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Et vous qu'en pensez-vous ?
PAR LLOYD CHÉRY
Modifié le 24/05/2019 à 19:44 - Publié le 24/05/2019 à 13:45 | Le Point.fr
Alors que la production nationale n'a jamais été aussi abondante, les best-sellers se font de plus en plus rares. Mais que se passe-t-il ?
La fantasy ne s'est jamais aussi bien portée, à en juger le triomphe de Game of Thrones avec ses records d'audience et ses 85 millions d'exemplaires vendus (dont 4 millions dans l'Hexagone). Autrefois cantonnée à un cercle de connaisseurs, elle jouit désormais d'une popularité mondiale et prend toujours plus de place en librairie et sur les écrans (À la croisée des mondes cette année, La Roue du temps et la série dérivée du Seigneur des anneaux très bientôt...). Mais ce succès croissant ne semble pas bénéficier à la production nationale. « La plupart des gens ne sont pas capables de citer un seul titre français », regrette l'universitaire Anne Besson, qui a dirigé le Dictionnaire de la fantasy. Alors qu'ils dévorent les bouquins de George R. R. Martin, Robin Hobb, David Eddings ou encore Terry Pratchett, les Français méconnaissent leurs propres auteurs. On sait bien que « nul n'est prophète en son pays », mais tout de même, comment expliquer qu'aucun roman de fantasy française ne soit parvenu à dépasser les 100 000 exemplaires ces dix dernières années ?
Pour Stéphane Marsan, président des éditions Bragelonne, le problème est ancien : « Si on compare avec les Anglo-saxons, la France a eu cinquante ans de retard. » Il est vrai qu'en matière de fantasy tout, ou du moins beaucoup de choses, est parti d'Angleterre. Et que notre pays a pris son temps pour rejoindre le mouvement, en témoignent les dates de traduction du Hobbit et du Seigneur des anneaux, publiés en 1937 et 1952 outre-Manche, mais seulement en 1969 et 1972 chez nous. Il faut attendre les années 1980 pour voir émerger une première école française avec Michel Grimaud (Malakansâr), Christian Charrière (La Forêt d'Iscambe), Jacques Abeille (Les Jardins statuaires) et Michel Pagel (Les Flammes de la nuit). Quinze ans plus tard, la fantasy française prend néanmoins enfin son essor : les éditions Mnémos, créées en 1996, puis Bragelonne, en 2001, font décoller les ventes auprès du grand public. Des écrivains notables comme Mathieu Gaborit, Pierre Pevel et Jean-Louis Fetjaine font leurs apparitions tandis que Le Cycle de Ji, de Pierre Grimbert, et La Moïra, d'Henry Loevenbruck, dépassent les 100 000 exemplaires, notamment grâce aux ventes des poches (qui représentent de façon générale 80 % des ventes par rapport au grand format). « On découvrait une fantasy française de qualité avec des romans populaires et grand public », expose Anne Besson. Au même moment, Harry Potter fait sauter les frontières de la littérature jeunesse et de la fantasy. Avec son adaptation cinématographique et celle du Seigneur des anneaux, c'est le genre tout entier qui explose, entraînant une ruée vers l'or.
De nouvelles collections et maisons d'édition se lancent alors dans la bataille pour le meilleur et pour le pire. « Il y a eu une inflation à cette époque qui a été au service de la quantité et non de la qualité », se remémore Stéphane Marsan. On assiste alors à un « émiettement du marché éditorial », pour reprendre les mots d'Anne Besson. Or, « à part Bragelonne, quasiment tous les éditeurs d'imaginaire français sont de petites maisons, ce qui n'aide pas pour faire de la communication à grande échelle ». Michel Robert est le dernier Français à connaître un succès massif pour sa saga L'Agent des ombres, écoulée depuis 2004 à 190 000 exemplaires. Seule la littérature jeunesse gardera le vent en poupe avec Erik L'Homme (plus de 700 000 exemplaires vendus pour Le Livre des étoiles) ou encore Pierre Bottero (La Quête d'Ewilan), avant d'être plus ou moins « remplacée » (peut-on parler de remplacement pour des genres aussi proches, le deuxième étant né du premier) par le young adult et des auteurs comme Christelle Dabos (400 000 exemplaires pour la série du Passe-Miroir).
