Posté : ven. 1 avr. 2011 10:41
(promis, quand j'ai le temps je refait un pavé similaire sur les points fots du bouquin
)

Est ce que je peux en conclure que le Trône de Fer te produit cet effet ? Et bien pas à moi. Les intrigues politiques complexes et alambiquées du monde de Martin sont effectivement un très bon reflet de notre réalité. Mais de mon point de vue cela ne m'apprend pas grand chose que je ne sache déjà sur la noirceur de l'âme humaine. Si toi, et beaucoup d'autresMais il est vrai que j'ai par ailleurs un goût pour les livres avec des personnages et des mondes complexes et ambivalents, qui utilisent les mondes imaginaires pour nous faire un peu réfléchir sur l'homme, ou sur notre monde.
on est bien d'accord qu'elle n'est valable que pour ceux qui ont les mêmes attentes que toi ? :)Parce que je me trompe peut-être mais on dirait que tu établis une échelle de valeur, que selon toi Kushiel n'est pas à la hauteur de cette "catégorie" et que du coupKushiel n'appartient clairement pas à cette catégorie
C'est Carey qui a raté quelque chose ?et, oui, je le regrette un peu parce que je pense qu'il y avait matière. Parfois, Carey effleure un sujet qui aurait pu être riche et totalement passionnant
Parce que c'est aussi le but du TdF de mon point de vue avec utilisation de ressorts dramatiques plus "spectaculaires". C'est très réussi et très différent, mais je ne conclus pas "c'est très ambitieux et Carey non"Alors il y a peut-être des problèmatiques plus ... personnelles qui ne te parlent pas dans Kushiel.Je crois fermement que l'amélioration de l'humanité passe d'abord par l'amélioration de ce que nous sommes chacun individuellement donc pour moi il y a des ces bouquins des choses qui me parlent plus que savoir qui monte sur le Trône de Fer après huit tomes. Mais c'est effectivement d'une portée plus individuelle. Il y a peut-être aussi dans ma façon de voir ces livres et cet univers la connaissance que j'ai du fandom américain et là je peux dire que l'univers de Carey parle à bien des gens de la nature humaine, des attentes, des peurs, des frustrations, de liberté, de non-conformisme, du jugement permanent que l'on subit, de la pression de groupe ....Cela dit nous n'étions déjà pas d'accord sur la question de "l'ambition", ça se confirmeKushiel reste pour moi un livre dont le seul but est de distraire
Oui, tout à fait. Mais je précise tout de même les choses, histoire d’être sure que je me fais bien comprendre : je commente la portée du bouquin, mais pas sa qualité. Je peux te citer des dizaines d’œuvres qui sont à la base des divertissements sans prétention et qui se révèlent être au final de petits bijoux.« Witch » a écrit :j'ai le sentiment que tu pars de ce constat pour établir une conclusion sur la "portée" des bouquins.
Euuuh stop stoooop ? Est-ce que j’ai essayé de faire du prosélytisme, de persuader quiconque de la supériorité de tel livre par rapport à un autre ? J’aime énormément le trône de fer, je l’admets volontiers, mais je ne suis pas non plus une fanatique aveugle qui veut persuader tout le monde que c’est le meilleur roman du monde, et je lui reconnais volontiers des défauts.Non, j’ai juste dit que le « trône de fer » était objectivement plus ambitieux que Kushiel, notamment au niveau des intrigues politiques. C’était une réaction au fait que j’ai vu écrit à plusieurs reprises qu’il y avait dans Kushiel des intrigues politiques complexes comme dans le trône de fer – et là, non, désolée, Kushiel a des tas de qualités, mais pas celle-là. Je développerai plus loin (pavé partie 2 : le retour du moellon)« Witch » a écrit :Si toi, et beaucoup d'autres , partagent ce gout et cette envie de complexité d'intrigues, est-il possible d'admettre que tout le monde n'est pas dans la même attente ?
