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Bonjour à tous, j'ouvre ce sujet (en espérant qu'il n'existe pas déjà) pour partager et échanger autour d'une petite réflexion avec vous. Depuis un petit moment en effet, je m'interroge sur l'évolution de la "mode" en matière de fantasy (qu'elle soit épique ou non). Il semblerait que ce qui plaise particulièrement actuellement, c'est surtout que le récit ne soit pas prévisible, qu'il surprenne le lecteur (voire le spectateur dans le cas d'un film ou d'une série).J'ai en effet cru constater sur ce forum et en dehors de celui-ci que la prévisibilité d'une histoire était de plus en plus souvent perçue comme un gros défaut, de même que les descriptions qui prennent leur temps, qui semblent moins plaire qu'il y a 10 ou 20 ans.Personnellement, la prévisibilité et les histoires qui prennent leur temps ne me dérangent pas, du moment que l'ambiance du récit me plaît et que je m'y retrouve dans l'intrigue. Quant aux récits "à surprises", je les trouve intéressants, mais j'ai toujours un pincement au coeur en me disant une fois terminés qu'ils n'ont aucun potentiel de relecture (et donc que je leur dis définitivement adieu une fois la dernière page tournée).Et vous, que pensez-vous de cette réflexion? Constatez-vous le même phénomène, pour vous ou autour de vous? Et quelle est votre sensibilité par rapport aux récits "à surprise" et à ceux plus descriptifs, et parfois prévisibles?

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Je ne pense pas qu'il y ait une corrélation à faire entre les descriptions et le côté prévisible ;) Ce sont deux choses très différentes.Pour ma part, si je devine toute l'histoire à l'avance, je ne vois tout simplement pas l'intérêt de finir le livre, vu que j'en connais l'histoire. Là où une histoire est appréciable, c'est quand elle sait jouer avec cet aspect là, où les retournements de situation ne sont pas la suite bateau et logique de l'histoire sans cesse répétée.Et une fois la surprise éventée, il est d'autant plus savoureux de relire pour trouver les indices semés là par l'auteur :D

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Je crois que j'aime les deux sortes ! En fait, c'est sûr qu'un roman pleins de retournements de situations, de suspens, de surprises c'est vraiment bien. On a l'impression d'être dans l'histoire et de partager la surprise des personnages. Car, je pense que, dans un roman un peu plus prévisible, lorsqu'un personnage est étonné ou horrifié par le tournant de la situation et que pourtant on avait vu venir ça des chapitres à l'avance, ça peut décevoir. A ce moment-là, est-ce que la réaction du personnage est juste ? Est-ce qu'il n'aurait pas vu venir ça lui aussi et que finalement la surprise a moins bien été amenée ? Je pense que dans les romans prévisibles, ce qui peut gêner, c'est l'impression qu'on a après sur l'auteur. On se demande s'il n'a pas un peu raté son coup ! :/Mais après, moi, ce que je trouve bien dans les romans un peu plus prévisible c'est une non-prise de tête. On lit ça comme ça vient ! Par contre, je pense que si l'histoire peut être devinée depuis le début, il faut alors que le roman soit équilibré de sorte que les personnages soient très attachants ou intéressants. Je ne sais pas si je suis claire, mais en gros une histoire prévisible n'est pas grave tant qu'il y a une "accroche" autre part ! Un auteur peut miser sur une histoire plus simple et développer son monde ou ses personnages. Cela marche aussi pour les romans "à surprise", l'auteur peut choisir de tout donner sur son histoire et moins creusés ses personnages (bon après il y a les exceptions genre Trône de fer, où tout est "riche" :P). Donc personnellement je pense que histoire prévisible ou pas, ce n'est pas ça qui va vraiment me déranger dans un roman si c'est compensé par de bons personnages ou un univers bien recherché ! :)
« Le Seigneur Ogion est un grand mage. Il te fait beaucoup d’honneur en te formant. Mais demande-toi, mon enfant, si tout ce qu’il t’a enseigné ne se résume pas finalement à écouter ton cœur. » - Tehanu, Ursula K Le Guin