Lire aussi « Aujourd'hui, écrire du Seigneur des anneaux serait démodé »
44 maisons d'édition, 1 486 publications par an
On peut invoquer plusieurs facteurs pour expliquer ce basculement du public. Comme on l'a dit plus haut, l'émiettement du marché éditorial rend les choses plus complexes pour un auteur de fantasy française. Depuis la fin des années 1990, les titres anglo-saxons (venus de Grande-Bretagne et d'Amérique, mais aussi du Canada, d'Australie et d'autres pays anglophones) arrivent massivement en France avec des moyens publicitaires bien plus conséquents. Gilles Dumay, d'Albin Michel Imaginaire rappelle que, contrairement au polar ou à la littérature générale, la fantasy ne bénéficie jamais de campagne promotionnelle de grande envergure. « Aucun éditeur français de fantasy n'a pour l'instant de budget marketing de 100 000 ou 50 000 euros. Quand on dispose de 10 000 euros pour faire un lancement, c'est inespéré. » Ne pas avoir les moyens de communiquer correctement alors même que la production n'a jamais été aussi abondante, voilà qui pose forcément problème. « Le nombre de parutions a quasiment doublé en 15 ans, mais la place dans les librairies n'a pas augmenté », précise l'éditeur d'Actu SF Jérôme Vincent. « Les libraires n'ont pas le temps de tout lire et se retrouvent à faire des économies pour gérer aux mieux leurs trésoreries. Rien que pour le marché de l'imaginaire, nous avons 1 486 publications annuelles pour 44 maisons d'édition. » Problème connexe à la toute-puissance du marché anglophone : comme il se suffit à lui-même, il ne va pas chercher ailleurs. Même les meilleurs titres de fantasy française ont dû mal à obtenir une traduction pour se faire une place à l'international. « Si on fait des romans trop originaux, les Anglo-Saxons ont peur que ça ne se vende pas. Et, sinon, ils estiment avoir déjà tout chez eux », résume la directrice des Imaginales Stéphanie Nicot. Interrogé à l'occasion de notre hors-série sur la science-fiction, Orson Scott Card pointait aussi du doigt une différence fondamentale qui n'arrange pas les choses : « La littérature européenne est beaucoup plus descriptive et philosophique, c'est une façon complètement différente d'écrire. Les Américains mettent l'accent sur l'histoire avant tout : voilà ce qu'il se passe et pourquoi. Alors que les Français vont décrire, les vêtements, faire des métaphores, etc. Ce qui les rend difficiles à lire pour un public américain habitué à aller directement à l'histoire. »
Autre point sur lequel tout le monde s'accorde : le manque de considération des médias généralistes. Malgré les chefs-d'œuvre qu'elle a produits, la fantasy reste encore sous-estimée et n'est que très rarement prise au sérieux par la presse. « Quand il s'intéresse à l'imaginaire, le monde médiatique se penche surtout sur la science-fiction publiée par des maisons d'édition généralistes », regrette Jérôme Vincent. « La fantasy ne représente que 10 % des articles consacrés aux littératures de l'imaginaire (lesquels ne représentent que 3 % des articles toutes littératures confondues). » Les auteurs de science-fiction célèbres comme Bernard Werber, Michel Houellebecq (qui sont « marketés » comme des écrivains de littérature générale) et plus récemment Alain Damasio sont pratiquement les seuls à bénéficier de critiques et d'interviews régulières. « Vous ne verrez aucun auteur de fantasy à la télévision », regrette Stéphane Marsan. Ce dernier reconnaît toutefois que « la culture éditoriale de la spécialisation » mise en place par les éditeurs du genre n'a pas aidé. « Je pense qu'on a merdé, moi comme les autres », expose-t-il franchement. « Pendant très longtemps, j'ai dit : “Je suis un éditeur de fantasy, avec des couvertures fantasy, au rayon fantasy, pour les lecteurs de fantasy”. Il ne faut pas s'étonner après que cela ne dépasse pas la barrière du genre. » Et si le terme « fantasy » n'était lui-même pas le bon, s'interroge de son côté l'écrivain Fabien Cerutti, qui milite pour que l'on utilise plus souvent l'expression « médiéval-fantastique ». « J'ai l'impression que le grand public ne fait pas directement le lien entre Game of Thrones et le terme fantasy. Il ne catégorise pas ainsi la série. Le mot semble d'ailleurs trop léger pour décrire l'univers de Martin à l'inverse du médiéval-fantastique qui me paraît plus intéressant... mais c'est vrai qu'il ne correspond pas à toute la fantasy. »
« Il faut des auteurs exceptionnels »
L'absence d'adaptation télévisée ou cinématographique de romans français de fantasy pèse également dans la balance. Le succès mondial de George R. R. Martin s'explique principalement grâce à la série de HBO. De même, les adaptations vidéoludiques sont un vecteur important de médiatisation. « Avant que The Witcher (écrit par le Polonais Andrzej Sapkowski) ne soit adapté, je vendais 7 000 livres », se souvient Stephane Marsan. « J'en suis à plus de 650 000 maintenant. » Depuis 2007, la franchise The Witcher a vendu plus de 20 millions de jeux vidéo et aura sa série prochainement sur Netflix, ce qui mettra un coup de projecteur supplémentaire sur les bouquins.