Alors, déjà, non, il n’y a pas d’échelle de valeur. cf. le début de mon post sur la portée des œuvres.Ensuite, ce que j’essayais d’exprimer, manifestement maladroitement, c’est un regret, qui m’est personnel, qui est que dans Kushiel il y a plein de pistes que JE (oui, je) juge intéressantes et potentiellement riches, et qui ne sont pas exploitées. On a un peu l’impression qu’elle voudrait par moment donner plus de profondeur et de portée à son œuvre, mais qu’elle ne va pas au bout de son intention originelle. Ainsi, Imriel : un héros censément traumatisé par son enfance, son « sang Sharizai », l’identité de sa mère et le regard que les gens de la cours porte sur lui… on ne le ressent jamais vraiment à la lecture, et ce malgré 15 explications de texte à la moitié des personnes qu’il croise sur l’origine de sa marque au fer rouge.Mais, parfois, Carey réussit complètement : les sentiments complexes du même Imriel et sa culpabilité vis-à-vis de Dolerei sont tangibles et crédibles. C’est ce qui fait à mes yeux que le meilleur tome de Kushiel est le 5ème, d’ailleurs.C’est à la fois la qualité et le défaut de ce second cycle, d’ailleurs. En prenant un narrateur à la personnalité plus complexe que dans le premier, Carey s’est mis la barre plus haut, mais n’a pas toujours été à la hauteur de l’ambition originelle. Du coup, le premier cycle conserve pour moi l’ « atout fraîcheur » du roman sans prétention mais qui se dévore, par rapport au second cycle pris dans son ensemble.« Witch » a écrit :Ta phrase suivante : « Kushiel n'appartient clairement pas à cette catégorie »on est bien d'accord qu'elle n'est valable que pour ceux qui ont les mêmes attentes que toi ? Parce que je me trompe peut-être mais on dirait que tu établis une échelle de valeur, que selon toi Kushiel n'est pas à la hauteur de cette "catégorie" et que du coup
Je ne suis pas sure de bien comprendre ce que tu entends par là… si c’est sous-entendre que « chacun ses goûts, chacun son avis, on ne peut pas juger des qualités intrinsèques d’une œuvre », alors je ne suis violemment pas d’accord.C'est un peu à chacun de faire son chemin avec ce que propose l'auteur non ?
Je suis d’accord pour dire qu’une fois qu’on a lu les 6 tomes, on ressent mieux la « part d’elle-même » que Carey a mis dans ses livres, notamment une certaine idée d’une société humaine idéale qui me parle également beaucoup. Mais, encore une fois, je n'essaie pas de te persuader que tu as tort de préférer Kushiel au trône de fer !Globalement, un livre dont j’ai envie de discuter est déjà à la base un livre que j’ai jugé intéressant. Il n’y a rien de pire que l’indifférence.Je crois fermement que l'amélioration de l'humanité passe d'abord par l'amélioration de ce que nous sommes chacun individuellement donc pour moi il y a des ces bouquins des choses qui me parlent plus que savoir qui monte sur le Trône de Fer après huit tomes. Mais c'est effectivement d'une portée plus individuelle.
