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Alors, mon point de vue de lectrice (et ça me permettra au passage de donner mon avis sur le roman). Je n’ai pas eu la moindre empathie pour Benvenuto dès le début de l’histoire. La scène que tu évoques Shalmy a failli me faire arrêter ma lecture. En plus de ça, il me semble que Benvenuto a une ou deux réflexions raciste et homophobe. A ce niveau, pour moi, ce n’est même plus un salaud, mais un rebut de l’humanité.
Et pourtant, j’ai bel et bien lu ce livre jusqu’au bout, et j’ai aimé l’histoire. Tout simplement parce que malgré ce personnage haïssable, ses aventures sont très prenantes, et c’est bien écrit. J’ai tout de suite eu envie de connaître la suite, et ça ne m’a pas lâché jusqu’à la fin. On a une intrigue politique bien menée, et des passages d’action qui rythment le récit. Pour moi c’est du très bon roman.
D’ailleurs, on en parle de la remarque bien misogyne de Leonide Ducatore à la fin ? J’ai beau savoir que c’est l’univers créé par l’auteur qui veut ça, à lire en tant que femme, ça fait mal.
Et pourtant, j’ai bel et bien lu ce livre jusqu’au bout, et j’ai aimé l’histoire. Tout simplement parce que malgré ce personnage haïssable, ses aventures sont très prenantes, et c’est bien écrit. J’ai tout de suite eu envie de connaître la suite, et ça ne m’a pas lâché jusqu’à la fin. On a une intrigue politique bien menée, et des passages d’action qui rythment le récit. Pour moi c’est du très bon roman.
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D’ailleurs, on en parle de la remarque bien misogyne de Leonide Ducatore à la fin ? J’ai beau savoir que c’est l’univers créé par l’auteur qui veut ça, à lire en tant que femme, ça fait mal.
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Shalmy a écrit :Je vais faire un parallèle très foireux et j'ai tout à fait conscience que les deux oeuvres n'ont pas grand chose en commun mais je repensais l'autre jour à Benvenuto et au fait que, si on analyse uniquement ses actions, c'est quand même un salopard indéfendable mais que l'auteur parvient à nous faire ressentir de l'empathie pour lui grâce à sa Maestria.► Afficher le texte
Visiblement ce point de vue est partagée par une bonne partie du lectorat (masculin ?) mais qu'en est-il du lectorat féminin ?
Le livre qui m'a le plus marqué dans ma vie est Lolita de Nabokov. Vers la fin du livre, j'ai ressenti un tel dégout de moi-même quand j'ai réalisé que j'avais eu durant tout le bouquin de l'empathie pour un tel monstre que j'en ai été physiquement malade. À peine la dernière page tournée, j'ai relu intégralement le bouquin en une nuit pour voir comment j'avais pu à ce point me laisser berner par l'auteur et finir par trouver le pédophile sympathique et sa proie insupportable. Et si tout le monde n'a pas été touché à ce point par l’œuvre, je sais qu'une bonne partie des lecteurs masculins applaudissent le tour de force. Je me suis rendu compte bien plus tard que le livre faisait nettement moins l'unanimité auprès du lectorat féminin et que beaucoup n'avaient absolu pas réussi à ressentir de l'empathie pour Humbert.
On est bien entendu très loin de Lolita avec Gagner la guerre (la pédophilie n'est absolument pas le propos de Jaworski et la plupart des victimes de Benvenuto sont des hommes) mais il me semble tout de même qu'il y a quelques parallèles à faire au niveau du traitement. Il s'agit dans les deux cas de monstres indéfendables que l'auteur parvient à nous rendre sympathique.
Mais est-ce aussi l'avis de ces dames ou bien est-ce que la scène mentionnée en spoiler (ou d'autres éléments) les poussent davantage à éprouver du dégout pour le personnage ?