Enfin, ne nous voilons pas la face, il y a aussi, à l'évidence, la question de la qualité. La fantasy française a de bonnes plumes, mais ne compte, à l'heure actuelle, que très peu d'écrivains exceptionnels. « Il faut souligner que beaucoup d'auteurs ont un travail en parallèle et ceux qui en font leur métier à plein temps doivent produire beaucoup plus vite que les autres. La qualité peut s'en trouver impactée », plaide Stéphanie Nicot, qui rappelle que les écrivains français de fantasy connaissent souvent des fins de mois difficiles. On constate effectivement une disparité qualitative en fonction du temps de rédaction des romans, notamment entre un premier tome et sa suite. « Tu viens de réaliser ton rêve en publiant un bouquin, décrit Jérôme Vincent, tu as des critiques positives sur Babelio et des blogs et tu es invité par des libraires et des salons où tu fais des dédicaces. Mais sans deuxième livre, tout s'arrête, donc tu continues, car tu es aussi poussé par ton éditeur. »
« Pour avoir un succès exceptionnel à la George R. R. Martin et Robin Hobb, il faut des auteurs exceptionnels », résume Gilles Dumay. « Il n'y a pas de solution marketing ou commerciale, on doit se concentrer sur l'auteur et sa personnalité : Tolkien, David Gemmell sont des personnalités à part ! Alain Damasio, Stefan Plateau et Jean-Philippe Jaworski font partie de ces auteurs d'imaginaire qui sortent de l'ordinaire, mais il n'y en a pas 500. » Reste qu'identifier ces perles rares devrait être l'affaire de tous. Ce qui est loin d'être le cas, d'après Stéphanie Nicot : « Il y a une paresse des lecteurs qui préfèrent prendre un livre anglo-saxon médiocre plutôt que de chercher un bon titre français. Et une paresse de certains gros éditeurs qui préfèrent acheter des titres à l'étranger plutôt que de dénicher des auteurs chez nous. » Pourtant, quand il est consenti, l'effort se révèle payant, en témoigne le succès de Jean-Philippe Jaworski, découvert par Les Moutons électriques. Son Gagner la guerre s'est écoulé à plus de 60 000 exemplaires et lui vaut une renommée croissante auprès des lecteurs. Cerise sur le gâteau, sa saga celte des Rois du mondepourrait même connaître une adaptation télévisée : l'auteur vient de signer pour une saison en huit épisodes de 52 minutes avec En voiture Simone Productions. Rien n'est perdu !
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C'est intéressant de voir ce que disent les éditeurs. Je suis dégoûtée de ne pas voir cité Francis Berthelot, qui a publié Khanaor en 1983, toutefois :-(.
Par ailleurs, il me semble qu'il peut y avoir une confusion entre fantasy et fantastique, dans cet article : je crois que Les flammes de la nuit, de Pagel, est habituellement classé en fantastique, par exemple. Et d'autre part, j'aurais envie de rappeler l'existence d'une école française fin XIXe / début XXe, à laquelle on peut peut-être rattacher André Lichtenberger et ses Centaures, récemment réédité par Callidor. Je renvoie à ce sujet (celui du temps passé) à l'ancien mais passionnant Chasseurs de chimères, publié en Omnibus il y a une dizaine d'années, et qui contenait des pépites de l'Imaginaire, souvent à la frontière des différents genres qui le constituent (même si plutôt SF. Mais les frontières entre les genres étaient infiniment plus poreuses avant le raz-de-marée et les définitions anglo-saxonnes) rassemblées par Serge Lehmann.
