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Coucou,

Je créé un topic ici car j'avoue ne pas savoir trop où ça irait, et si ça a déjà été partagé, veuillez m'en excuser, je ne l'ai pas vu passer.

Je viens de tomber sur cet article, récent, qui a priori n'a rien d'une blague (l'événement décrit date du 1er avril) et que je trouve passablement inquiétant.
Premièrement parce que ça n'a reçu (quasi) aucun écho en France ou ailleurs en dehors de l'Italie.
Secondement parce que ça augure de beaucoup, beaucoup de problèmes dans le futur.

Je ne connais pas le média, il a l'air fortement orienté.
Une rapide recherche sur Google m'a confirmé que la situation n'avait pas été relayée en France hormis cet article de France Culture qui élargit un peu le propos.

En avez-vous entendu parler ?
Qu'en pensez-vous ?
"Il n'existe rien au-dessus du métier de bibliothécaire" Terry Pratchett

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Oups, merci pour la redirection, j'avais malencontreusement dupliqué deux fois le même lien. C'est modifié :)

Et j'avoue que j'ai du mal à l'avaler aussi. Ça pourrait rapidement déraper et créer un précédent dangereux, y compris ici où le statut légitime des auteurs est toujours en questionnement.
Si le moindre dialogue de fiction d'un personnage de roman peut être exploité juridiquement et pénalement, ça peut facilement dériver vers l'auto-censure...
"Il n'existe rien au-dessus du métier de bibliothécaire" Terry Pratchett

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Je n'avais pas du tout vu passer l'info, merci pour le partage. Je trouve le fait d'utiliser des propos qui relèvent de la fiction comme preuve à charge contre un auteur très inquiétant. Une fois qu'on s'engage sur cette pente-là, jusqu'où peut-on glisser ?

Ça me fait penser au cas d'Yvan Godbout, qui avait été évoqué dans le podcast sur l'imaginaire au Québec. Il avait été accusé de production de pornographie juvénile à cause d'une scène d'un de ses livres. On en vient à dire que ce qui est décrit dans une œuvre de fiction serait préconisé par l'auteur. Si on va par là, tous les auteurs de polars seraient des sadiques en puissance. Je caricature mais j'ai l'impression que c'est une tendance qui s'accentue.

En revanche, je trouve cette citation de l'article de France Culture intéressante :

Pour Cécile de Bary, il y a d'une part des fictions à thèse, et d'autre part des fictions qui fonctionnent uniquement par leur récit. Elle cite à ce titre Le Juif Süss, un film de 1940 réalisé par Veit Harlan, dont le propos porte un discours argumentatif et où les comportements de certains personnages correspondent à des mythes antisémites. Ainsi, cette fiction corrobore des discours antisémites, ce qui a mené le réalisateur à être poursuivi en justice.

On peut donc dresser quelques exceptions pour ces "fictions à thèse". Je pense que selon un contexte précis et selon les intentions avérées de l'auteur de faire l'apologie de quelque chose de condamnable, une œuvre de fiction pourrait être retenue contre lui, par exemple ici un film qui met en scène les clichés antisémites pendant la Seconde Guerre mondiale. Je pense aussi aux livres de Gabriel Matzneff, où il met en scène ses expériences pour faire explicitement l'apologie de la pédophilie, ce qu'il défend en plus ouvertement en interview. On voit clairement qu'il ne se contente pas d'écrire de la fiction, mais qu'il utilise ses œuvres avec l'intention de défendre quelque chose de condamnable, et dans ce cas-là je trouve normal qu'elles soient utilisées comme preuves dans les accusations plus générales dont il fait l'objet.

Mais ces cas-là restent justement des cas particuliers. Sauf exception, je trouve donc dangereux de faire intervenir la fiction dans le réel pour condamner un auteur.

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Et on est toujours dans la question : l'humain, l'auteur, quelle part de chacun dans le livre ?
Peut-on être un écrivain admirable et une crapule ? Faut-il chercher sous la plume des intentions ?
L'auteur prend t il du plaisir à pervertir ses personnages ?

Ces exceptions dont tu parles, ça suppose un minimum d'enquête à chaque fois pour déterminer si on est dans le cadre général de la fiction inventée ou de la fiction expérimentée/désirée.

Combien d'auteurs décrivant une scène de torture l'ont réellement expérimenté et y ont pris de la satisfaction ? (J'ai lu assez pour voir qu'une part des tortionnaires de fiction sont de gros sadiques, mais leurs auteurs sont adorables).

En apparence.

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Foradan a écrit :Ces exceptions dont tu parles, ça suppose un minimum d'enquête à chaque fois pour déterminer si on est dans le cadre général de la fiction inventée ou de la fiction expérimentée/désirée.

Tout à fait. Dans ces cas-là, je pense qu'il ne faut pas s'appuyer uniquement sur l’œuvre mais sur les prises de positions de l'auteur, ses déclarations, etc.

Mais bien sûr, je pars toujours du principe qu'on dissocie l'auteur de ses personnages.