Je n'ai jamais eu beaucoup d'empathie pour Benvenuto tout au long du livre. Rien que son attitude et sa voix lors des premières phrases du livre m'ont fait hésiter à continuer. Mais ce qui m'a convaincu de lire l'ensemble, c'est justement le fait que le personnage est parfois caricaturalement cynique et lâche, qui permet de faire une franche distinction entre la voix du personnage et l'avis de l'auteur. La plume de Jaworski pointe derrière, et une partie du lectorat s'est demandée comment un assassin pareil pouvait s'exprimer aussi bien (il y a des éléments de réponse dans le roman quand on a quelques aperçus de l'éducation de Benvenuto).
La scène que tu cites en spoiler m'a également marqué, en particulier sa conclusion en forme de jeu de mots détestable. C'est sans doute la seule partie du livre que je n'ai vraiment pas "digérée". Mais, à l'échelle du livre, il y a des choses qui équilibrent cet acte :
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Je n'ai pas lu Lolita (honte à moi, lacune à réparer - il faut dire que le sujet ne m'attire pas). Mais la question que tu poses est plus vaste : c'est celle de la morale des personnages de romans et des oeuvres littéraires en général. Une question très ancienne, qui a valu des procès à Baudelaire et à Flaubert, entre autres. Je ne pense pas que le projet de Jaworski ait été de rendre un monstre sympathique, mais simplement de mettre en scène un monde politique machiavélique - il cite d'ailleurs Machiavel en épigraphe au roman. Quant à savoir si le texte terminé correspond à son projet, j'en doute : il a dit lui-même en interview qu'au bout d'un moment la voix de Benvenuto avait pris une certaine autonomie. Le personnage s'est débrouillé pour salir l'auteur !
En dépit de son personnage repoussant, Gagner la guerre m'a paru moralement beaucoup plus sain que quelques autres livres que je n'ai pour le coup pas réussi à finir, comme Une forêt profonde et bleue de Marc Graciano (pourtant publié aux éditions Corti, que j'ai connues mieux inspirées), qui décrit une scène de viol avec ce qui essaie d'être une description froide et clinique, mais m'a paru tomber dans la complaisance pornographique (edit : je précise ma pensée : écrire des bouquins pornographiques, je n'ai rien contre ; mais des bouquins qui racontent une scène de viol sur le mode pornographique de façon à susciter l'excitation sexuelle, alors même que le personnage violé pleure et supplie, là ça me met en colère : on est en pleine culture du viol). J'ai essayé de me forcer à continuer pour savoir la suite de l'histoire, mais je n'ai pas pu. Quand bien même ce serait un rape and revenge, la scène m'a paru indéfendable.
Iselle a écrit :Alors, mon point de vue de lectrice (et ça me permettra au passage de donner mon avis sur le roman). Je n’ai pas eu la moindre empathie pour Benvenuto dès le début de l’histoire. La scène que tu évoques Shalmy a failli me faire arrêter ma lecture. En plus de ça, il me semble que Benvenuto a une ou deux réflexions raciste et homophobe. A ce niveau, pour moi, ce n’est même plus un salaud, mais un rebut de l’humanité.
J'ai lu le roman depuis trop longtemps pour me souvenir à quelles remarques tu fais allusion : je serais curieux de savoir. En revanche, il me semblait que, quand Benvenuto évoque son passé et sa relation avec son ancien maître et professeur, il fait de lourdes allusions à une probable relation homosexuelle maître-disciple (qui fait très "Italie de la Renaissance", façon Raphaël, Léonard de Vinci ou Caravage). Cela n'exclut pas qu'il fasse des remarques homophobes ailleurs, mais ça montre qu'il a ses contradictions.
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Sur le fait que "c'est nécessaire pour rendre ce personnage ignoble crédible", et tout ce que cela autorise, finalement, je me permets de citer un bout d'article paru dans le Monde le 18 avril dernier, à propos de la légion d'honneur remise à M. Houellbecq :
"Pour montrer qu'on ne s'offusque de rien, on s'offre, comme alibi de modernité décontractée, la vulgarité nouvelle tendance. (…) elle passe pour libératrice, par une sorte de grand "Désormais" enthousiaste. Il s'agit, à vrai dire, du lâcher-tout pulsionnel et d'opinions dont on s'inquiète par ailleurs sur le plan politique. (…)
Souvenons-nous : pourquoi et quand Céline a-t-il sorti son sinistre fond de commerce politique? Dès l'instant où Céline s'est confondu avec Bardamu, son narrateur. Ceux qui invoquent sans cesse la pertinente et nécessaire distinction entre narrateur et auteur pourraient s'aviser que, de roman en roman, le narrateur de Michel Houellebecq a la même attitude à l'encontre des conquêtes de la modernité européenne ; cela finit par faire des romans porte-voix d'une idéologie nauséabonde. Evidemment, l'auteur est un malin, chaque fois il se dérobe derrière son narrateur et échappe aux mains qui le veulent bien. C'est qu'il les soulage, il leur signifie que tout est permis dans les opinions."