Enfin, avec tout le respect que je lui dois, je ne suis pas sûre d'être d'accord avec Stéphanie Nicot quand elle pointe la différence de style d'écriture entre les auteurs francophones et les anglophones, les premiers étant décrits comme plus "descriptifs". C'est sans doute vrai des auteur-e-s anglo-saxon-ne-s les plus traduits et connus, mais par exemple Patricia McKillip est énormément connue et respectée aux USA, et on ne peut vraiment pas dire que ses romans privilégient l'action, ou la clarté de l'avancement de l'histoire ! D'ailleurs, à 3 exceptions près dans une oeuvre abondante, ils ne sont pas traduits en français...
Par ailleurs, il me semble qu'il peut y avoir une confusion entre fantasy et fantastique, dans cet article : je crois que Les flammes de la nuit, de Pagel, est habituellement classé en fantastique, par exemple. Et d'autre part, j'aurais envie de rappeler l'existence d'une école française fin XIXe / début XXe, à laquelle on peut peut-être rattacher André Lichtenberger et ses Centaures, récemment réédité par Callidor. Je renvoie à ce sujet (celui du temps passé) à l'ancien mais passionnant Chasseurs de chimères, publié en Omnibus il y a une dizaine d'années, et qui contenait des pépites de l'Imaginaire, souvent à la frontière des différents genres qui le constituent (même si plutôt SF. Mais les frontières entre les genres étaient infiniment plus poreuses avant le raz-de-marée et les définitions anglo-saxonnes) rassemblées par Serge Lehmann.
Enfin, avec tout le respect que je lui dois, je ne suis pas sûre d'être d'accord avec Stéphanie Nicot quand elle pointe la différence de style d'écriture entre les auteurs francophones et les anglophones, les premiers étant décrits comme plus "descriptifs". C'est sans doute vrai des auteur-e-s anglo-saxon-ne-s les plus traduits et connus, mais par exemple Patricia McKillip est énormément connue et respectée aux USA, et on ne peut vraiment pas dire que ses romans privilégient l'action, ou la clarté de l'avancement de l'histoire ! D'ailleurs, à 3 exceptions près dans une oeuvre abondante, ils ne sont pas traduits en français...
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Et d'autre part, j'aurais envie de rappeler l'existence d'une école française fin XIXe / début XXe, à laquelle on peut peut-être rattacher André Lichtenberger et ses Centaures, récemment réédité par Callidor.
Il y a eu une vague de proto-fantasy au 17éme siècle avec la littérature de merveilleux épique ( Gombertville, la Calprenède, Madame de Scudéry). Mais on l'a totalement oublié.
Il y a aussi tout un terreau de sources médiévales qui est totalement ignoré.
Je renvoie à ce sujet (celui du temps passé) à l'ancien mais passionnant Chasseurs de chimères, publié en Omnibus
On était dans la SF ancienne, là. Mais je suis prêt à parier qu'il y a eu à la même époque quelques œuvres relevant de la fantasy mais qu'il faudrait aller rechercher. Callidor a prévu quelques surprises dans le domaine.
Se souvenir aussi que François Richard à l'époque où il dirigeait Fleuve Noir Anticipation refusait les manuscrits de fantasy. Il a fallu attendre 1980 et la direction de Patrick Siry pour voir paraître le premier roman de fantasy dans la collection "Tamkan le paladin" de Gabriel Jan, un des rares français a avoir brillé dans la sword and sorcery (mais pas uniquement. Quelqu'un dont il faudrait réhabiliter l'œuvre).
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« Il faut des auteurs exceptionnels »
Enfin, ne nous voilons pas la face, il y a aussi, à l'évidence, la question de la qualité. La fantasy française a de bonnes plumes, mais ne compte, à l'heure actuelle, que très peu d'écrivains exceptionnels.
Voila le coeur du problème de la fantasy française.
L'absence d'adaptation télévisée ou cinématographique de romans français de fantasy pèse également dans la balance. Le succès mondial de George R. R. Martin s'explique principalement grâce à la série de HBO.
C'était quand même connu avant.
