilliatt
Je me demande si je place mon message au bon endroit. Désolé si ce n'est pas le cas.Je lance un appel aux libraires ou encore aux personnes qui pensent visiter leur librairie ou une bibliothèque bientôt.J'aimerais acheter le Quo Vadis ? de Sienkiewicz à ma mère pour son anniversaire. Le hic, c'est qu'elle ne lit ni les formats poches ni les livres imprimés en petits caractères. Or, j'ai vu que Les Belles Lettres avaient publié une version grand format, qui compte environ 100 pages de plus que ma version poche (GF). Ça me semble intéressant, mais comme mon libraire ne l'a pas en stock, je ne peux pas vérifier. Et comme c'est une commande spéciale de France, il refuse de me le commander, à moins que je ne m'engage à l'acheter et laisse un dépôt.Alors, est-ce que quelqu'un aurait l'amabilité de me dire s'il est imprimé en gros caractères ? Je ne voudrais pas le commander pour rien.Merci. :)

Posté : mar. 12 août 2014 07:06
par Duarcan
Lu le classique Do android dream about electric sheeps de Philip K. Dick qui a été adapté sous le titre de Blade Runner. Superbe! Un récit intimiste et psychologique très loin de l'adaptation, un chef d'oeuvre.

Posté : mer. 20 août 2014 19:42
par Merwin Tonnel
J'en suis presque à la fin de la première partie de The Religion de Tim Willocks et je dois dire que je ne trouve pas ça passionnant. C'est très loin d'être mauvais, c'est même bien écrit (même si l'auteur s'emballe parfois un peu trop dans ses envolées lyriques), mais j'avoue que ça ne me captive pas. J'ai du mal à m'attacher aux personnages, Tannhauser est sympa mais pas non plus un monstre de charisme (et fait pour le moment un peu trop le baroudeur parfait). Bref, si ça se lit bien, je n'ai pas de difficulté à poser le livre quand je veux et je n'ai pas d'envie irrésistible de le rouvrir rapidement. Pour ceux qui ont lu le livre et ont en chanté les louanges, je perds mes vers ou j'arrête ? Le livre décolle vraiment une fois que l'état de siège est déclaré ?Pour l'instant je cherche par ailleurs encore le souffle épique, mais faut dire que l'instant des batailles n'est pas arrivé.

Posté : mer. 20 août 2014 20:16
par Littlefinger
C'est marrant, tu es le premier qui est mitigé dessus. Mon meilleur pote est en train de le dévorer.Pour ce qui est du souffle épique, c'est vraiment à partir de l'affrontement de Saint-Elme que ça envoie, à mon sens.Après c'est clair que si arrivé genre à ce passage de Saint-Elme, tu n'es toujours pas pris dedans, je pense pas que ce soit utile d'insister.

Posté : mer. 20 août 2014 20:26
par Saffron
Littlefinger a écrit :C'est marrant, tu es le premier qui est mitigé dessus.
Ce n'est pas le premier, mon message sur le sujet (#367) était assez tiède. Le côté historique du roman m'avait plu, mais j'ai été sacrément déçue par le côté très superficiel de la "quête" de Tannhauser et des raisons qui le poussent à partir pour Malte. Le siège est génial, mais pour le reste, question sentiments et triangles amoureux, ça m'a paru aussi profond qu'un teen-movie américain...

Posté : mer. 20 août 2014 20:27
par Littlefinger
Ah ouiaip, désolé Saffron, j'avais pas vu :D

Posté : mer. 20 août 2014 20:55
par Merwin Tonnel
Allez, on va essayer de pousser un peu et voir ce que ça donne quand ça commence à tabasser. Un peu peur des triangles amoureux par contre ; je les voyais venir dans la première partie mais j'espérais que ça n'allait pas se concrétiser par la suite.Et merci Saffron de ne pas me laisser tout seul :p

Posté : lun. 8 sept. 2014 21:56
par Duarcan
lu d'une traite le diable tout le temps de Donald Ray PollockUn roman noir glauque et puissant. Littlefinger l'avait bien encensé à la page 22 et je plussoie! Toutefois, j'ai pour ma part trouvé la fin un peu trop "juste", ou au moins irréaliste, par rapport à la noirceur du récit. Certes ça ne finit de loin pas sur une happy ending mais il y a quand même une certaine dimension morale dans la résolution qui m'a un peu gêné...