Que les choses soient claires, je ne fais aucun procès d'intention à M. Jaworski, et je ne compare pas sa personne, ses intentions, ses opinions politiques ou autres que j'ignore et dont je me moque, à celles de M. Houellebecq. Il s'agit uniquement d'une analogie sur le point précis de s'abriter derrière un personnage pour justifier, dans les actes ou propos de ce personnage, les pires saloperies. Il se peut que l’auteur ait sciemment anticipé, prévu, calculé cette
. Personnellement j'en doute. Cette scène, sur le plan littéraire, est très réussie, elle sonne comme un de celles qui vous sortent des doigts sans qu'on l'ait appelée, comme si le personnage lui-même l'exigeait. Ces moments-là, pour un écrivain, sont tout sauf un moment d'écriture ordonnancée, calculée. Plutôt ces moments assez stupéfiants , lorsque le fond nauséeux des pulsions passe de l'obscur à la clarté des mots, de l'indicible au dicible. Je peux me tromper, bien sûr. Sur cette scène de ce livre, c'était mon impression.
On ne fait pas de littérature avec des bons sentiments, c'est même tout le contraire, et c'est pourquoi Benevenuto m'a paru être un personnage somme toute bien classique. Il ne s'agit bien entendu pas de prôner la morale à tous les étages en littérature, de gentils héros, etc. ce qui serait d'une stupidité sans nom.
Mais moi, en tant que femme, et pas seulement, je ne peux pas regarder Tango à Paris, lire Nabokov, ou considérer Gagner la Guerre comme si je ne savais pas ce que je sais, comme si je n'avais pas subi, en tant que femme, tout ce que le récent "me too" a si bien fait ressortir. Ce non-dit qu'on regardait comme allant de soi et qui à présent me met hors de moi, et encore, quand j'imagine le nombre d'hommes lisant la scène de Gagner la guerre et en éprouvant un certain plaisir _ car oui, il faut assumer et ne pas être hypocrite, c'est aussi cela la vertu cathartique de l'art.
Ce qui prouve que le livre de M. Jaworski a touché quelque chose de vrai, d'affreusement humain, qui a trait au au bas-fond de la virilité, telle qu'elle paraît aujourd'hui inacceptable. A-t-il voulu la dénoncer, est-elle justifiée par un contexte? Peu importe, finalement, puisque ce qu'on interroge ici c'est un ressenti de lectrice.
"Pour montrer qu'on ne s'offusque de rien, on s'offre, comme alibi de modernité décontractée, la vulgarité nouvelle tendance. (…) elle passe pour libératrice, par une sorte de grand "Désormais" enthousiaste. Il s'agit, à vrai dire, du lâcher-tout pulsionnel et d'opinions dont on s'inquiète par ailleurs sur le plan politique. (…)
Souvenons-nous : pourquoi et quand Céline a-t-il sorti son sinistre fond de commerce politique? Dès l'instant où Céline s'est confondu avec Bardamu, son narrateur. Ceux qui invoquent sans cesse la pertinente et nécessaire distinction entre narrateur et auteur pourraient s'aviser que, de roman en roman, le narrateur de Michel Houellebecq a la même attitude à l'encontre des conquêtes de la modernité européenne ; cela finit par faire des romans porte-voix d'une idéologie nauséabonde. Evidemment, l'auteur est un malin, chaque fois il se dérobe derrière son narrateur et échappe aux mains qui le veulent bien. C'est qu'il les soulage, il leur signifie que tout est permis dans les opinions."
