Voici un sujet des plus intéressants ! Que j’observe depuis deux ou trois jours. ;)Je n’ai pas l’impression qu’on puisse développer une façon « originale » de guérir.Parce que le
guérisseur, de mon point de vue, est forcément déjà magicien ou sorcier.C’est clair quand on se réfère aux sociétés plus ou moins primitives dont la Fantasy s’inspire.Que l’on pense tout de suite à nos druides ou aux chamanes sibériens, il faut bien constater que celui qui peut guérir est également celui qui est chargé du contact avec les divinités, du culte envers les ancêtres. En charge de tous les rituels magiques. Dans le monde médiéval, la médecine officielle et savante est enseignée, mais elle est essentiellement urbaine. Réservée aux rois, aux puissants de ce monde. Quatre-vingt-dix pour cent de la population n’y ayant pas accès (cette situation se prolongeant presque jusque l’époque moderne), le peuple donc, et sans doute la petite noblesse, pour faire face à ses problèmes de santé a recours aux guérisseurs, rebouteux, mages ou autres figures plus ou moins sentant le soufre, mais hauts en couleur.Malheureusement, dans des sociétés où
une grande partie de la population est capable de manifester un pouvoir magique, celui ou celle chargé de réparer les dégâts d’une bataille, d’un conflit, va se trouver tout de suite beaucoup moins mis en valeur que dans la vraie vie.

Je précise tout de suite que la fonction du guérisseur n’est pas seulement de réparer les côtes froissées, les fractures ou les ecchymoses. Bien souvent, il ou elle est amené à contrebalancer un envoûtement ou une action magique qui a mal tourné. Ninaeve, qui a été citée, est ainsi amenée
► Afficher le texte
à faire annuler les effets d'une décision hiérarchique contestable, ce qui peut permettre de remettre en scène des personnages importants. Et là, elle est bien loin de ses herbes et potions. C’est une magicienne exceptionnelle (difficile de faire sa place dans ce monde-là) et, du coup, ce qu’elle accomplit, apparaît presque comme miraculeux (incompréhensible pour nous, sauf à s’accrocher à son évolution au fil de la narration).
Bon, elle intellectualise le processus, mais Jésus serait-il capable de faire le même truc en mode : « même plus capable de souffler dans l’alcootest après les noces de Cana » ?Après ce cas de guérisseuse-héroïne aux limites du possible, il est indéniable que les auteurs de Fantasy ont du mal à positionner ces personnages dont le genre ne peut se passer, mais qui figurent cependant largement au second plan, voire plus, après les héros combattants.Jusqu’à la dépréciation. Ainsi, dans ma dernière lecture, « La Trilogie des Joyaux » de David Eddings, Séphrénia, une puissante magicienne, est capable
► Afficher le texte
de « rafistoler » quelques-uns des héros testostéronés qui l’entourent avec des moyens limités comme les herbes, les simples. Pourtant, dès que la compagnie arrive en ville, on amène les blessés au médecin. Pourtant, à ce moment critique, elle tient à assister à la consultation et à contrôler si tout est fait dans les règles de l’art ! Bon, faut pas froisser l’éthique dominante.
Maintenant, si l’on prend une société où cent pour cent des membres pratique la magie, je me tourne vers Poudlard.Là, dans un décor d’infirmerie de collège, avec deux ou trois lits bancals, Madame Pomfresh est capable
► Afficher le texte
de faire repousser des os à Harry. Elle peut annuler l’influence d’un philtre d’amour, combattre l’effet du Basilic qui a pétrifié Hermione et d’autres étudiants, aider le professeur Lupin à régler ses problèmes de lycanthropie…
Donc, entre héros ou héroïnes surpuissants et maîtrisant parfaitement les techniques de guérison et personnages anecdotiques nous donnant l’impression qu’ils agissent au petit bonheur la chance, il me semble que les auteurs ont quelques difficultés à positionner les
« réparateurs magiques » dans un monde où
tout est déjà magique. Les guérisseurs en Fantasy s’étalonnent du mage inspiré au service après-vente de Darty.Ce qui n’empêchera pas, suivant notre humeur et selon la façon dont les auteurs auront mené leur narration et leur intrigue, de trouver ou non originale leur façon d’exercer.