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Personnellement, j'ai du mal avec les récits trop prévisibles. Je n'ai pas besoin ou envie d'avoir une méga surprise à chaque fin de page, loin de là, mais quand au bout de trois pages, tu devines ce qu'il va se passer durant les 300 prochaines, les réactions des personnages, les magouillages du méchant, les trucs top secrets qui vont à coup sûr plonger le monde dans le chaos et les ténèbres... Ben... l'intérêt de la lecture diminue, le besoin compulsif de tourner la page pour savoir ce qu'il se passe ensuite aussi. C'est plus difficile de se laisser porter et d'entrer dans l'histoire quand on voit les ficelles grosses comme des poutrelles. Après, ça dépend du livre. Il y a certains romans dont on se doute de beaucoup de choses, mais c'est compensé par des éléments très forts qui te le font oublier ou « pardonner » et on se laisse porter quand même. C'est plus difficile mais ça arrive. Et puis il y des degrés de prévisibilité plus ou moins gênants. Et comme Nariel, je vois pas trop la relation entre les descriptions et le manque de suspens. Ce sont deux choses différentes. Un livre peut être lent et très descriptif et pourtant comporter son lot de surprises et de retournements de situation, comme un récit au rythme effréné peut être prévisible de bout en bout. Relire un livre à « surprises » ne m'a jamais gênée, sauf si le seul intérêt du livre se cache dans cette surprise, justement (genre le méga-twist final mais que tout reste est affreusement banal). :)

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J'ai remarqué ce même phénomène, de nombreuses personnes jugent un livre sur ce seul critère. Personnellement, dans un livre de fantasy la prévisibilité ou non de l'histoire m'importe peu car ce n'est pas ce que je recherche avant tout, je préfère un univers bien construit et bien développé par exemple. (D'ailleurs concernant les descriptions qui prennent leur temps je pense qu'elles sont moins appréciées qu'à l'époque car vivant dans un monde où tout va vite les gens jugent qu'il ne s'agit que d'un détail qui pourrait être raccourci voire supprimé). Quelques surprises au cours d'un roman sont les bienvenues mais je pense que l'auteur ne doit pas se focaliser que sur ça, ce n'est pas un point primordial en fantasy. En revanche dans d'autre genre comme le polar ou les nouvelles à chutes l'imprévisibilité est un point beaucoup plus important à ne pas négliger mais je ne suis pas d'accord avec ce que tu as dit concernant le potentiel de relecture. On peut le relire mais pas de la même manière c'est à dire pas en attendant la fin avec impatience mais comme l'a dit Nariel en repérant les indices ce qui est tout aussi intéressant je trouve.

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Belthronding a écrit :Personnellement, dans un livre de fantasy la prévisibilité ou non de l'histoire m'importe peu car ce n'est pas ce que je recherche avant tout, je préfère un univers bien construit et bien développé par exemple.
Je pense que l'effet de surprise peut être induit par l'originalité et la richesse d'un univers, parce qu'ainsi on peut sortir des sentiers battus, explorer des possibilités de narration habituellement peu exploités, des personnages dont la façon de voir les choses diffèrent de ce dont on a l'habitude. Pour moi, le suspens n'est pas qu'une affaire d'histoire, même si elle y prend une grande place. C'est un tout.

