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Vraiment intéressant ce sujet. Pour ce qui est de se plaindre de son éditeur en public... ce n'est que mon avis mais je crois que la priorité est toujours de garder les querelles internes en interne, justement. Ne serait-ce que parce que lorsque l'on est auteur dans une maison d'édition, on la représente et c'est bien souvent se tirer une balle dans le pied que d'en dire du mal. Après, tout dépend justement de ce qui se déroule en coulisse : si l'on est face à une personne qui vous méprise etc il faut bien hausser le ton. Mais je crois que cela devrait être de l'ordre du dernier recours. D'abord, s'occuper des choses d'un point de vue légal. Il faut faire attention avec la diffamation sur internet.Et puis il y a aussi des auteurs qui se plaignent sans savoir, c'est pour ça que je suis méfiante. "Je n'ai pas eu mes droits d'auteur ce mois-ci, quel scandale !"... en même temps si ton contrat stipule que tu les as tous les ans, malgré un grand succès, c'est le contrat de base signé, point barre. On peut toujours renégocier pour la signature du suivant. Alors bien sûr, ça va dans les deux sens, l'éditeur peut aussi être négligeant et avoir zappé la date de remise des droits d'auteurs...Les relations auteur/éditeur sont bien complexes... l'éditeur est quelqu'un qui va croire en votre manuscrit, mais exiger des remaniements, cela peut devenir le pire ennemi comme le meilleur ami. Soit une ombre inconnue dans une énorme structure, soit quelqu'un que l'on est amené à voir souvent dans les maisons d'édition petites et familiales. De toute façon, et c'est mon impression, mais j'ai le sentiment qu'il est plutôt rare de voir des auteurs publiés épanouis et heureux de leur maison d'édition (je parle en terme de généralité et d'observation, hein ^^ Moi je suis très bien où je suis ^^). Tout simplement parce que si la publication représente un aboutissement, c'est aussi une désillusion : être confronté aux corrections, aux remaniements, aux délais, aux négociations, à la couverture, à la promotion, au succès ou au non succès... il y a forcément des frictions. Chacun les vit plus ou moins bien. Parfois les tensions s'évaporent au moment de la sortie, parfois pas. Car si l'auteur est dans le domaine de ce qui est l'intime, une part de soi dévoilée au public, un bébé mis au monde après bien des efforts, si lui attend la sortie avec impatience, ce n'est pas vraiment le cas du reste du monde (en tout cas pour un premier roman ^^). Il y a donc forcément une part de déception.Et la promotion, la mise en avant, c'est tout sauf évident. J'ai une amie chez Hachette qui n'a pas fait long feu dans les rayons de la fnac alors que mon roman est encore d'actualité après 9 mois chez un tout petit éditeur... allez comprendre. En fait, c'est tout simplement la situation actuelle du livre que déplore les auteurs actuels : vous sortez un roman, à moins d'un grand succès rapide, il restera d'actualité 2 ou 3 mois dans les FNACS et librairie, et après les nouveautés. Evidemment certaines librairies indépendantes ne fonctionnent pas ainsi, mais c'est tout de même la loi de la course à la nouveauté, toujours la nouveauté.Que les éditeurs soient accusés de mercantilisme, eh bien il faut bien faire tourner sa maison d'édition. Et pour ça il faut des grands noms pour avoir un noyau de lecteurs assuré, et ne pas faire faillite. Parfois même avoir assez d'argent pour publier des romans moins populaires. Après il y a une question de respect : arrêter une série en cours parce qu'elle ne marche pas, c'est vraiment n'avoir aucun scrupule vis-à-vis des personnes ayant acheté les premiers tomes et de l'auteur.L'auto édition, le compte d'auteur... franchement quand je vois comment des auteurs même publiés dans de grandes maisons d'édition rament pour trouver de la crédibilité et leur public, j'ai du mal à imaginer comment c'est possible par ce type de publication. Ça ne signifie pas que ce ne serait pas pour autant de mauvaise qualité, bien au contraire, mais en revanche sans les grands canaux de communication ça paraît sacrément difficile.Désolée pour ce pavé !

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Tiens, un commentaire intéressant de Fabrice Colin sur son blog hier :
L'écriture du tome 3 des Etranges Soeurs Wilcox est quasi terminée, du moins en ce qui concerne le premier jet. Comme (presque) toujours, les périodes de satisfaction intense ont alterné avec les phases de doute morose. Je crois que j'envie les écrivains capables de servir, à leur éditeur, un manuscrit "fini" sur un plateau : moi, j'ai besoin qu'on me dise qu'il y a des problèmes, qu'on me mette des coups de pieds au cul. Certainement, quelque chose d'assez infantile palpite au coeur de ce besoin. Mais je ne peux m'empêcher de penser qu'ici, en France, les romans de nombreux écrivains "pour adultes" manquent cruellement d'un regard extérieur - de même que certains albums manquent d'un producteur digne de ce nom. Sont-ils censés être du-premier-coup-parfaits ? Cette constatation me ramène à une discussion sur le numérique que j'ai pu avoir hier soir avec une sympathique journaliste : en termes de travail éditorial, la perspective d'être seule maître à bord ne me stimule nullement et, en vérité, n'est pas loin de m'horrifier.