« Il faut souligner que beaucoup d'auteurs ont un travail en parallèle et ceux qui en font leur métier à plein temps doivent produire beaucoup plus vite que les autres. La qualité peut s'en trouver impactée », plaide Stéphanie Nicot, qui rappelle que les écrivains français de fantasy connaissent souvent des fins de mois difficiles. On constate effectivement une disparité qualitative en fonction du temps de rédaction des romans, notamment entre un premier tome et sa suite. « Tu viens de réaliser ton rêve en publiant un bouquin, décrit Jérôme Vincent, tu as des critiques positives sur Babelio et des blogs et tu es invité par des libraires et des salons où tu fais des dédicaces. Mais sans deuxième livre, tout s'arrête, donc tu continues, car tu es aussi poussé par ton éditeur. »
Son argument est douteux, les mêmes contraintes s'appliquent aux écrivains de tout les pays.
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Joxer007 a écrit :« Il faut des auteurs exceptionnels »Enfin, ne nous voilons pas la face, il y a aussi, à l'évidence, la question de la qualité. La fantasy française a de bonnes plumes, mais ne compte, à l'heure actuelle, que très peu d'écrivains exceptionnels.
Voila le coeur du problème de la fantasy française.
D'autant plus que les éditeurs ayant l'habitude de mentir effrontément sur la qualité de leurs publications, quand un vrai chef d’œuvre sort il est noyé dans la masse de la médiocrité et a de grandes difficultés à se faire connaître.
Joxer007 a écrit :« Il faut souligner que beaucoup d'auteurs ont un travail en parallèle et ceux qui en font leur métier à plein temps doivent produire beaucoup plus vite que les autres. La qualité peut s'en trouver impactée », plaide Stéphanie Nicot, qui rappelle que les écrivains français de fantasy connaissent souvent des fins de mois difficiles. On constate effectivement une disparité qualitative en fonction du temps de rédaction des romans, notamment entre un premier tome et sa suite. « Tu viens de réaliser ton rêve en publiant un bouquin, décrit Jérôme Vincent, tu as des critiques positives sur Babelio et des blogs et tu es invité par des libraires et des salons où tu fais des dédicaces. Mais sans deuxième livre, tout s'arrête, donc tu continues, car tu es aussi poussé par ton éditeur. »
Son argument est douteux, les mêmes contraintes s'appliquent aux écrivains de tout les pays.
Par contre je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi sur ce point. Ces contraintes s'appliquent à la majorité des écrivains, mais les auteurs anglo-saxons (et possiblement certains autres, tels les chinois) ont l'avantage d'un lectorat plus étendu et donc de livres plus rentables, à qualité et succès équivalents.
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Mmm. Je voudrais bien avoir un parallèle des rémunérations et des droits des auteurs en fonction des pays avant de se lancer dans des comparaisons douteuses. Parce que c'est bien beau de parler d'auteurs exceptionnels mais la raison se trouve peut-être ailleurs. On oublie aussi que la taille du lectorat potentiel (quantité de "locuteur") en anglais n'est pas le même qu'en français, ça aide ce qui facilite leur vente. Si on se dit que la proportion dans chaque langue est équivalente mais qu'il y a un différentiel de x10, ça ne facilite pas les choses.
D'autre part, même s'il y a un risque, je pense que traduire un auteur étranger à succès, il est moindre qu'un auteur maison pour la raison simple que tu sais que cela a déjà marché ailleurs et le travail en amont de la publication (tous les aller-retour éditeur/auteur) sont plus limités (il y en a quand même entre le traducteur et l'éditeur). Ca coûte peut-être plus, mais c'est rattrapé par le risque. D'autre part, la rémunération de la traduction, il me semble se fait au forfait et non à la quantité de vente.
D'autre part, même s'il y a un risque, je pense que traduire un auteur étranger à succès, il est moindre qu'un auteur maison pour la raison simple que tu sais que cela a déjà marché ailleurs et le travail en amont de la publication (tous les aller-retour éditeur/auteur) sont plus limités (il y en a quand même entre le traducteur et l'éditeur). Ca coûte peut-être plus, mais c'est rattrapé par le risque. D'autre part, la rémunération de la traduction, il me semble se fait au forfait et non à la quantité de vente.