Que les choses soient claires, je ne fais aucun procès d'intention à M. Jaworski, et je ne compare pas sa personne, ses intentions, ses opinions politiques ou autres que j'ignore et dont je me moque, à celles de M. Houellebecq. Il s'agit uniquement d'une analogie sur le point précis de s'abriter derrière un personnage pour justifier, dans les actes ou propos de ce personnage, les pires saloperies. Il se peut que l’auteur ait sciemment anticipé, prévu, calculé cette
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. Personnellement j'en doute. Cette scène, sur le plan littéraire, est très réussie, elle sonne comme un de celles qui vous sortent des doigts sans qu'on l'ait appelée, comme si le personnage lui-même l'exigeait. Ces moments-là, pour un écrivain, sont tout sauf un moment d'écriture ordonnancée, calculée. Plutôt ces moments assez stupéfiants , lorsque le fond nauséeux des pulsions passe de l'obscur à la clarté des mots, de l'indicible au dicible. Je peux me tromper, bien sûr. Sur cette scène de ce livre, c'était mon impression.
On ne fait pas de littérature avec des bons sentiments, c'est même tout le contraire, et c'est pourquoi Benevenuto m'a paru être un personnage somme toute bien classique. Il ne s'agit bien entendu pas de prôner la morale à tous les étages en littérature, de gentils héros, etc. ce qui serait d'une stupidité sans nom.
Mais moi, en tant que femme, et pas seulement, je ne peux pas regarder Tango à Paris, lire Nabokov, ou considérer Gagner la Guerre comme si je ne savais pas ce que je sais, comme si je n'avais pas subi, en tant que femme, tout ce que le récent "me too" a si bien fait ressortir. Ce non-dit qu'on regardait comme allant de soi et qui à présent me met hors de moi, et encore, quand j'imagine le nombre d'hommes lisant la scène de Gagner la guerre et en éprouvant un certain plaisir _ car oui, il faut assumer et ne pas être hypocrite, c'est aussi cela la vertu cathartique de l'art.
Ce qui prouve que le livre de M. Jaworski a touché quelque chose de vrai, d'affreusement humain, qui a trait au au bas-fond de la virilité, telle qu'elle paraît aujourd'hui inacceptable. A-t-il voulu la dénoncer, est-elle justifiée par un contexte? Peu importe, finalement, puisque ce qu'on interroge ici c'est un ressenti de lectrice.
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Tybalt a écrit :Iselle a écrit :Alors, mon point de vue de lectrice (et ça me permettra au passage de donner mon avis sur le roman). Je n’ai pas eu la moindre empathie pour Benvenuto dès le début de l’histoire. La scène que tu évoques Shalmy a failli me faire arrêter ma lecture. En plus de ça, il me semble que Benvenuto a une ou deux réflexions raciste et homophobe. A ce niveau, pour moi, ce n’est même plus un salaud, mais un rebut de l’humanité.
J'ai lu le roman depuis trop longtemps pour me souvenir à quelles remarques tu fais allusion : je serais curieux de savoir. En revanche, il me semblait que, quand Benvenuto évoque son passé et sa relation avec son ancien maître et professeur, il fait de lourdes allusions à une probable relation homosexuelle maître-disciple (qui fait très "Italie de la Renaissance", façon Raphaël, Léonard de Vinci ou Caravage). Cela n'exclut pas qu'il fasse des remarques homophobes ailleurs, mais ça montre qu'il a ses contradictions.
J'ai dû ressortir le livre pour retrouver exactement ce dont je me souvenais. Pour ce qui est du racisme, Benvenuto utilise plusieurs fois l'adjectif "moricaud" pour parler de Sassanos et des ressiniens. Peut-être que dans son monde à lui, c'est un mot tout à fait acceptable, mais pour moi il a un petit côté péjoratif, et par extension raciste, qui ne m'a pas du tout étonnée venant du personnage.
Pour l'homophobie, c'est dans la scène vers la fin
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Après, je veux bien admettre que j'ai mal interprété, que c'est le fait que j'ai détesté le personnage dès le début qui m'a fait le voir encore pire qu'il ne l'est. Mais d'un autre côté, est ce vraiment étonnant...
