Venant de terminer le tome 6 de La Roue du Temps, je vais en profiter pour donner un avis sur le cycle titanesque de Robert Jordan, du moins ce que j’en ai lu jusqu’à présent.
J’ai commencé la lecture du cycle il y a deux ans et pour le moment je ne suis pas déçu du voyage. Je cherchais une série de fantasy épique qui le soit réellement, avec un worldbuilding poussé, des intrigues et enjeux complexes, un groupe de personnages que l’on prend plaisir à retrouver et voir évoluer au gré du récit. Je peux dire que, pour le moment, j’ai été servi !
Dans le détail :
L’œil du Monde : Comme cela a souvent été dit, un premier tome en effet classique (très communauté/fraternité de l’anneau). Cependant, le classicisme n’est à mon sens pas mauvais en soit (tout comme l’originalité à tout pris n’est pas nécessairement gage de qualité), surtout si l’exécution est bonne. Ce qui est le cas dans ce premier tome, selon moi. Donc classique mais très bien fait et plaisant à lire (je me rappelle l’avoir lu très rapidement en définitive). Et quelques éléments indiquent déjà un univers et une histoire au potentiel plus large qu’une simple variation de l’œuvre de Tolkien (les Chemins, shadar logoth, etc).
La Grande Chasse : le tome qui m’a vraiment fait aimer le cycle ! On s’éloigne cette fois de Tolkien et Jordan complexifie considérablement les enjeux et son univers (l’idée assez hallucinante du « monde qui pourrait être », l’introduction des Seanchaniens et des A’ dams, etc). Chaque chapitre semble vouloir en rajouter ! De plus, le tome étant le récit d’une longue poursuite, les péripéties s’enchaînent et permettent d’installer un sentiment d’urgence, tout en développant l’univers, les personnages et les enjeux dans l’action. J’aime justement la façon dont Rand évolue dans l’action durant ce tome, devenant un « seigneur »
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et surtout le Dragon réincarné
à ses dépends.
Il y a beaucoup de passages qui m’ont marqué et que j’adore dans ce tome.
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Rand tentant d’échapper aux Aes Sedai dans Fal Dara, la révélation des machinations de Moiraine et Siuan Sanche, la confrontation de Rand avec Siuan Sanche, l’évasion de Padan Fain, les passages assez surréalistes des « visions en boucle » de Rand, le voyage dans le « monde qui pourrait être », l’épreuve de Nynaeve, le voyage via la Pierre où chacun va vivre une infinité d’existences possibles, tout le final à partir du moment où Egwenne est capturée par les seanchaniens.
L’un de mes finals favoris de la saga, pour le moment
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la mission de sauvetage d’Egwene d’un côté qui se télescope avec la récupération du cor de Valère, pour devenir une énorme bataille convoquant les héros de légende, le tout surplombé par l’affrontement cyclopéen de Rand et du ténébreux ! Whaou ! (Et une Nynaeve au sommet de sa forme, qui n’a malheureusement jamais retrouvée cet état de grâce, pour l’instant).
L’un des mes tomes préférés !
Le dragon réincarné : Un tome que j’ai apprécié mais moins que les précédents. J’ai d’ailleurs bizarrement du mal à me l’expliquer, quand j’y repense, n’arrivant pas à mettre le doigt sur ce qui m’a moins plu. Je trouve cependant très intéressant que Rand soit quasi absent en tant que narrateur (
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nous donnant vraiment le sentiment qu’il est au bord de la folie,
et permettant aux autres personnages d’être plus mis en valeur), la présentation de Tel Aran Rhiod,
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la traque de l’ajah noire par Egwene, Nyaneve et Elayne
, et j’apprécie l’évolution de Perrin et Mat (qui devient enfin réellement intéressant). Et le final
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dans la Pierre de Tear
, bien qu’attendu, demeure efficace (sans égaler le précédent). Non, j’ai vraiment du mal à savoir pourquoi je l’ai moins apprécié, peut-être lu au mauvais moment.
Un Lever de Ténèbres : Pour le moment, il s’agit de mon tome préféré ! Bien que très volumineux, je n’arrivais tout simplement pas à le lâcher. C’est sans doute le tome qui contient le plus de passage qui m’ont marqués.
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J’adore la scène où Lanfear révèle son identité à Rand, leur confrontation alors que la Pierre de Tear est attaquée, Rand qui tente de ramener à la vie la cadavre d’une jeune fille, les deux voyages de Mat via les portails des Serpents et des renards (faisant de lui un personnage toujours plus passionnant), l’épreuve de Ruidean (l’idée de remonter le temps de générations en générations, du présent au passé, est vraiment géniale ; l’un de mes chapitres préférés du cycle), Perrin apprenant le massacre de sa famille (bouleversant et superbe), la formation d’Egwenne à Tel Aran Rhiod, la libération et bataille de Deux-Rivière (Perrin est devenu un de mes personnages préférés avec ce tome), tout ce qui a trait à la culture Aiel (qui, pour mon plus grand plaisir, me rappellent furieusement les fremens de Dune), le combat Moghedien / Nynaeve, Rand confrontant les aiels et provoquant la sidération, etc, etc.
