41
Mats Lüdun,mercredi 26 juillet 2006, 23:01 a écrit :mais la raison du triomphe de la fantasy aujourd'hui est le manque de croyance des gens qui se sont désillusionnés de tout, de la religion depuis longtemps et de la science depuis les immondes guerres mondiales. Que reste-t-il ? L'enfance et ses terres merveilleuses, donc le conte, donc la fantasy et ces pays éternels où tout est possible.
Je trouve que ça se discute quand même, c'est un peu réducteur comme vision vis à vis de la fantasy et des raisons de son succés :)

42
la religion? c'est pas comme si les Etats-Unis (là où le succès de la fantasy est le plus probant sans doute, avec l'Angleterre) étaient un pays athée hein... C'est une vision très franco-française de croire que nous vivons dans un monde où la religion perd du terrain. La réalité est diamétralement opposée.Au risque de me tromper, nous vivons dans un monde où l'avenir n'a jamais été aussi incertain, tout comme le présent d'ailleurs. La société occidentale moderne, malgré tout le confort qu'elle apporte, a créé un bon nombre de tensions sociales, de solitude et de douleur d'ordre psychologique. Il ne me semble vraiment pas surprenant que le besoin d'évasion soit si fort dans la population. Et à mon avis ce n'est pas prêt de s'arranger...

43
Vous avez raison quand vous dîtes qu'aux Etats-Unis, ou même dans d'autres pays européens, etc., la religion ne faiblit pas. Toutefois, à l'instar de Tolkien, on peut croire et avoir besoin de s'évader dans le merveilleux. Cet amour du merveilleux est tout de même significatif. C'est une manifestation du sacré (voir Le Sacré et le profane de Mircea Eliade). Sauf que dans la fantasy, ce sacré n'est pas associé à un dieu ni à une religion. Il n'y a qu'Hubbard qui l'a fait pour la scientologie avec ses romans. Si on peut reconnaître des éléments chrétiens chez Tolkien, à aucun moment il ne dit d'"aller à l'église", je caricature. Toutefois, la fantasy espère en l'homme (en le héros plus exactement) qui arrive à accomplir des miracles, à changer le monde (abattre des tyrannies, réussir une quête impossible...) ; dans la science-fiction, l'homme est au second plan, derrière la science, même si c'est parfois le cerveau humain qui est transcendé, l'intelligence, comme chez Barjavel ; sauf que là, c'est souvent mal employé et que l'amour s'en mêle.Enfin, j'espère n'offusquer personne et ne pas réduire cet intéressant sujet.

44
Tu n'offenses personne Mats, loin de là; et de toute façon le forum est un lieu d'échange d'idées. Le parallèle avec les religions est intéressant et a été avancé à plusieurs reprises , notamment par Lewis, même si cela n'explique pas vraiment pour moi le bond en avant actuel de la fantasy. Je serais plutôt de l'avis de Belial: notre société est stressante, engendre pour certains un sentiment de mal-être, et la fantasy est une fenêtre vers le merveilleux pour s'échapper- ou bien retourner aux valeurs sûres de son enfance (ce qui expliquerait la tendance au succès de la "fantasy enfantine" que je mentionnais dans mon précédent message). :) Cette piste du merveilleux semble constituer la meilleure explication pour le succès de la fantasy sur la SF, qui continue d'ailleurs avec le futur film stardust notamment.Je trouve aussi que la SF est très vaste, et ne relègue pas nécessairement l'homme au second plan sauf exception. En effet, les succès récents de sagas familiales ou centrées sur un personnage (honnor, Vorkosigan, le cycle des doués) montrent la tendance inverse: l'homme ne peut plus se reposer uniquement sur la science, même en SF, et doit surtout compter sur lui-même. :) Serait-ce le renouveau de la SF? ;)

45
A mon avis si la Fantasy a "occulté" la Sf c'est que cette dernière laissait malgré tout une place au "raisonnable" dans le sens où il ya seulement 30 ans on pensait connaitre de fabuleuses révolutions dans peu de temps et rien n'a changé ou presque. Les gens ont associé aux progrès technologiques le progrès moral et des moeurs et se sont trompés.C'est vrai qu'en Fantasy les héros ont un rôle plus important car ils ne sont pas "monsieur-tout-le-monde" ( ou bien finissent par ne plus l'être) et dans notre société celle où la masse à un rôle prépondérant et ou les gouts sont uniformisés , chacun cherche à se différencier et paradoxalement à se reconnaitre dans quelqu'un , dans le héros de Fantasy par exemple.