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Déjà je ne sais pas pour vous mais je ne lis pas que des chefs-d'oeuvre (anglo-saxons et fr confondus) et ensuite je viens de me prendre le chou sur ma biblio virtuelle à rajouter une étiquette "imaginaire francophone" à mes bouquins et franchement j'ai un paquet d'auteurs qui n'ont pas à rougir de la comparaison avec les autres pays. Je balance ça de manière non exhaustive mais punaise quoi : Damasio, Jaworski, Dewdney, Platteau, Dabos, Pevel, L'Homme, Bottero, Peru, Faye, Beauverger, Cluzeau, Fetjaine, Day, Marcastel, Ferrand ........ bon j'arrête ça fait liste de course.
Sans déconner il y a de la qualité là et il y en a encore un paquet. Donc le soucis ce n'est en aucun cas la qualité.
Sans déconner il y a de la qualité là et il y en a encore un paquet. Donc le soucis ce n'est en aucun cas la qualité.
Si l'enfer est ici alors autant s'en faire, si l'enfer est ici alors autant s'en faire, s'en faire un paradis. --- Shaka Ponk
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Donc le soucis ce n'est en aucun cas la qualité.
Le problème ne vient ni des auteurs, ni des éditeurs.
Le souci il vient de la distribution. La fantasy on la trouve dans les librairies des grandes villes et des villes moyennes les plus dynamiques. Ailleurs l'offre est indigente ou inexistante. Et dans les bibliothèque c'est souvent un peu mieux.
Mais il faut voir ce que l'on propose aussi.
Il y a des "zones blanches" pour les littératures de l'imaginaire et tant qu'on ne les aura pas effacé, le problème va demeurer.
Lorsqu'ils ont fait les Aventuriales, dans l'agglo de Clermont / Riom, ils ont permis de dynamiser l'intérêt pour la fantasy et la SF dans le territoire. Des emprunts qui augmentent en bibliothèque, de nouveaux lecteurs qui prennent le chemin des librairies. Tout ça parce que le festival avait su attirer l'attention d'un public sur l'imaginaire.
On ne peut pas utiliser les mêmes moyens que la blanche ou le polar parce qu'on n'a pas les mêmes ressources financières derrière. Donc on doit s'organiser autrement. En collaborant avec les passionnés pour monter des festivals, des manifestations diverses pour attirer l'attention.
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Ce genre de considération sur le caractère "exceptionnel", la "personnalité", le talent, l'originalité, etc... Franchement?
Qui pour en juger, selon quels critères? Combien de couches de déterminisme social, culturel, pour évaluer qu'un tel ou un tel se distingue des autres à la seule force de son (prétendu) talent? Si cela se mesure au nombre de ventes, le critère n'est plus seulement qualitatif mais quantitatif, et si j'ai peu doute quant au fait qu'un manuscrit et/ou un auteur finissent par trouver leur voie jusqu'au lecteur et révéler ainsi ce qu'ils avaient à apporter au monde et à leurs frères humains, je ne ferais pas l'insulte aux elbakiniens de citer le nombre d'artistes dont le travail est remarquable et qui passent leur vie dans l'anonymat le plus total. Les raisons peuvent être multiples : la chance (le bon manuscrit, au bon moment, chez le bon éditeur), la persévérance (j'ai entendu dire que le découragement chez les éditeurs était une méthode comme une autre pour éprouver la motivation d'un auteur, et le fait qu'il est "vraiment" fait pour ça), le travail, bien sûr, mais aussi l'aptitude à se vendre. Ce dernier critère devient tristement prépondérant à l'heure où le narcissisme sur les réseaux sociaux - mon blog, mes oeuvres, mon avis sur tout et n'importe quoi, mes précieux conseils - est de mise, et de l'avis général, incontournable si on veut se bâtir une carrière, sans parler du couperet des blogueurs qui parfois à peine sortis de l'école viennent vous expliquer ce qu'est la littérature, un bon livre, etc, et auxquels il faut apprendre à plaire.
Alors la "qualité française" dans la fantasy, les noms cités pour l'incarner, tout cela me semble éminemment discutable, et pour le moins subjectif. Ce qui ne l'est pas, ce sont les chiffres de vente de tel ou tel. Faut-il encore ouvrir un débat pour attester que les deux sont terriblement périlleux à mettre en équation?