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Belthronding : je ne suis pas trop d'accord avec toi sur ce que doit être la fantasy, et surtout de le comparer au polar :pPour moi, le polar est un genre d'intrigue. La fantasy, un genre d'univers. Un polar peut très bien se dérouler dans un univers de fantasy ! Du coup, ça me gêne un peu de voir comparé les deux sur un point d'intrigue, et ça me paraît mettre facilement de côté la diversité des intrigues en fantasy justement.Pour revenir aux intrigues prévisibles, il faut voir aussi comment elles le sont : est-ce des ficelles trop grosses, trop clichées, un indice mal dosé ? Tous les lecteurs ne sont pas égaux devant une intrigue : certains se laissent totalement porter, certains un peu moins (je me situe là, je me laisse porter, mais si y'a un poteau au milieu du chemin, je gueule !), d'autres accompagnent carrément l'intrigue (et eux pour les surprendre sans sortir de Deus Ex Machina pourri...)Pour les descriptions, j'ai une petite idée en dehors de "les gens sont trop pressés", c'est que les descriptions très longues et très soutenues viennent d'une époque où on ne possédait pas autant d'informations directes (télévision, internet, beaucoup beaucoup de visuel), et que c'est donc une manière de bien établir les lieux. Victor Hugo prend son temps pour bien décrire le Paris du XIVe siècle, la cathédrale... maintenant, la cathédrale, tout le monde l'a vue au moins en photographie, la décrire avec minutie est donc un peu redondant. Bref, ce n'est qu'une hypothèse là-dessus.

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Là, je crois que chaque lectrice et chaque lecteur aura son opinion :)Relire quand on connaît la fin, que ce soit inattendu ou écrit en 4° de couv, ce serait comme dire qu'on ne peut pas lire une histoire sur Arthur et Merlin, qu'on ne peut plus regarder Fight Club ou Usual suspect : le plaisir de la lecture/visionnage, c'est aussi dans le cheminement vers la dernière page/image.Un de mes profs appelait ça "l'effet Columbo" : on connaît le coupable avant le générique, donc l'intérêt est inverse d'un polar habituel, mais on est curieux de voir l'enquête (ça rime avec quête). Et si je parle de polar, c'est parce que je ne crois pas que la fantasy ou le polar ou le roman historique, aie le monopole sur l'imprévisibilité (et puis les polars fantasy ça existe).Le trône de fer, c'est un dernier paragraphe de chaque chapitre qui met de la tension, c'est une façon de faire, d'autres livres réservent les cliffhangers haletants pour des moments plus spécifiques (Frodo est-il mort ? Sam va t il finir la quête seul ? Gandalf va t il arriver sur un aigle et finir le boulot ? Gollum va t il devenir le seigneur des ténèbres et dans sa folie tomber dans le volcan ?).Et il y a aussi (mais on a un sujet là dessus) l'impact des prophéties, est-ce qu'on considère cela comme "prévisible" ? Si le vieux machin l'a dit, ça va "forcément" se passer comme il a dit sinon...ben, sinon...voilà quoi (non mais sérieux, il se passe quoi si on foire une prophétie ? Le lecteur est déçu ? parce que vous êtes sûr que c'est un vrai prophète et pas un charlatan ?), le héros peut s'interroger sur sa "foi".

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Foradan a écrit :Là, je crois que chaque lectrice et chaque lecteur aura son opinion :)
Entièrement d'accord, et c'est justement intéressant de découvrir ces optiques parfois très différentes. En tout cas, je trouve toutes vos réponses très enrichissantes : c'est passionnant de découvrir des attitudes, et des sensibilités parfois très différentes des siennes! Et je trouve que le fait qu'on soit dans un échange de vécus plutôt que dans une analyse théorique apporte beaucoup à la réflexion. :)Personnellement, je vais préciser deux points de mon message initial. 1) lorsque je parle de l'absence de potentiel de relecture des récits "à surprise", cette remarque ne vaut évidemment que pour moi, et je n'avais aucune intention d'en faire une généralité. En ce qui me concerne, j'ai malheureusement une excellente mémoire lorsqu'un récit me passionne par son suspense, et souvent le réflexe d'"accompagner l'histoire" dans ce cas-là. Ainsi, je m'arrête dans ma lecture pour spéculer sur la suite, et reviens parfois plusieurs centaines de pages (voire un livre entier) en arrière pour vérifier toutes les micro-corrélations que j'aurais pu détecter. Résultat : lorsque j'arrive à la fin du livre, je me souviens de TOUT, et souvent plusieurs années durant, ce qui fait que mon envie de relecture s'en trouve énormément limité, même si j'ai adoré ma première lecture, dans laquelle j'ai tout donné.C'est probablement la raison pour laquelle je ne relirai jamais "fils-des-brumes" de Brandon Sanderson par exemple, malgré le fait que j'aie dévoré et adoré ce cycle.2) lorsque j'associe plus grande prévisibilité et descriptif, cela me vient surtout de l'impression qu'il y a souvent une corrélation entre les deux (mais je peux me tromper) lorsque ces deux éléments sont jugés négativement. Ainsi, j'ai parfois l'impression que certains livres sont jugés négativement lorsque le suspense n'est pas assez présent (ou jugé comme tel), et qu'en plus les descriptions prennent leur temps.Personnellement, comme l'a dit Foradan, cela ne me dérange souvent pas, parce que j'apprécie souvent la balade ou la construction du récit dans ces moments-là. C'est ce qui me fait apprécier des cycles comme l'Arcane des épées, l'épée des Ombres, le Cycle d'Ea, un Monde Sans Dieux, et tout ce qui a trait de près ou de loin au Cycle Arthurien, par exemple, qui reposent peut-être autant ou davantage sur leur ambiance que sur leur intrigue (de mon point de vue, toujours).Enfin, il existe quelques exceptions à mes yeux, qui parviennent à mêler les deux : l'excitation du page-turner insoutenable, et le plaisir serein de la ballade enchantée. Le cycle "martyrs" et "druide" d'Oliver Peru, ou le cycle du Royaume d'Epine et d'Os de Greg Keyes sont de ceux-là, pour moi. :)