46
Sleepy,jeudi 27 juillet 2006, 16:23 a écrit :A mon avis si la Fantasy a "occulté" la Sf c'est que cette dernière laissait malgré tout une place au "raisonnable" dans le sens où il ya seulement 30 ans on pensait connaitre de fabuleuses révolutions dans peu de temps et rien n'a changé ou presque.
A part les puces, les micro-ordinateurs, les autoroutes de l'informatio, la nano-technologie... :rolleyes: Bref, je m'arrête là sur le HS, mais difficile de ne pas relever quand même...Cependant, je reconnais que ce sont les espoirs d'il y a trente ans qui sont souvent déçus, en particulier sur l'amélioration des conditions de vie pour tous. Il doit donc bien y avoir une partie de la "nouvelle" affection des lecteurs pour la Fantasy qui provient de la volonté de la confiance en l'homme plutôt qu'en la machine. Reste que certains mondes comme celui de G.R.R. Martin sont quand même loin d'être enviable, IMHO... :sifflote:

47
Publivore,jeudi 27 juillet 2006, 18:17 a écrit :Reste que certains mondes comme celui de G.R.R. Martin sont quand même loin d'être enviable, IMHO... :sifflote:
Ca, aucun doute là-dessus ! :o

48
la fantasy est une fenêtre vers le merveilleux pour s'échapper- ou bien retourner aux valeurs sûres de son enfance (ce qui expliquerait la tendance au succès de la "fantasy enfantine" que je mentionnais dans mon précédent message).  Cette piste du merveilleux semble constituer la meilleure explication pour le succès de la fantasy sur la SF, qui continue d'ailleurs avec le futur film stardust notamment.
Je suis tout-à-fait d'accord avec Belgarion : ama, la fantasy est, davantage que la SF, une littérature d'évasion. Et aussi parce que le type du héros y est atemporel et confronté au mal davantage qu'à ses semblables en tant que tels (et non comme vecteurs du bien ou du mal, je ne suis pas sûre d'être claire <_< ).Par ailleurs, quand on parle de "science" à l'heure actuelle, on parle de + en + de "sciences molles", les sciences humaines, et de leur utilisation en SF. Il n'est que de lire le cycle des Futurs Mystères de Paris, de Roland C. Wagner, qui y revisite les théories de Jung, ou Avance rapide, de Michael Marshall Smith. Et ce ne sont là que les exemples qui me viennent présentement à l'esprit. Dans ce contexte, parler de "progrés techniques", et de la foi qu'on peut avoir en eux, n'est vraiment plus d'actualité :angry: . La SF a changé depuis "l'âge d'or" !

51
D'accord avec toi, John Carter, mais encore faudra-t'il s'entendre sur ce que recouvre le terme de "science fantasy"... et c'est pas gagné ! D'accord pour qu'il s'applique à Ténébreuse (pour lequel, si je ne me trompe, il a été créé), mais personnellement je trouverais fort dommage, et très peu utile, finalement, qu'on l'utilise pour les oeuvres que l'on n'arrive à classer ni en fantasy, ni en SF. Une définition par défaut, en somme... ça ressemble beaucoup à un fourre-tout ! Alors ? Quelle est la vraie définition de ce genre bâtard ?

53
Merci Aslan. J'ai la mauvaise habitude de me borner au forum :rouge: , j'en ai peur, sans suffisamment fouiller dans les trésors d'Elbakin... Cela dit, autant cette définition me semble coller parfaitement à Ténébreuse (qui n'est pas cité, un comble :blink: !), autant je ne suis pas d'accord en ce qui concerne Pern, qui ne comporte pas de "merveilleux" (les dragons sont bio-ingéniérés pour remplacer les traineaux volants à court de carburant et de pièces dans la lutte contre les fils). Je soutiens une fois de plus, en pure perte probablement, que pour moi Pern est de la SF, pure et dure.Mais je m'égare... Pardon pour ce hors sujet. Personnellement, je vais donc dire que je suis d'accord avec cette définition de la science-fantasy... mais que je ne vois pas tant que ça d'oeuvres à quoi elle pourrait s'appliquer !

55
Sleepy,jeudi 27 juillet 2006, 15:23 a écrit :A mon avis si la Fantasy a "occulté" la Sf c'est que cette dernière laissait malgré tout une place au "raisonnable" dans le sens où il ya seulement 30 ans on pensait connaitre de fabuleuses révolutions dans peu de temps et rien n'a changé ou presque. Les gens ont associé aux progrès technologiques le progrès moral et des moeurs et se sont trompés.C'est vrai qu'en Fantasy les héros ont un rôle plus important car ils ne sont pas "monsieur-tout-le-monde" ( ou bien finissent par ne plus l'être) et dans notre société celle où la masse à un rôle prépondérant et ou les gouts sont uniformisés , chacun cherche à se différencier et paradoxalement à se reconnaitre dans quelqu'un , dans le héros de Fantasy par exemple.
Euh... le raisonnable de la SF, hein... la SF vraiment SF, je veux dire, pas l' "anticipation proche"... en quoi est-elle plus "raisonnable" que la Fantasy ?(... et le monde de GRR Martin n'est pas le seul à ne pas être enviable : à peu près tous les mondes de Fantasy sont atroces...)