Posté : mer. 3 juin 2015 17:30
par Gillossen
J'en ai déjà touché deux mots ici, mais vraiment, si vous cherchez un beau livre sur la Mongolie qui dépasse le cadre de beau livre justement, je ne peux que vous conseiller Mongolie, la vallée du Grand Ciel, pour se rendre compte à quel point ce pays est menacé (notamment pour ses ressources minières). :/

Posté : mar. 1 sept. 2015 17:46
par Lucius
J'ai lu plusieurs bouquins récemment et plutôt du bon :Virgin Suicides de Jeffrey Eugenides : Je ne connaissais ni l'auteur, ni le film de Sofia Coppola et j'y allais sans a priori. Bien m'en a pris, j'ai adoré ce texte même si ce terme me paraît mal à propos : le texte alterne avec prouesse entre le glauque et le lumineux voire la grâce. Et c'est là qu'est la virtuosité de Eugenides qui parvient à créer une ambiance qui jongle sans cesse entre la pulsion de mort et la pulsion de vie avec une beauté pure en fil conducteur. L'histoire est annoncé dés le titre : les 5 sœurs Lisbon se suicident et tout l’intérêt du livre est de comprendre ce qui amène ce drame, je n'en dirai pas plus. La prose est évidente, chaque mot est à sa place et jamais il ne tombe dans la surenchère. Chapeau bas Mister Eugenides et rendez-vous pour Middlesex !Seconde lecture : le 3ème tome des aventures de Kenzie & Gennaro de Dennis Lehane, Sacré. Lire un Lehane c'est être à peu près sur de passer un excellent moment et de lire un bouquin de qualité. Ce tome-ci ne fait pas exception, il est très bon. Lehanne impressionne par sa constance. Son efficacité est toujours présente, l'intrigue toujours ficelée avec adresse et son écriture amène le supplément d'âme qui lui permet de se hisser à la hauteur des grands écrivains américains. C'est un auteur qui compte. L'histoire y est moins sombre que dans les deux premiers volumes, l'humour toujours acéré et les personnages dépeints au scalpel. Ce qui est fort chez Lehane c'est sa capacité à faire passer l'intrigue au second plan car ses personnages sont tellement incarnés, épais, que c'est leur destin qui nous importe. Vivement la suite, Gone, Baby Gone, je regarderai d'ailleurs l'adaptation après la lecture.Dernière lecture récente : Enfant 44 de Tom Rob Smith. Comme souvent, le cinéma est un moteur de lecture pour moi et la perspective d'adaptation de ce livre avec le casting prestigieux (Tom Hardy, Noomi Rapace, Gary Oldman, Cassel...) m'a donné envie de lire le bouquin. J'avais l'idée que c'était un thriller efficace, qui faisait le job et point barre. Et bien, ma lecture m'a fait changé d'avis, j'ai vraiment adoré Enfant 44 ! Pour le coup, l'intrigue est vraiment rondement menée avec un suspense constant qui interdit littéralement de lâcher le livre ! La plume est bonne, sans être transcendante mais d'une efficacité redoutable et pas dénuée de force d'évocation. L’intérêt de cette histoire tien également dans le lien avec la grande Histoire, le régime communiste de Staline y est fort bien dépeint et donne au récit une ambiance très marquée. Le sort des personnages nous passionne et on s'attache à leur vie autant qu'eux. Un excellent roman, une très bonne surprise !En ce moment, je me ballade plutôt hors des sentiers de la Fantasy et ça fait du bien : c'est toujours intéressant de sortir de sa zone de confort, on découvre une autre facette du plaisir de la lecture. Puis ça redonne envie de se relancer dans des grandes sagas épiques de la fantasy ! J'adore lire des choses très diversifiées et de tout genre, l'important pour moi c'est la qualité de la plume et de l'histoire !En ce moment, je lis Comme neige au soleil de William Boyd, je reviendrai surement vous en parler quand je l'aurai fini !

