19
par Littlefinger
Elbakinien d'Or
En 2154, la Terre est surpeuplée et polluée. Condamnés à vivre sur la planète, les pauvres et les déshérités se retrouvent contraint de survivre en travaillant dans d'immenses usines et en vivant dans d'énormes bidonvilles. A Los Angeles, ou du moins ce qu'il en reste, Max rêve de partir pour Elysium depuis qu'il est tout petit. Paradis pour riches construit en orbite, la station attise les convoitises. C'est par le hasard des choses que Max se voit obligé de s'y rendre par tous les moyens, juste au moment où la secrétaire Delacourt tente de prendre le pouvoir sur Elysium.Nouveau film de science-fiction pour le sud-africain Neil Blomkamp, Elysium ne bénéficie pourtant plus de la même aura. Son premier long-métrage, District 9, avait surpris tout le monde. Audacieux dans la forme et dans le fond, magistralement réalisé, ce coup d'essai avait fait mouche. En engageant cette fois des stars hollywoodiennes bien connues telles que Matt Damon ou Jodie Foster, Blomkamp s'ouvre davantage à l'entertainement. Le soucis c'est que le cinéaste délaisse son audace en route. Explications.Elysium fait partie des derniers blockbusters de l'été. A ce titre, il y aura de l'action, de l'amour et de l'émotion. Blomkamp semble calquer son second film sur la trame du premier avec une métaphore sur l'immgration cette fois. Sauf que pour le coup, rien ne marche. On découvre rapidement le personnage de Max, stéréotypé à mort, paragon du héros un peu badass qui va se sacrifier pour le bien commun. RIEN à voir avec Wikus van der Merwe de District 9. On comprend direct que le reste va être du même calibre. Soyons clairs, en terme d'anticipation sociale, Elysium tappe dans tous les clichés : les pauvres écrasés par des riches très très très (et même très) méchants, obligés de voler et de se tuer à la tâche pour survivre et qui attendent, forcément, un héros pour faire payer aux salauds d'en haut. Elysium semble expurger toute originalité ou prise de risque.La chose se confirme rapidement, et si Blomkamp installe facilement ses personnages principaux, ils restent tous des caricatures sur pattes. Malgré tous ses efforts, Matt Damon ne peut masquer l'artificialité de Max, de même que Jodie Foster se cantonne à faire la grande méchante politicienne de service et qu'Alice Braga nous joue le couplet de la gentille femme en détresse. Ce n'est pas ici le talent des acteurs qui est à remettre en cause, mais bien l'écriture lamentable de leurs personnages.Reste Sharlto Copley, le seul à tirer un peu son épingle du jeu grâce au méchant de service, Kruger. Avec son accent afrikaneer et ses mimiques de cinglé, il s'affirme peut-être comme la seule petite réjouissance à ce niveau. Au vu de la galerie de protagonistes de District 9, Elysium s'affirme comme un lamentable ratage.Pire encore, la trame scénaristique suit un peu le même naufrage. Nous voici dans la quête d'un paria pour sa survie puis, finalement, pour la survie des gentils. Nons seulement l'histoire ne réserve aucune surprise majeure mais, en plus, elle accumule des incohérences digne d'un Prometheus : L'infirmière qui soigne une plaie au couteau (ils sont quand même bien formés en 2154), la navette des rebelles qui se posent sans encombre alors qu'on les explosait aux missiles avant ou encore l'absence totale de défense dans le centre de commande pendant l'attaque. Ce genres de choses plombent le film et révèlent également le fait que Blomkamp introduit d'excellentes choses mais ne les exploitent jamais. On pense aux robots de sécurités qui ne servent en fait qu'à deux séquences sur tout le film, ou au système "électoral" d'Elysium jamais expliqué, sans parler des gigantesques usines et du rôles des mercenaires. C'est surement d'ailleurs ces derniers qui apportent les seules et uniques touches de fun dans le film par leur sauvagerie. Reste que Blomkamp ne les laisse jamais sortir du carcan de "méchants outils" dans lequel il les a mis.Reste pourtant qu'Elysium retrouve un génie hallucinant dans sa réalisation. Le Sud-Africain manie sa caméra avec une virtuosité impressionnante et filme ses scènes d'actions de façon puissante et lisible. Pour preuve, on gardera en mémoire l'affrontement sur le pont entre Kruger et Max, pur moment de jouissance filmique. De même, Blomkamp n'a pas son pareil pour installer un univers crade, le bidonville de L.A renvoyant immédiatement au District 9, mais surtout pour disséminer des éléments SF ultra-jouissives comme les armes à impulsion, les boucliers de champ de force ou les navettes. C'est d'ailleurs cette particularité qui dénote que Blomkamp était l'homme parfait et idéal pour réaliser le film Halo. On sent à plusieurs reprises sa frustration lors des vues d'Elysium (un peu décevantes d'ailleurs au départ) qui rappellent furieusement le Halo en question, ou le bouclier employé par Kruger qui reste une copie conforme des boucliers des Jackals. Mais à la place d'Halo, le Sud-Africain déçoit avec un film au final largement raté.Elysium semble être l'archétype de ce qui arrive aux bons réalisateurs pris en main par Hollywood. Jamais audacieux, toujours attendu, bourré de facilités et peuplé par des personnages caricaturaux, le second long-métrage du Sud-Africain préféré de Peter Jackson détruit tous les espoirs qu'on avait pu mettre en lui et ne laisse poindre que son génie formel. Une immense déception.