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Je suis en train de terminer "Gagner la guerre", et la discussion qui s'est engagée, intéressante, m'interpelle. Je m’immisce donc !
Benvenuto Gesufal EST, bien entendu, un salopard de la pire espèce, voire comme le dit Iselle, un rebus de l'humanité.
Mais vu son "métier", c'est tout de même loin d'être une surprise. Et sans vouloir faire une hiérarchie dans les crimes qu'on peut lui reprocher, il y a
Quant à sa misogynie, son homophobie et son racisme, j'aurais tendance à dire que c'est en lien avec l'époque décrite (une pseudo renaissance italienne), et donc de moindres arguments à son procès en pourriture. Son patron en particulier en est un autre en la matière, et il s'agit pourtant de la plus haute autorité de Ciudalia.
Donc pour ce qui est de ressentir de l'empathie pour ce personnage principal, je passe mon chemin ! Je peux le comprendre en raison de sa gouaille, mais il ne se passe pas 10 pages sans qu'on se dise que, non franchement, il est détestable, par ses actions ou ses pensées égocentriques.
C'est un peu comme vouloir aimer ou éprouver de la sympathie pour Tony Soprano ou Dexter.
Reste que comme dans ses séries, c'est très bien écrit et qu'effectivement, on peut s'y laisser prendre avant d'être salement douché par leurs faits et gestes.
Je vois par contre mal à quel moment on peut reprocher à l'auteur de faire l'apologie de son personnage ou à quel moment il serait complaisant avec l'attitude de son "héros" et pourrait nous laisser croire que cela traduit ses propres penchants ! (Avec une concession sur l'interprétation de la fin des remerciements sans doute, mais hors récit donc)
Vouloir absolument l'identifier à Benvenuto me semble tout aussi vain que de vouloir dissocier impérativement Céline de Bardamu.
Benvenuto Gesufal EST, bien entendu, un salopard de la pire espèce, voire comme le dit Iselle, un rebus de l'humanité.
Mais vu son "métier", c'est tout de même loin d'être une surprise. Et sans vouloir faire une hiérarchie dans les crimes qu'on peut lui reprocher, il y a
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Quant à sa misogynie, son homophobie et son racisme, j'aurais tendance à dire que c'est en lien avec l'époque décrite (une pseudo renaissance italienne), et donc de moindres arguments à son procès en pourriture. Son patron en particulier en est un autre en la matière, et il s'agit pourtant de la plus haute autorité de Ciudalia.
Donc pour ce qui est de ressentir de l'empathie pour ce personnage principal, je passe mon chemin ! Je peux le comprendre en raison de sa gouaille, mais il ne se passe pas 10 pages sans qu'on se dise que, non franchement, il est détestable, par ses actions ou ses pensées égocentriques.
C'est un peu comme vouloir aimer ou éprouver de la sympathie pour Tony Soprano ou Dexter.
Reste que comme dans ses séries, c'est très bien écrit et qu'effectivement, on peut s'y laisser prendre avant d'être salement douché par leurs faits et gestes.
Je vois par contre mal à quel moment on peut reprocher à l'auteur de faire l'apologie de son personnage ou à quel moment il serait complaisant avec l'attitude de son "héros" et pourrait nous laisser croire que cela traduit ses propres penchants ! (Avec une concession sur l'interprétation de la fin des remerciements sans doute, mais hors récit donc)
Vouloir absolument l'identifier à Benvenuto me semble tout aussi vain que de vouloir dissocier impérativement Céline de Bardamu.
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Je suis tout à fait d'accord quand au fait que le héros n'est en aucun cas le héraut de l'auteur (pardon, trop tentant), et que l'époque même fictive à laquelle prend place l'histoire, joue un rôle important 
C'est au contraire un point positif d'avoir un personnage en raccord avec son univers, même s'il en incarne les choses parmi les plus vulgaires. Cela laisse plus de liberté aux lecteurs de ressentir quelque chose, y compris négativement, fait plutôt rare dans les livres. D'habitude une morale revient toujours au triple-galop, ou bien un personnage héroïque pour contrebalancer tout cela...