Posté : sam. 21 nov. 2015 20:05
par Lucius
C’est avec regret que je referme la dernière page de cet épais roman qu'est Les O'Brien de Peter Behrens. 600 belles pages durant lesquelles je ne me suis pas ennuyé une seule fois. J’ai suivi le destin des O’Brien avec beaucoup d’intérêt et un sentiment de nostalgie plane agréablement sur cette lecture.Les O’Brien est un roman écrit par le canadien Peter Behrens, auteur que je ne connaissais absolument pas. Né en 1954, il vit aujourd’hui aux Etats-Unis dans le Maine. Je l’avoue, c’est la couverture qui m’a attirée au premier abord. Et comme je suis amateur de grande fresque familiale, je me suis dit que c’était pour moi !Les O’Brien, c’est l’histoire sur quasiment un siècle de la famille O’Brien et plus particulièrement de Joe que l’on suivra de son enfance jusqu’à un âge avancé. Autour de lui graviteront les autres personnages du roman, son épouse Iseult, ses frères, ses enfants, ses petits-enfants.L’histoire commence au Canda où Joe et ses frères vivent modestement pour ne pas dire dans la misère. Elevé par une mère malade et un beau-père douteux, ils décideront rapidement de quitter le pays et de partir aux Etats-Unis. C’est Joe, entrepreneur à tous les sens du terme qui mènera la barque et créera une entreprise de construction de chemins de fer.Vous l’aurez compris, ce n’est pas le suspens qui est le moteur de cette lecture. L’histoire se déroule à un rythme plutôt lent, suivant le destin des personnages, s’attardant sur certains évènements anodins, d’autres en apparence plus cruciaux sont seulement évoqués. Peter Behrens est un écrivain qui déstabilise : son style n’est pas éblouissant au premier abord, il s’en dégage une fluidité remarquable et les pages s’enchainent sans aucune lassitude. Puis en y regardant de plus près au fur et à mesure que je m’immergeais dans le roman, je me suis aperçu à quel point Peter Behrens est un grand écrivain. Chaque mot, chaque phrase traduit une musique qui confère au récit cet aspect mélancolique que j’évoquais. Comme une rivière s’écoulant tranquillement, imperturbable, sans faire beaucoup de bruit mais créant une atmosphère si unique.En quelques mots, j’ai adoré l’écriture de Peter Behrens, magnifique, fluide, poétique, mélancolique.« Le dimanche par beau temps, ils embarquaient à bord d'une draisine le bébé, un panier à pique-nique, un appareil photo et ils filaient sur les rails fraîchement fixés sur les traverses. » Je suis un grand amateur de fresques familiales racontant sur plusieurs générations le destin d’individus en apparence communs mais qui marquent de leur empreinte la grande Histoire. J’ai été servi ! Les personnages sont réussis, crédibles et émouvants, Joe en premier lieu. Ses réussites, ses difficultés, ses échecs, les conflits amoureux et familiaux, Peter Behrens sait nous passionner à chaque page pour ses protagonistes. Il est rare d’avoir autant d’empathie pour les personnages d’un bouquin. Ici, je me sentais proche de chacun des membres de la famille, me sentant impliqué dans leur vie.Ce qui m’a également plu, c’est la façon dont l’auteur a construit son histoire. Il n’y a pas de recherche d’effet dramatique ni de volonté de faire de cette famille l’emblème d’une critique du rêve américain ou de la société industrielle du XXe siècle. Il y a beaucoup de modestie qui se dégage de ce livre. L’ambition est là mais elle n’est pas démesurée, les personnages existent pour ce qu’ils sont. Finalement c’est une histoire simple mais c’est ce qui lui donne son infinie humanité.Ce texte m’a beaucoup touché, j’y ai pris un plaisir immense et les O’Brien m’habitent encore aujourd’hui, plusieurs jours après en avoir achevé la lecture. N’est-ce pas la marque des grands romans ?Par ailleurs, si vous connaissez de très bons romans, fresques, familial(e)s, je suis preneur !

