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En tous cas, vous avez droit à une citation aujourd'hui, si ce n'est pas exclusif, ça ! ;) Par contre, elle ne vous éclairera pas plus, c'est tout aussi sûr ! ;)

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" Se rendre à la Monastrie, bien que cela fusse un honneur, était rarement considéré avec sérénité par les personnes convoquées, et encore moins leurs serviteurs. Savoir que même leurs maîtres, pourtant souvent de si influentes personnes, craignaient ces visites dans l’enceinte du domaine de l’Empereur… Il est vrai que pour atteindre l’imposante demeure d’obsidienne, il fallait quitter la Shalkedror chatoyante et parfumée, pour pénétrer dans les derniers lacets menant au sommet du volcan lui-même, dans la noirceur des vapeurs de souffre, aux échappements point toujours aisés à juguler. Longer ensuite les remparts extérieurs si lisses mais si obscures de cette flèche ténébreuse, attendre devant ses portes béantes, puis pénétrer dans une cour intérieure gigantesque et tout aussi lugubre en apparence, pour quiconque n’aurait prêté attention aux myriades d’ornementations qui se répandaient sur les murs, les piliers, les dalles… Et partout, le vide. Pas de jardins, pas de fontaines… Il n’y avait aucun garde, pas le moindre domestique ou intendant… Personne ne semblait vivre dans la Monastrie. Dame Padhira se riait de ses peurs et malices de tout ordre, tandis qu’elle approchait de la demeure impériale, bien installée dans sa chaise à porteurs. Les gens qu’elle avait à son service étaient choisis entre autres pour partager ce trait de caractère avec elle, mais la jeune femme voyait bien à travers les voiles de soie lavande qui la protégeaient aussi bien de la poussière que d’un regard inopportun qu’ils n’étaient pas aussi rassurés qu’ils auraient dû l’être. Cela se confirma lorsqu’elle posa pied à terre et leur intima d’attendre son retour. Leur acquiescement et leur inclinaison du buste furent exécutés sans erreur ou hésitation, mais la tension était palpable. On n’entrait pas chez l’Empereur avec l’esprit clair et sans inquiétude… Ce n’était pas seulement une question de Shasma, comme aurait dit les oracles. La jeune noble, et elle seule ne pouvait être dupe se disait-elle, savait bien que les émanations du volcan, sans jamais être mortelles ou sources de maladie, avaient de quoi influer sur vous. L’Empereur avait décidément bien des ressources pour déstabiliser ses interlocuteurs avant même de les avoir reçus se répétait-elle encore une fois, comme elle l’avait si souvent fait, en arpentant seul et d’un pas vif les couloirs immenses et déserts de la Monastrie. Au loin, un foyer rougeoyant était visible, selon l’angle du passage que l’on traversait présentement, il apparaissait et disparaissait comme par magie. Mais toujours, il demeurait en point de mire. Cela n’avait rien à voir avec de la magie pourtant, car la magie n’existait pas, cela, tout le monde le savait. La salle du trône, là où les forces du volcan avaient toutes été canalisées lors de travaux titanesques. C’était de là que provenaient ses lueurs plus intenses encore que les feux d’une forge. Dame Padhira savait déjà ce qu’elle allait voir, ce qui impressionnait tant les premiers convoqués, et tous les autres encore. Il fallait avoir une maîtrise certaine de soi dans l’enceinte de la Monastrie, et plus encore dans la salle du trône. Car, s’avancer sur quelques marches, puis s’incliner à genoux devant l’Empereur, qui vous surplombait de toute la hauteur de son trône, à quelques pieds de vous, et pourtant, dans le vide. Au-dessous d’un bassin de lave bouillonnante qu’on ne pouvait qu’avoir à la vue en baissant la tête. Car telle était la salle du trône. Un immense dôme d’onyx dont les parois étaient parcourues de courants de lave qui circulait sous une si fine pellicule de cristal, que l’on se demandait à tout instant si elle n’allait pas céder. Ces cercles de feu se rétrécissaient jusqu’au sommet, pour toutes se rejoindre au-dessus de l’imposant trône de l’Empereur, suspendu dans les airs si ce n’était par l’éperon rocheux qui l’amenait au-dessus de cette mare de magma. De l’endroit où devait se tenir celui ou celle qu’il recevait, il était ardu de voir comment pouvait faire l’Empereur pour rejoindre ou quitter son trône. La légende disait qu’il ne quittait jamais cette salle, plongé dans les abîmes de ses pensées, tout entières tournées vers la croissance toujours plus grande de l’Empire de la Lune d’Or, par-delà les océans… La légende racontait qu’il vivait depuis plus de quatre cents ans. Mais cela, n’était point fable… "

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Bien le merci et comme on dit "tout vient à point à qui sait attendre ." Voila un bel appreçu qui ne nous dit rien de l'histoire ,mais qui nous plonge dans une certaine ambiance bien plaisante ..:eek: A quand le prochain .?????:lol: ;)

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Peur ? Ah, par rapport au fait que le lieu soit sinistre... :)
" Dame Padhira s’inclina devant l’Empereur, sa robe cascadant de plis de moire autour d’elle, encore rehaussés par les reflets des flammes… Les yeux toujours baissés, elle l’écouta prononcer ses premiers mots, après avoir passé plus de bien d’un sablier à l’observer. Elle n’avait pas encore bougé d’un pouce, malgré l’inconfort de sa position ou la chaleur. L’Empereur en personne savait que ce n’était pas ainsi qu’elle se laisserait affaiblir. Si tant était que c’était cela qu’il prévoyait. Il était impossible de deviner les intentions de l’Empereur, cela, la jeune noble s’en était aperçue bien vite… « Le jeune général Okûn vient de revenir des terres barbares…, commença-t-il d’une voix aux accents indolents, mais qui ne trahissaient aucunement un manque de concentration. Il a remporté un brillant succès ! Dommage qu’il ait refusé la reconnaissance de la foule. Moi-même, j’aurais pris plaisir à le voir honoré de la sorte, à travers les rues de la cité, remontant jusqu’à la Monastrie, tel un grand vainqueur… » Dame Padhira se tendit. Se pouvait-il qu’il ait si vite… Il percevait tout le poids de son regard tranchant, comme encore accentué par la distance les séparant, prenant encore plus de consistance. « J’aurais aimé avoir votre avis à ce sujet, reprit-il en constatant que la jeune noble ne répondait pas. Vous savez que… je vous tiens en grande estime… Il est tellement triste qu’on ne vous voit pas plus à la cour… Quelqu’un de votre rang… L’héritière de la famille qui pendant quarante générations régna sur Shalkedror avant moi… » déclama-t-il lentement, ses longues mains effilées se reposant sereinement sur les accoudoirs sculptés en gueule de griffon, avançant un peu plus à chaque mot avant de les empoigner presque placidement. Dame Padhira savait désormais compris ce qu’il voulait faire, se surprit-elle à réprimer un sourire. Ce qui n’allait qu’en s’accentuant en l’écoutant poursuivre son discours. "