Je me dis que je devrais essayer une relecture un jour, avec ces éléments en tête...

C'est au contraire un point positif d'avoir un personnage en raccord avec son univers, même s'il en incarne les choses parmi les plus vulgaires. Cela laisse plus de liberté aux lecteurs de ressentir quelque chose, y compris négativement, fait plutôt rare dans les livres. D'habitude une morale revient toujours au triple-galop, ou bien un personnage héroïque pour contrebalancer tout cela...
Je me dis que je devrais essayer une relecture un jour, avec ces éléments en tête...
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La BD n'a pas un topic dédié ? J'ai pas trouvé en tout cas.
J'ai lu ce premier tome cette semaine et j'ai bien apprécié. C'est une adaptation plutôt "sage", dans le sens où ça colle beaucoup au texte de Mauvaise Donne et que le dessin est assez classique pour de la BD franco-belge. Ca me paraît donc moins intéressant que le traitement qui a été fait pour la Horde du Contrevent.
Ceci dit, j'ai trouvé que la progression de l'histoire était très organique. J'ai souvent l'impression que les BD franco-belges qui doivent raconter de longues histoires dans des univers détaillés sont un peu contraintes par le faible nombre de pages et que tout va parfois trop vite. Là, j'ai trouvé que le rythme était bien tenu et surtout que la présentation de l'univers ne prenait pas le pas sur l'histoire. Et pourtant, au détour de quelques dialogues, d'une carte très bienvenue et de quelques flashbacks, on sent derrière l'univers vivant du Vieux Royaume.
Une bonne lecture pour ma part, mais plutôt du genre à emprunter en médiathèque qu'à faire une place définitive dans ma bibliothèque.
Le tome 2 devrait paraître le 20 septembre d'ailleurs. Curieux de voir si ça va enchaîner direct sur Gagner la Guerre ou si ça va faire le pont entre la nouvelle et le roman (vu la couverture, je pense qu'on va vite entre dans le vif du sujet).

J'ai lu ce premier tome cette semaine et j'ai bien apprécié. C'est une adaptation plutôt "sage", dans le sens où ça colle beaucoup au texte de Mauvaise Donne et que le dessin est assez classique pour de la BD franco-belge. Ca me paraît donc moins intéressant que le traitement qui a été fait pour la Horde du Contrevent.
Ceci dit, j'ai trouvé que la progression de l'histoire était très organique. J'ai souvent l'impression que les BD franco-belges qui doivent raconter de longues histoires dans des univers détaillés sont un peu contraintes par le faible nombre de pages et que tout va parfois trop vite. Là, j'ai trouvé que le rythme était bien tenu et surtout que la présentation de l'univers ne prenait pas le pas sur l'histoire. Et pourtant, au détour de quelques dialogues, d'une carte très bienvenue et de quelques flashbacks, on sent derrière l'univers vivant du Vieux Royaume.
Une bonne lecture pour ma part, mais plutôt du genre à emprunter en médiathèque qu'à faire une place définitive dans ma bibliothèque.
Le tome 2 devrait paraître le 20 septembre d'ailleurs. Curieux de voir si ça va enchaîner direct sur Gagner la Guerre ou si ça va faire le pont entre la nouvelle et le roman (vu la couverture, je pense qu'on va vite entre dans le vif du sujet).

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C'est au contraire un point positif d'avoir un personnage en raccord avec son univers, même s'il en incarne les choses parmi les plus vulgaires. Cela laisse plus de liberté aux lecteurs de ressentir quelque chose, y compris négativement, fait plutôt rare dans les livres. D'habitude une morale revient toujours au triple-galop, ou bien un personnage héroïque pour contrebalancer tout cela...
Quant à sa misogynie, son homophobie et son racisme, j'aurais tendance à dire que c'est en lien avec l'époque décrite (une pseudo renaissance italienne), et donc de moindres arguments à son procès en pourriture. Son patron en particulier en est un autre en la matière, et il s'agit pourtant de la plus haute autorité de Ciudalia.
J'ai loupé cette très intéressante conversation du coup j'arrive un peu après la bataille.