Alors alors… revenons sur l'ambition et les "catégories". Je vais pas mal m'écarter du sujet, hein, mais c'est pour essayer de me faire comprendre.Premièrement, je ne cherche pas à mettre les romans dans des cases fermées. Mais on ne peut tout de même pas tous les mettre au même niveau, à moins de tomber dans la démagogie. Non, je ne crois pas que "Twilight" soit du même niveau ni ait la même ambition qu'"à la recherche du temps perdu". Pourtant, les deux sont des romans, et, si le premier est beaucoup plus populaire auprès des masses liseuses que Proust, la qualité et la richesse intrinsèque de ce dernier me semble indiscutable (celle de la prose de Meyer beaucoup plus).Alors, bien sur, l'échelle de Meyer à Proust n'est pas linéaire et il y a une grande par de subjectivité à juger les qualités intrinsèques d'un livre. Mais pas que. Il y a une part objective, et c’est de celle là dont j’essaie maladroitement de parler : la partie « technique »L'ambition, donc, le mot est lâché. ça fait plusieurs fois que tu sembles insister pour que je développe une comparaison entre Kushiel et le trône de fer. J’étais un peu réticente pour la faire, car je crains qu’il n’en ressorte l’impression que je déprécie Kushiel (car oui, je trouve qu’objectivement le trône de fer est bien plus abouti et plus ambitieux dans sa forme), alors que j’ai par ailleurs adoré ces romans (mon ressenti subjectif, ma « note du cœur » en quelque sorte, est élevé – mais ce n’est pas de ça dont il est question ici).Comparons donc Kushiel au « trône de fer » du point de vue de l’ambition de l’écrivain. Je te propose de comparer notamment le traitement des personnages, les intrigues politiques, la structure du roman, l’originalité, et les mondes dépeints.« Witch » a écrit :Cela dit nous n'étions déjà pas d'accord sur la question de "l'ambition", ça se confirme
je réponds juste là dessus (time, tout çaAltaïr a écrit :Je ne suis pas sure de bien comprendre ce que tu entends par là… si c’est sous-entendre que « chacun ses goûts, chacun son avis, on ne peut pas juger des qualités intrinsèques d’une œuvre », alors je ne suis violemment pas d’accord.Witch a écrit :C'est un peu à chacun de faire son chemin avec ce que propose l'auteur non ?
Prends n'importe quel roman de bit-lit, n'importe quel shi=ojo manga, ou n'importe quel roman de collection Harlequin et tu auras une chance sur deux de tomber sur un roman à la première personne (Twilight, pour ne citer que le plus évident). Bon, je n'ai pas non plus une grande expérience de ce genre de littérature, mais le peu que j'ai pu en voir ou en feuilleter, c'était le cas. ça a l'air d'être un procédé très répandu en littérature féminine;led a écrit :Je ne suis pas sur que ce soit si commun d'écrire à la première personne mais passons.
Peux-tu développer stp ? ça m'intéresse... je ne vois pas en quoi ce que j'ai écrit est faux. Incomplet, certes, mais je ne faisais pas non plus un portrait de Phèdre, je parlais du processus d'identification, qui vaut je pense essentiellement pour les lectrices, il est difficile de s'identifier à un personnage de sexe opposé - en tous cas je ne me suis jamais identifiée à Imriel -led a écrit :Ta vision de phèdre est très réductrice à mes yeux, je sais que tu accentues le fait mais franchement c'est limite là...
Raaaah mais, moi je ne voulais pas comparer TdF et Kushiel, effectivement ce sont deux œuvres très différentes ! *mange son chapeau*Bon, je refais un résumé des épisodes précédents : j'ai lu, à plusieurs reprises, des comparaisons entre Kushiel et le TdF comme étant tous les deux des romans axés sur les intrigues de pouvoir. J'ai indiqué dans le sujet sur Kushiel que pour moi, clairement, ils n'étaient pas comparables, et que de ce point du vue le TdF était beaucoup plus ambitieux. Là-dessus, ça a piqué Witch au vif, et je me suis plus ou moins sentie obligée d'expliquer ce que j'entendais par là.J'avoue que ton message m'attriste un peu : à te lire j'ai encore l'impression que tu crois que je cherche à prouver la supériorité du trône de fer, alors que non, non et non ! Par ailleurs, j'apprécie généralement beaucoup tes interventions et je me reconnais souvent