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J'ai l'impression pour ma part que la "mode" des effets de surprise rendent désormais ceux ci trop prévisibles et que finalement c'est avec un retour au classicisme que l'on retrouve un sentiment de fraîcheur et de découverte pure.Fut un temps, les spoils à la star wars type je suis ton père/oncle/yorkshire de ta soeur étaient légions. Le genre de retournement qui, bien mené, amène une bonne grosse dose d'épique. Maintenant ce genre de cliffhanger est considéré comme cliché et donc comme ennuyeux peut-être. Bref la frontière entre suspens et classicisme est assez floue. Sans compter que la surenchère de cliffhanger a tendance à ennuyer/énerver. On peut y voir des réminiscences de livres dont on est le héros où chaque paragraphe devait contenir son lot d'action, ou bien une volonté de coller à un format (télé)visuel. Pour le produit, c'est peut être pour attirer des lecteurs plus habitués à regarder des films ou des séries, ou bien attirer des producteurs pour adapter les livres sans trop d'efforts. J'ai cependant l'impression que le but initial, aka l'implication du lecteur (et là je ne peux m'empêcher de penser au passage de l'histoire sans fin où le libraire décrit à Bastian les bouffées d'adrénaline que l'on a à la lecture ^^) est de plus en plus perdu. On ne veut plus vraiment l'impliquer, lui donner l'impression de vivre quelque chose mais presque le prendre en otage. A croire qu'en littérature ausi, la société de consommation est présente avec cette surenchère de suspens et de chapitres à rebondissements ^^Pour en revenir aux oeuvres plus classiques, qui prennent leur temps et ne nous balancent pas tout de suite le héros accroché d'une main à une falaise de mille pieds, est-ce qu'il y a du suspens dedans? ma réponse est oui, mais un suspens différent. Ce genre d'oeuvres donne le plus souvent une belle part à l'introspection et à la psychologie des personnages même si le cheminement suivi est peut être hyper classique. Une quête initiatique, un parcours scolaire à la Harry Potter, une menace sourde et diffuse comme Sauron, un objet maudit.... Finalement ce ne sont pas simplement les actions des personnages ou leurs déplacements qui deviennent sources de questions, mais bien leurs cheminements intérieurs: untel peut-il devenir méchant, machin va-t-il au contraire se racheter?C'est pour moi, ce que l'on retrouve notamment dans le trône de fer où l’ascension et la déchéance des personnages les uns par rapport aux autres est bien mise en avant. C'est aussi l'une des raisons pour laquelle on en vient à comparer d'autres oeuvres au cycle de GRR Martin: il y a des péripéties, il y a du suspens et cela ne marche que parce qu'il y a implication psychologique. Peut-être est-ce aussi ce qui rend les morts encore plus "violentes"? la psychologie faisant qu'on en oublierait presque les actions....Bon évidemment on compare aussi pour des fins purement commerciales :D