Mais ce sont des considérations très intéressantes qui me donnent envie de réagir.
Déjà le contexte: une pseudo Renaissance qui rendrait Benvenuto plus "acceptable".... vous pensez sincèrement que dans les milieux politiciens et crapuleux d'aujourd'hui c'est moins violent/impitoyable/bas du front (pour les aspects xénophobes, racistes, misogynes et homophobes)?
Benvenuto n'est pas un personnage hypocrite. C'est un assassin venu des bas fond d'une cité commerçante et puissante et l’exécutant des basses besognes de politiciens machiavéliques et amoraux. Comment pourrait-il être autre chose qu'un personnage amoral, brutal et égoïste?
En cela, c'est un véritable tour de force. J'aime ce genre de bouquin (ou autre support) qui nous "mettent le nez dedans" quant à l'hypocrisie de nos repères moraux.
Parce que ça ne nous dérange en rien de nous attacher à des personnages dans d'autres œuvres qui se drapent dans une moralité extrême mais qui n'hésitent pas à tuer eux-mêmes.
Un personnage d'assassin gentillet, sympathique et vertueux, comme on en croise dans les parties de jeux de rôle (et je rappelle que le Vieux Royaume a été conçu comme un contexte pour DeD, où le "roublard" bénéficie généralement d'un important capital sympathie auprès des joueurs), c'est un concept très hypocrite finalement. Jaworski nous balance à la figure son anti héros (qui s'en tire plus par une chance indécente que par ses qualités propres) qui remet pas mal les choses en place.
Surtout qu'en effet, on s'y attache au Benvenuto! Jaworski parvient à en faire un véritable salaud mais à nous le rendre plutôt sympa! Ce que j'y trouve d'intéressant, c'est que ce genre de personnage montre les limites, et l'hypocrisie, de nos valeurs morales que l'on croit bien acquises et ancrées. finalement on arrive à trouver sympathique un véritable fumier quand les choses nous sont présentées "de son côté". On nous balance à la figure toute notre subjectivité et notre morale à plusieurs vitesse (parce que nous vivons dans un monde très violent, dans sa globalité, mais très hypocrite, où on a tendance à faire l'autruche).
En effet, beaucoup de séries de Gangters reposent sur le même principe. Dans Sons of Anarchy, comment se fait-il qu'on éprouve autant de sympathie pour cette bande de brutes épaisses racistes, homophobes, misogynes à souhaits, meurtriers et bas du front?
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Enfin lu Le Sentiment de Fer. Toujours très bien. Toujours au-dessus du lot. Meilleur écrivain de fantasy française ever.
Plus tolkénien encore que les autres, avec des mages, des elfes, des nains et des gobelins à tous les étages (mais pourquoi donc toujours reprendre le même bestiaire??), alors que j'aurais tendance à préférer le Jaworski le plus réaliste (i.e. Ciudalia plutôt que le reste du Vieux Royaume), mais des personnages ambigus et une brutalité plus modernes, et un vrai talent d'écriture, malgré une diversité et une inventivité du vocabulaire un poil trop forcées.
J'ai particulièrement aimé "Profanation", ainsi que "Désolation". Ça peut sembler contradictoire avec ce que je dis plus haut, vu que cette nouvelle est la plus tolkénienne de toutes (La Moria + La Désolation de Smaug), mais justement : Jaworski modernise et actualise tout cela, il lui donne une saveur nouvelle.
Plus tolkénien encore que les autres, avec des mages, des elfes, des nains et des gobelins à tous les étages (mais pourquoi donc toujours reprendre le même bestiaire??), alors que j'aurais tendance à préférer le Jaworski le plus réaliste (i.e. Ciudalia plutôt que le reste du Vieux Royaume), mais des personnages ambigus et une brutalité plus modernes, et un vrai talent d'écriture, malgré une diversité et une inventivité du vocabulaire un poil trop forcées.
J'ai particulièrement aimé "Profanation", ainsi que "Désolation". Ça peut sembler contradictoire avec ce que je dis plus haut, vu que cette nouvelle est la plus tolkénienne de toutes (La Moria + La Désolation de Smaug), mais justement : Jaworski modernise et actualise tout cela, il lui donne une saveur nouvelle.