dans tes commentaires, donc quelque part j'ai dû louper une marche, je ne sais pas, manifestement tu as compris à peu près le contraire de ce que je voulais exprimer. J'ai vraiment besoin de vacances.Je réessaye avec un exemple concret : quand Goscinny ou Franquin faisaient de la BD pour la jeunesse dans les années 60, ils n'avaient certainement pas d'autre ambition que de faire bien leur travail, ils n'aspiraient certainement pas au chef d’œuvre, surtout que la BD était considérée à l'époque comme un art franchement mineur. Ils sont pourtant considérés maintenant comme des génies, à mon avis avec raison, et 50 ans plus tard ils sont toujours lus.A contrario, tu as des centaines d'intellectuels ambitieux qui se prennent pour les rois du monde (prenons BHL par exemple), et qui pondent des pensums prétentieux qui seront très vite oubliés.Bref, l'ambition ne fait pas la qualité et réciproquement.Voilà, c'est tout ce que je voulais dire : Martin aspire pour moi à une plus "noble littérature" que la fantasy "de base" (surtout à l'époque ou le tome 1 est sorti - Erikson est un hériter de Martin, pas un précurseur) et à une structure de récit très complexe, et donc par essence ambitieuse. Notamment du point de vue des intrigues politiques. Alors que dans Kushiel, les intrigues politiques sont simplifiées à l'extrême. L'intérêt des romans est ailleurs.Quant à la comparaison avec le cycle de Malazan, je la ferai avec plaisir quand je l'aurai lue, les deux premiers tomes sont sur ma pile de lecture, et ça correspond a priori à tout ce que j'adore. Encore une fois je ne porte pas le TdF au pinacle ! C'est juste un cycle que j'ai beaucoup aimé, et auquel je suis attachée de part les circonstances dans lesquelles je l'ai lu (non je ne vous raconterai pas ma vie).led a écrit :Ensuite, je veux bien tout comparer et effectivement, tu le fais mais si je devrai comparer tdf et donc g.r martin, je le comparerai à Erikson et son cycle malazéen et là, je ne suis pas sur (ironie inside) que tes arguments seraient en faveur de Martin...un petit joueur:p.Je respecte ton avis même si je le partage pas du tout car pour moi, Kushiel etTdf n'ont rien à avoir, ne sont pas la même fantaisie, autant comparer Tdf et la trilogie des joyaux noirs de anne Bishop ...Enfin pour résumer, je reste dubitatif et pantois face à tes arguments et sur l'ambition ( car pas la bonne comparaison à mes yeux).
Je m'incruste dans le débat très rapidement (bien que je n'ai rien lu d'Imriel pour l'instant), juste pour faire une petite remarque. C'est clair qu'entre Kushiel et le TdF, le traitement des persos est pas le même. Mais l'identification du lecteur se fait juste de manière différente (enfin peut-être surtout pour une fille).Dans Kushiel, je rêvais un peu, et surtout, de ressembler à Phèdre, qui est quand même l'héroine pleine de qualités, et qu'on suit en permanence.Dans le TDF, je me suis, perso, identifiée à personne en particulier, et à tout le monde en général. Le fait que les personnages soient plus gris, les rend peut-être plus réalistes, et je suis sure qu'en regardant bien, on retrouve des traits de caractère qui nous correspondent chez pas mal de personnages, par exemple le côté un peu naïf de Sansa, le franc-parler d'Arya, le côté surprotecteur de Cat, etc...Du coup, pour moi il n'y aurait pas vraiment d'avantage entre Kushiel et le TdF, simplement une approche très différente et une manière différente d'accrocher aux personnages.Voilà, sur ce je vous embête plus !Altaïr a écrit :Au niveau de l’ambition, nous avons donc d’un côté Kushiel avec quelques personnages principaux, peu nombreux, à la personnalité assez simple (mais néanmoins bien rendue) et des personnages secondaires voire tiertiaires très stéréotypés… en face, le trône de fer, des dizaines (centaines ?) de personnages complexes et tous différents, des centaines des pages de Wiki qui racontent leur parcours, des milliers de pages de forums qui commentent leurs personnalités… --- avantage au trône de fer---
Pour le coup, Erikson est plutôt un héritier de Cook (Glen, pas Thomas)(surtout à l'époque ou le tome 1 est sorti - Erikson est un hériter de Martin, pas un précurseur)