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C'est intéressant car quelque part je me sens moins seule :D Je suis loin d'être aussi douée avec les mots que Fabrice Colin mais j'ai le même soucis rédactionnel et le même besoin de coup de pieds au cul ! Plus sérieusement, je pense qu'effectivement, certains auteurs auraient besoin de plus de relectures extérieures. Cela ne remet pas en cause la qualité du travail, mais ça évite les "raccourcis" et l'enfermement de l'auteur. Un peu de recul est toujours bénéfique.

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Comme beaucoup de métiers d'artistes "créateurs", pour percer et gagner "un peu", il faut avoir un réseau (s'en constituer un c'est déjà du boulot), se faire connaître (via le dit réseau, les salons, les expositions, internet...), être patient, avoir du talent, trouver son public, garder le plaisir de créer même si cela ne paye pas (et sans savoir si cela payera un jour)... et avoir de la chance : celle de trouver la bonne personne dans le réseau, celle de trouver un public, celle du "bon endroit au bon moment", celle d'être rémunéré (à minima).D'innombrable candidats dans la création artistique (écriture ou autre) et peu d'élu. Et pour les élus on ne parle pas forcément de ceux qui en vive. Faut-il distinguer les auteurs qui sont créateurs de leurs univers et produisent ce qui leur plaît, ce qui provient d'eux (même si cela répond à une "commande" tout en restant libre de ce qu'il veulent écrire), des auteurs qui sont plutôt "salariés" et produisent des écrits sur des sujets convenus (avec cahier des charges), en série, sans forcément de qualités originales, ne se rattachant pas à leur imaginaires ou désirs personnels d'écriture, afin de répondre à un segment de marché (de leur éditeur) qui se vend bien ?Est-ce qu'une telle distinction est d'ailleurs pertinente (ou une vue de l'esprit de ma part) ?

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même sans être créateur tous les métiers d'artistes sont dans la même galère... moi je vois ce qui se passe au niveau des acteurs. Il y a les piéces pour le plaisir et faire des choses pour faire bouillir la marmite . Par ex, un de mes profs fait des cours pour son plaisir (vu le peu que c'est payé) et il a fait la voix-off du jeu "le cube" pour manger. Les métiers artistiques c'est tellement rude que parfois il vaux mieux accepter de faire tout ce qui se présente pour se faire connaitre, que de manger de la vache enragée. J'ai une amie dessinatrice/coloriste BD... en ce moment c'est bien rude au niveau des éditeurs alors elle prend toutes les propositions qui se présentent. N'oublions pas que Balzac, Dumas, etc... écrivaient pour des journaux et que les longues descriptions ça permettait de remplir ! Est-ce pour ça que le résultat est mauvais ?

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L'exemple de Balzac est intéressant. En parallèle de ses romans réalistes ( qu'il considérait comme alimentaire), il écrivait des romans gothiques sous pseudonymes ( je ne me souviens plus du pseudonyme en question d'ailleurs). Et dans le lot il y a au moins un roman de vampire ( qui doit être le premier roman de vampire en français). Il faut se souvenir que ce qu'aimait faire Corneille c'etait les comédies , les tragédies c'était alimentaire.

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Si certaines et certains veulent discuter des attentes des éditeurs, de comment leur vision trop "précise" de ce qu'il faut écrire (si c'était l'idée ?) les privent peut-être parfois de surprises et autres, c'est par ici !

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En 2009 j'ai assisté à une table ronde où intervenait Fabrice Colin. Ce dernier avait fait partie un court moment du comité de lecture Bragelonne. Il racontait recevoir des romans qui possédait des univers très originaux mais des intrigues classiques. Et de conclure, tout ça pour ça. Comme si univers original devait correspondre à intrigue originale. Comme si l'on ne pouvait pas faire un roman de high fantasy dans un univers très éloigné des codes du medfan classique.
Je pense au contraire que ça peut être intéressant. Ne pas oublier qu'en fantasy à monde secondaire, le monde est le premier personnage et donne la coloration au récit.
Je pense qu'on peut partir sur les mêmes archétypes que la BCF mais les rendre tellement méconnaissables que ça donnera une œuvre intéressante.
J'attends l'auteur qui mêlera les influences de Dumas et de Vance pour faire une vraie fantasy made in France qui sorte un peu de l'ordinaire.