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Saint Graal a écrit :Je suis content que l'auteur revienne aux jeunes royaumes, j'espère que l'éditeur reviendra à une politique d'édition plus sage le concernant pour le prochain roman dans cet univers.
Chez Jaworski, c'est le Vieux Royaume. Les Jeunes Royaumes, c'est Moorcock et c'est dans Elric

Et le Vieux Monde, c'est dans Warhammer. C'est pourtant simple !
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Tybalt a écrit :Saint Graal a écrit :Je suis content que l'auteur revienne aux jeunes royaumes, j'espère que l'éditeur reviendra à une politique d'édition plus sage le concernant pour le prochain roman dans cet univers.
Chez Jaworski, c'est le Vieux Royaume. Les Jeunes Royaumes, c'est Moorcock et c'est dans Elric
Et le Vieux Monde, c'est dans Warhammer. C'est pourtant simple !
Oui, au mince, Moorcock s'est télescopé dans ma tête avec Jaworski !
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Dans la série des livres qui traînent dans ma bibliothèque depuis des lustres... Récits du Vieux Royaume !
Tout d'abord, le livre objet... je l'adore, bravo Folio SF, c'est un peu pour ça que je l'ai acheté au lieu de l'emprunter
Sinon, j'ai été disciplinée au début, j'ai commencé par le recueil de nouvelles : "Janua vera", que j'ai bien aimée, quoique la fin abrupte m'a laissée perplexe.
"Montefellone", je l'ai vite lâchée.
Puis "Mauvaise donne"... où j'ai fait la connaissance de cette crapule de Don Benvenuto. Comme j'ai bien accroché à la narration fleurie et à Ciudalia, j'ai filé droit vers...
Gagner la guerre !
Les tribulations de Benvenuto étaient vraiment succulentes à suivre. Je ne m'attendais pas à tomber dans un tel imbroglio d'intrigues et de politique, mais ce n'était pas pour me déplaire. Certes, c'est un enfoiré. Pur et dur. Il l'admet bien volontiers lui-même. Mais, à vrai dire, la quasi-totalité des personnages du roman sont un ramassis de pourriture à différents degrés, donc... on relativise assez vite !
Donc belle surprise pour moi !
Et j'ai fait ensuite un autre petit crochet du côté des nouvelles, mon dévolu s'est jeté sur "Comment Blandin fut perdu", quand j'ai vu que ça parlait de peinture. Belle histoire, même si les dernières pages m'ont laissée à nouveau un peu perplexe. J'ai un peu de mal avec le format nouvelle, je laisse les autres pour une autre fois
Tout d'abord, le livre objet... je l'adore, bravo Folio SF, c'est un peu pour ça que je l'ai acheté au lieu de l'emprunter

Sinon, j'ai été disciplinée au début, j'ai commencé par le recueil de nouvelles : "Janua vera", que j'ai bien aimée, quoique la fin abrupte m'a laissée perplexe.
"Montefellone", je l'ai vite lâchée.
Puis "Mauvaise donne"... où j'ai fait la connaissance de cette crapule de Don Benvenuto. Comme j'ai bien accroché à la narration fleurie et à Ciudalia, j'ai filé droit vers...
Gagner la guerre !
Les tribulations de Benvenuto étaient vraiment succulentes à suivre. Je ne m'attendais pas à tomber dans un tel imbroglio d'intrigues et de politique, mais ce n'était pas pour me déplaire. Certes, c'est un enfoiré. Pur et dur. Il l'admet bien volontiers lui-même. Mais, à vrai dire, la quasi-totalité des personnages du roman sont un ramassis de pourriture à différents degrés, donc... on relativise assez vite !

Donc belle surprise pour moi !
Et j'ai fait ensuite un autre petit crochet du côté des nouvelles, mon dévolu s'est jeté sur "Comment Blandin fut perdu", quand j'ai vu que ça parlait de peinture. Belle histoire, même si les dernières pages m'ont laissée à nouveau un peu perplexe. J'ai un peu de mal avec le format nouvelle, je laisse les autres pour une autre fois