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J'ai l'impression pour ma part que la "mode" des effets de surprise rendent désormais ceux ci trop prévisibles et que finalement c'est avec un retour au classicisme que l'on retrouve un sentiment de fraîcheur et de découverte pure.
Exact. Je ne suis pas sûr non plus qu'on connaisse l'histoire parce qu'on pense avoir tout deviné dès le début. Au mieux, on connaît son déroulement (?). Pour ce qui est du sujet, il me semblait qu'on avait déjà discuté des twists, mais je ne le retrouve pas, donc... :)

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Il y a twist et il y a ne pas savoir où on met les pieds, et ce n'est pas la même chose du tout. Une histoire peut aller d'un point A à un point B sans que le lecteur ne sache par où l'auteur va l'emmener, ou même sans aucune idée de ce à quoi peut ressembler le point B, sans avoir à recourir à des effets de manche, des twists et des deux ex machina. Il suffit juste que l'histoire ne soit pas trop classique, qu'il y ait un brin de recherche et d'originalité dans la structure narrative, pour ne pas savoir ce que nous réserve l'auteur à la page suivante. Pas de suspense forcé, l'auteur s'appuie juste sur la curiosité du lecteur.Et il y a aussi prévisibilité et connaître la fin. Que ce soit pour des récits de fantasy historiques où le sort de certains personnages est connu par la force des choses ou pour des quêtes dont on connaît le point d'arrivée (La Tour Sombre, La Roue du Temps,...) même si certains détails restent inconnus, je peux tout à fait me passionner pour le voyage sans plus m'occuper réellement de la destination.Mais si le voyage devient prévisible au possible (lire l'Arcane des Épées de nos jours, par exemple) et que l'on sait sur quoi on va tomber avant même de tourner la page, mon intérêt descend très vite et je m'ennuie rapidement.

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Je suis souvent un des premiers à râler parce que "pfffffffff j'avais tout deviner dès le chapitre 3" (on se souviendra de mon expérience décevante avec Elantris).Mais en fait cela n'arrive que dans deux situations finalement (mais qui restent assez courantes :1) quand tout est téléphoné et que là, vraiment, tu as déjà lu ça 100 fois (alors aux deux tiers du livre, il s'aperçoit qu'il est amoureux de la fille qu'il trouvait insupportable jusque là et il faut absolument qu'il la sauve)2) quand la "surprise" fait partie de la mécanique, de la structure du récit (ou du moins quand on à l'impression que cet effet était voulu par l'auteur) mais qu'on évente le "truc". Là ça fait mal. Là, on ce dit que l'auteur à raté quelque chose. On a l'impression d'avoir compris son intention mais aussi qu'il aurait dû faire mieux dans la réalisation. C'est exactement une déception finalement. Pour moi le cas d'Elantris est pile là dedans. On comprend vite qu'on se dirige vers un livre à "twist final" et si on devine avant ce que ça va être parce que les indices clignotent trop, on regrette que ça n'atteigne pas la qualité de la fin spectaculaire de "Des milliards de Tapis de Cheveux"Du coup, on peut très bien savoir "comment ça va finir" ou même "par où on va passer" sans que ça soit gênant. Du moment que l'on a pas cette impression que ce qu'on a deviné était tout ce que le livre avait à offrir.On peut très bien savoir qu'un personnage va faire une action bien précise parce que ça ce voit comme le nez au milieu de la figure mais apprécier la façon dont l'action est mise en scène, la part d'introspection (avec les raisons de l'action,etc.)

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Comme disait Dorgelès : "Le voyage pour moi, ce n'est pas arriver, c'est partir."Finalement peu importe que la fin soit téléphonée si le voyage est beau. A titre personnel, je lis beaucoup de romans dérivés, notamment D&D, et si la fin se devine à la fin de la page 3, ça ne m'empêche jamais de toujours autant apprécier le voyage.