Ce tome est génial !
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Et j’aime vraiment la manière dont Jordan traite le thème de l’élu. Cela ne se limite jamais à : « je suis l’être le plus puissant du monde qui va mettre une branlée aux forces du mal ». Il y a une vraie réflexion et complexité développée autour de ce thème. Que ce soit via l’épée de Damoclès de la folie qui guette Rand. Ou les choix qu’il est obligé de faire (utiliser les autres, y compris ses amis, tels de pions), devenant parfois un salaud froid et calculateur.
Les Feux du Ciel : Un bon tome, mais plus en dents de scie. Tout ce qui concerne Rand, Mat, Egwenne, Moiraine et les Aiels m’a beaucoup plu.
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J’aime beaucoup la poursuite avec les Shaido, jonchée des charniers de leurs exactions, Aviendha et Rand téléportés au Seanchan, la bataille de Cairhien, son poids pour Rand, Mat qui y devient un véritable meneur d’homme à son corps défendant (jouissif), Rand épuisé au point de ne pas se rendre compte que la bataille est terminée, le combat Lanfear/Rand/Moiraine, le final assez inattendu contre Rahvin à Caemlyn.
Par contre, la partie Nynaeve et Elayne est vraiment beaucoup moins bonne. Elle condense, je trouve, pas mal des défauts de Jordan. Il y a des bons passages et des choses intéressantes (notamment ce qui concerne Birgitte et Moghedien). Mais c’est inutilement long et répétitif, surtout concernant les états d’âme de Nynaeve. Je pense comprendre ce que voulait faire Jordan :
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c’est en gros le livre de la douche froide pour Nynaeve, qui va enfin comprendre qu’elle n’est plus sage-dame,
mais la façon de le raconter est assez maladroite
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(cette excuse narrative de Nynaeve qui voit le nom de Salidar et l’oublie pendant tout le livre… Parce que Jordan ne veut vraisemblablement pas qu’elle y arrive avant que tels autres évènements se soient déroulés)
. Surtout, Nynaeve devient vraiment une caricature d’elle-même dans ce tome. C’est dommage, car je l’appréciais vraiment au départ (surtout dans le deuxième), j'espère que Jordan arrivera à redresser la barre la concernant (c'est un peu mieux dans le 6, mais il y a toujours de passages agaçants). Et enfin, je ne suis vraiment pas fan de l’idée de la Ménagerie…
Le Seigneur du Chaos : je viens de le terminer, donc j’ai forcément moins de recul. J’ai beaucoup aimé le tome, même si j’ai l’impression que globalement le rythme de progression du récit ralenti. Et en même temps, Jordan semble vouloir complexifier ce dernier encore plus, rajoutant des complots (et des personnages) dans tous les sens. Tous les passages avec les Rejetés sont très chouettes
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et me semblent remettre en perspective les tomes précédents : et si les réussites de Rand jusqu’ici faisaient parties des plans du Ténébreux
, ce qui concerne la tour noire et Mazrim Taim aussi.
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J’aime aussi la façon dont on nous montre que Rand a généré un chaos quasi absolu, un peu partout.
Les difficultés à gérer le pouvoir et les enjeux politique.
Le fait que les personnages principaux ont cette fois presque tous effectué leurs mues. Etc.
J’ai tout de même le sentiment que ce tome sert plus de mise en place à beaucoup, beaucoup, d’éléments/d’intrigues qui vont être développés ensuite (en un sens, il m’a rappelé les tomes 4 et 5 du Trône de Fer). Il se passe beaucoup de choses, mais peu sont menées à leur terme (néanmoins, ce qu’elles laissent entrevoir pour la suite fait clairement envie). Par contre, quel final !! Les 100 dernières sont un pur plaisir.
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Et la bataille des puits qui vient les conclure est démentielle !! Sans doute la meilleures scène de bataille du cycle pour le moment.
Peut-être le meilleur final aussi (mais je manque de recul
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).
Voilà… Au terme de ce sacré pavé que dire de plus à part que La Roue du Temps a désormais une place de choix dans mon cœur. Il y a des défauts (qui ont malheureusement tendance à s’accentuer au fil des tomes), mais ils ne m’empêchent pas d’adorer ce cycle, sa démesure, ses personnages et ses thèmes.
Et comme à chaque fois que je termine un tome, je n’arrive pas à me l’enlever de la tête et je n’ai qu’une hâte, lire le suivant ! À suivre avec le septième dans quelques mois (même si j’ai cru comprendre que je vais entamer LE ventre mou de la série) !