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par Sylvaner
Elbakinien d'Argent
Je viens de finir la Maison de Poupée, que je n'avais pas lu entièrement avant cette parution...et je réalise deux choses.D'abord, si Gaiman cesse dans ce tome les références à l'univers DC, il entame une longue série d'auto-références à l'univers de Sandman : personne n'est là par hasard, et chaque mortel qui se retrouve mêlé aux pérégrinations des Eternels est en relation avec un ou deux autres personnages, rencontrés auparavant ... ou plus tard. Ainsi, dans ce deuxième volume on trouve des références à Mad Hettie, à John Constantine (ou plutôt à sa famille), aux victimes de Dee dans la cafétéria ... et surtout on annonce les personnages d'un prochain volume, mon préféré jusqu'à maintenant (quant à savoir si c'est le 3 ou le 5 ... je ne sais plus).La deuxième chose, c'est l'ampleur et l'aspect ambitieux de l'oeuvre (pas spécialement la maison de poupée, mais l'ensemble des travaux sur les Eternels) : je tendrai à rapprocher le travail de Gaiman non pas à l'oeuvre de Tolkien mais à ce qu'en dit David Day, dans je ne sais plus quel bouquin : une tentative de mythopoïèse, c'est-à-dire de création de toutes pièces et rétrospective d'une mythologie et d'une cosmologie... a ceci près que si Tolkien d'après Day créait des mythes fondateurs pour la civilisation anglo-saxone, Gaiman affiche une vocation d'universalité.Et pourtant, son plus grand tour de force est peut-être de ne jamais tomber dans la grandiloquence ou dans les arguties de l'historien du mythe, du genre "Or donc il advint que ..." : peut-être à cause du médium "comics", tout cela reste à l'échelle des personnages et du lecteur, comme une série de tranches de vies qui se découpent. N'oublions pas qu'au départ, tout cela a été publié sous la forme de "petits mickeys", de comics souples d'une trentaine de pages maximum.Reste encore et toujours le dessin ... si le côté "brouillon" est un parti pris sans doute à la fois des dessinateurs et de Gaiman (peut-être qu'il ne voulait pas "figer", enfermer son mythe dans les cases d'un dessin trop propre), la mise en couleur déplorable reflète par contre la pauvreté des éditions de l'époque ... même si on est quand même un cran au dessus de ma vielle édition française chez "Le Téméraire".En tout cas, le principal point négatif des dessins de Sandman est à mon sens le risque de rebuter certains lecteurs potentiels ... parce que c'est le genre d'oeuvre qu'on voudrait que tout le monde autour de soi ait lu, pour pouvoir le citer dans les conversations en se faisant comprendre ... comme un classique.