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C'est comme chez Martin. Quand un personnage part de A pour aller en B il arrive en C. Au début ça surprend, mais quand c'est un procédé systématique ça finit par lasser.

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De plus le caractère inéluctable de certaines fins est un des ressorts de la tragédie... savoir dans quelle direction va un roman, même si il peut pour cela prendre des détours inattendus, n'est pas une mauvaise chose... et un retournement de situation serait parfois... inapproprié. Imaginer, tel Camus, Sisyphe heureux n'aurait guère convenu à la fin d'un récent livre de Denoël... et qui dévore le Silmarillion pour la première fois comprend vite que biens vaines, fors leur beauté, peuvent sembler les prouesses des Eldars et que prévisible reste la chute de leurs royaumes. Pourtant cela ne confère au texte que plus de force. (Je simplifie, matou, je simplifie...).Quoiqu'il en soit attendre obligatoirement un rebondissement inattendu plus ou moins réussi à la fin de chaque chapitre peut finir par agacer le lecteur, n'est guère gage de qualité et mène à un appauvrissement de la structure des romans. Si ils étaient tous conçus stylistiquement sur ce moule... ce serait bien triste.

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J'ai une préférence pour les romans qui ont des rebondissements, mais après, un roman prévisible ne me dérange pas trop, ça dépend des livres. Et puis, je ne suis pas sûre qu'il faille à ce point opposer suspense et prévisibilité : même les romans prévisibles ont un certain suspense, c'est juste qu'on ne se demande pas "qu'Est-ce qui va se passer?" mais "comment ça va se passer?" (enfin, quand c'est bien fait, parce qu'il y a aussi les romans où on sait d'avance ce qui va se passer et comment, et là c'est sûr que niveau suspense on peut plus rien faire). Ce n'est pas le même genre de suspense, mais c'est tout aussi bien. Par contre, j'ai beaucoup plus de mal à accrocher quand ce sont les personnages qui sont prévisibles, ou quand leur degré de psychologie avoisine le zéro. Là, pour le coup, même s'il y avait des rebondissements toutes les deux pages, je n'accrocherais pas. Surtout que les rebondissements toutes les deux pages, c'est aussi lassant qu'un roman où on a l'impression qu'on aurait pu écrire soi-même.Pour ce qui est des longues descriptions, ça dépend de ce qu'on entend par "longues", et aussi de l'objet décrit. Si on décrit toute une ville ou toute une maison, ça ne me dérange pas si ça s'étend (bon, pas non plus sur dix pages). Après, si c'est juste une pièce ou une personnage, je commence à trouver ça lourd au bout d'une demi-page, une page si c'est une pièce bien fournie. Après, c'est peut-être juste un complexe d'infériorité, parce que je n'ai jamais été fichue de faire une description correcte. Et puis ça dépend aussi de la place dans le récit, parce que des fois, une trop longue description peut vous tuer le suspense. Je me souviens d'une scène de l'Assassin royal où à chaque fois que Fitz rentrait dans une pièce, il y avait une description, alors que moi j'attendais qu'une seule chose, c'était qu'il passe enfin à l'action parce que c'était imminent, j'ai cru que j'allais péter un câble... Comme quoi, le suspense peut être juste une affaire de rythme.

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Quand on est à la moitié du livre, qu'il n'y a qu'un héros et qu'il combat un ennemi, on se doute bien qu'il ne va pas mourir. On sait qu'il va gagner. Mais cela n’empêche pas d'apprécier le récit. Ce qui est important, c'est la façon dont le combat se déroule, ce qu'il va apporter à l'histoire ou à la construction du personnage, de l'univers ....Pour moi, la quête est plus importante que l'objet lui même ... à condition que la narration soit habile.

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Tout à fait, dans le même genre il y a aussi le récit autobiographique où le personnage fait un point sur sa vie des années plus tard. On sait bien qu'il restera en vie (ou reviendra à la vie ou autres...) malgré toutes les fois où il a frôlé la mort mais cela ne gâche en rien l'histoire.