Posté : dim. 29 nov. 2015 16:07
par Cersei
Ex-Vita tome 1 de Shinya Komi. En 2050, le monde a changé avec la découverte de la pierre anti-gravité. Depuis, on a construit des androïdes à l’apparence et à la conscience humaine mais dont la durée de vie est limitée à 4 ans. Minami, policière et tête brulée, va profiter d’Alma sa co-équipière androïde pour se lancer dans des enquêtes excitantes. Mais elle découvre finalement une criminalité inattendue.C'est un manga sans prétention qui fonctionne dès le départ. On est dans du Ghost in the Shell ou du Police D version manga. Le personnage principal est sympathique, elle est amusante, passe d'un état d'émotion à l'autre en un claquement de doigts. Elle est charismatique, elle est sexy, amusante et forme un duo avec un cyborg antipathique aux premiers abords, mais auprès du quel on s'attache très vite. Les personnages fonctionnent bien et à de nombreuses reprises le duo qu'ils forment est si harmonieux que c'est le top. Je pense par exemple au passage dans l’hôtel après le harcèlement et la publication des photos sur internet. Le mangaka alterne les thématiques, utilisant des thématiques très actuelles comme celle du harcèlement, mais aussi des thématiques plus futuristes avec la place des cyborgs dans la société de l'époque. L'épisode sur les cyborgs sexuels est vraiment intéressant car réellement bouleversant. On pense au deuxième film Gits et notamment la réplique suivante "How could it be, if a robot has no soulI can't imagineBut.. But..I never wanted to be a robot." ou bien la citation suivante "Nous pleurons sur un oiseau qui meurt, mais pas sur le sang d'un poisson découpé." de Saito. Toute la partie sur l'innocence, sur cette sexualité cybernétique est assez particulier et dans le récit c'est profondément triste. Le mangaka ne tombe pas dans la caricature et le parodique, bien au contraire, il utilise très bien son univers et nous le présente progressivement. La troisième histoire de l'ouvrage distille un peu plus le fil rouge que l'on entraperçoit dans les autres épisodes avec un groupe externe dont on ne sait pas grand chose, mais que l'on peut associer à des terroristes selon moi. Le cyborg ennemi est bien mystérieux en tout cas, ainsi que la forme de vie que l'on voit dans le troisième épisode. Le mangaka propose des récits qui avancent très vite et jamais ennuyeux. Il y a de l'action également, à plusieurs reprises on a l'impression d'avoir une explosion en live en lisant l'oeuvre. Sincèrement c'est réel par moment tellement les dessins sont très beaux. J'aime beaucoup les visages des personnages on a envie de les bisouiller tellement elles sont si vivantes. L'univers en question est classique, mais il nous en donne assez pour s'intéresser à la suite de son univers. Il y a des personnages forts, un vrai sens de la mise en scène, des thématiques importantes et pour le moment très bien exploités et un scénario comme des dessins impeccables, on a donc envie de lire la suite.Charisma tome 1 de Taisei Nishizaki et Tsutomu Yashoji.Tout commence lorsque la grand-mère d’Okazaki tombe gravement malade. Sa mère désemparée, tombe dans les filets d’une secte. Rapidement les choses dégénèrent. Douce par nature, elle devient violente et autoritaire à outrance, frappant régulièrement son fils, et même son mari. Ouverte sur le monde, elle devient intolérante, et en particuliers sur les choses de la religion : son nouveau « maître spirituel » lui enseigne que tous ceux qui ne sont pas avec eux sont contre eux. Pire encore, ils ne sont que des créatures du « Démon » ! Le roman d'origine est excellent et vraiment perturbant, très glauque et le manga l'est tout autant. On entre progressivement dans l'univers du manga, qui se démarque quand même du manga, notamment sur le découpage ce qui est évident, mais il conserve les forces du manga et notamment toute la partie sur l'endoctrinement progressif des gens dans la secte. C'est vraiment horrible à observer, sincèrement même si ce sont des personnages secondaires, on a l'impression de voir des personnages réels, notamment en ce qui concerne la mère et le gourou. On peut comprendre la peur des personnages principaux, celles de perdre des gens qu'ils aiment. Toute la partie concernant l'endoctrinement est réaliste à un point que c'est troublant, quand on voit la secte du récit, on pense notamment aux sectes Aum ou Nikken par exemple. Il existe de nombreuses sectes aujourd'hui au Japon et même au début des années 80. Les personnages du récit vivent dans un microcosme assez particulier, ils souffrent et font confiance à un monstre. On ne sait rien du premier, on ne peut que constater les dégâts, pour le second par contre on ne peut que comprendre en quelque sorte ce qu'il est. Je ne vais pas vous spoiler, mais quand on découvre l'identité du gourou, on est partagé, il y a de a surprise, du dégout et à plusieurs reprises on se demande quel fut cette évolution, comment le personnage pouvait faire un tel choix après le passé que l'on voit. La partie avec la mère est réellement glauque et triste, le soir de la rupture est horrible et cauchemardesque, on ne sait jamais réellement si c'est vrai. Le mangaka ne nous épargne strictement rien, que ce soit le glauque du récit, la nudité malsaine et à plusieurs reprises on n'arrive pas à comprendre comment les gens se font berner aussi facilement. Le mangaka propose un réel documentaire, sans nous épargner un seul moment. Il introduit des personnages secondaires pour un prochain tome et notamment un groupe cherchant à aider les gens dans les sectes. Bref c'est très bien écrit, très bien dessiné et propose un sujet assez rare sur ce support pour que vous vous y intéressiez. Bref c'est un coup de coeur.

Posté : lun. 30 nov. 2015 21:14
par John Doe
Ex-vita il me semble qu'une suite est en cours au Japon, Ex-arm.Dans l'intimité de Marie est assez intrigant, je suis curieux de voir comment cela va évoluer. Sur un sujet délicat, l'auteur s'en sort pour le moment très bien.