56
Et bien je prend l'exemple du space opera qui est probablement le plus " éloigné" de la réalité des sous-genre de la SF , il est dans une certaine mesure possible que des civilisations existent sur d'autres planètes avec les lois de la Physique qui continue à s'appliquer, tandis que les mondes Fantasy contiennent de la Magie ,qui fait généralement fi de ces lois et sont par conséquent moins raisonnables. Tout est relatif ;)

57
Que des civilisations puissent exister sur d'autres planètes, et que les lois de la physique s'y appliquent... bien sûr (les lois de la physique s'appliquent aussi dans les mondes de Fantasy : quant Toubib ou Frodon laissent tomber leur plume, elle tombe). Mais expliquer que les personnages puissent accomplir telle ou telle chose (genre : dépasser la vitesse de la lumière - ce qui, au passage, et contraire aux lois de la physique-, ou fabriquer des "clones" restant eux mêmes - ce qui, au passage, est contraire aux lois de la biologie) par des fadaises pseudo-scientifiques, ce n'est pas différent que de les expliquer par "magie". Qu'est-ce que la magie, d'ailleurs ? Je vais prendre deux exemples basiques : la "Force" de Star Wars permet à Luke de faire de la "télékinésie". En quoi fondamentalement, est-elle différente du "Vouloir et du Verbe" de la Belgariade ? Et en quoi la "passation de connaissances" intra-utérine de Jessica à Alia dans Dune serait-elle plus scientifique que celle de Poledra à Polgara dans les Préquelles d'Eddings ? Fondamentalement, dans les deux cas, c'est la même chose... C'est un truc tordu et impossible, mais qui fait partie de l'histoire, parce que l'histoire elle-même et "fantastique".

58
lambertine,lundi 07 août 2006, 11:12 a écrit :la "Force" de Star Wars permet à Luke de faire de la "télékinésie". En quoi fondamentalement, est-elle différente du "Vouloir et du Verbe" de la Belgariade ?
Enfin, là, je suis pas sûr que StarWars soit le meilleur des exemples pour la SF, puisque certains - pas moi - considèrent que c'est de la fantasy, justement, en partie, pour le l'aspect "magie" de la Force. :)

59
Peut-être mais en utilisant le prétexte de la science les gens entrevoient ( ou ont entrevu ) la possiblité pour que cela soit réalisable et ça laisse une place au fantasme plus prépondérante que dans la Fantasy.Et je n'ai jamais dit que les lois de la physique ne s'appliquait pas dans la Fantasy ce qui aurait été bien ridicule à mon avis ;) , simplement que dans certaines circonstances la magie passait outre.

60
Mais je considère SW comme de la Fantasy. Le problème c'est que, mis à part les quelques histoires d'"anticipation proche" (ce qu'étaient d'ailleurs aussi les livres de Jules Verne, à son époque) basées sur des données plausibles, la science n'est justement qu'un prétexte pas scientifique pour un sou et pas plus "réalisable" que la magie de Belgarion dans tous les livres de SF qu'il m'a été donné de lire, et que je considère donc comme des livres de Fantasy. C'est très bien de remplacer Dieu par l'ADN ou l'Intelligence artificielle, mais quand on fait dire n'importe quoi à l'ADN ou à l'intelligence artificielle... . Au fond, mon sentiment se rapproche très fort de celui de Silverberg cité par Kaines, à savoir :
(J’inclus la science fiction car celle-ci, telle que je la conçois, appartient indéniablement au domaine de la fantasy : c’en est un courant spécialisé, une forme de littérature visionnaire orientée vers la technologie dans laquelle l’imagination a toute latitude pour rendre vraisemblable ce qui est scientifiquement impossible, ou à tout le moins improbable.)
J'ai envie de citer une oeuvre aussi fantaisiste que Lanfeust pour illustrer mon propos, d'ailleurs. La "magie" de Lanfeust étant finalement expliquée "scientifiquement" par les Princes-Marchands, mais la science de ces mêmes Princes-Marchands étant, elle, totalement "loufdingue" (comme celle de la grosse majorité des auteurs de SF)