L'idée que tout le monde a quelque chose à dire d'intéressant, un talent de plume, etc., explique peut-être que l'offre devient pléthorique alors que la demande baisse globalement. C'est un autre aspect du problème, indéniablement, surtout qu'en matière de fantasy, de fait, il y a moyen de se faire plaisir pour un lecteur du côté anglo-américain.
Qui pour en juger, selon quels critères? Combien de couches de déterminisme social, culturel, pour évaluer qu'un tel ou un tel se distingue des autres à la seule force de son (prétendu) talent? Si cela se mesure au nombre de ventes, le critère n'est plus seulement qualitatif mais quantitatif, et si j'ai peu doute quant au fait qu'un manuscrit et/ou un auteur finissent par trouver leur voie jusqu'au lecteur et révéler ainsi ce qu'ils avaient à apporter au monde et à leurs frères humains, je ne ferais pas l'insulte aux elbakiniens de citer le nombre d'artistes dont le travail est remarquable et qui passent leur vie dans l'anonymat le plus total. Les raisons peuvent être multiples : la chance (le bon manuscrit, au bon moment, chez le bon éditeur), la persévérance (j'ai entendu dire que le découragement chez les éditeurs était une méthode comme une autre pour éprouver la motivation d'un auteur, et le fait qu'il est "vraiment" fait pour ça), le travail, bien sûr, mais aussi l'aptitude à se vendre. Ce dernier critère devient tristement prépondérant à l'heure où le narcissisme sur les réseaux sociaux - mon blog, mes oeuvres, mon avis sur tout et n'importe quoi, mes précieux conseils - est de mise, et de l'avis général, incontournable si on veut se bâtir une carrière, sans parler du couperet des blogueurs qui parfois à peine sortis de l'école viennent vous expliquer ce qu'est la littérature, un bon livre, etc, et auxquels il faut apprendre à plaire.
Alors la "qualité française" dans la fantasy, les noms cités pour l'incarner, tout cela me semble éminemment discutable, et pour le moins subjectif. Ce qui ne l'est pas, ce sont les chiffres de vente de tel ou tel. Faut-il encore ouvrir un débat pour attester que les deux sont terriblement périlleux à mettre en équation?
L'idée que tout le monde a quelque chose à dire d'intéressant, un talent de plume, etc., explique peut-être que l'offre devient pléthorique alors que la demande baisse globalement. C'est un autre aspect du problème, indéniablement, surtout qu'en matière de fantasy, de fait, il y a moyen de se faire plaisir pour un lecteur du côté anglo-américain.
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Le souci il vient de la distribution. La fantasy on la trouve dans les librairies des grandes villes et des villes moyennes les plus dynamiques. Ailleurs l'offre est indigente ou inexistante.
Je suis en région parisienne, je n'ai pas mis le pieds dans une librairie depuis... je ne compte plus les années... bref dans les campagnes ils ont internet comme nous (sauf rares exceptions) donc la même offre.
A part l'alimentaire je n’achète plus rien en boutique physique, que ce soit livres, meubles, vêtements etc... cela permet une formidable économie de temps et d'argent.
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Fabien Lyraud a écrit :Le problème ne vient ni des auteurs, ni des éditeurs.
Le souci il vient de la distribution. La fantasy on la trouve dans les librairies des grandes villes et des villes moyennes les plus dynamiques. Ailleurs l'offre est indigente ou inexistante. Et dans les bibliothèque c'est souvent un peu mieux.
D'accord avec Joxer007 : à l'heure d'Internet et de la consommation en ligne, cet argument ne tient pas. Mes beaux-parents vivent à 30 minutes de route de la ville (et donc de la librairie) la plus proche, et ce sont les plus gros lecteurs de SFFF que je connaisse hors Elbakin.net. Ils ont simplement appris depuis longtemps à se servir d'Amazon. On peut penser ce qu'on veut d'Amazon, ils ont résolu à eux seuls le problème de "l'approvisionnement" en fantasy (et c'est encore plus vrai quand on lit en anglais).
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Donc si j'ai bien compris (j'exagère à dessein mais c'est l'impression que ça me donne), pas besoin de libraire, laissons Amazon nous préconiser ce que l'on doit/veut acheter (le fameux si vous avez aimé tellement efficace). Pas besoin d'auteurs français, parce que comme ils ne vendent pas c'est qu'ils sont mauvais et comme il y a de la bonne fantasy anglo-saxonnes ça ne sert à rien. Je lis ça n'importe où ailleurs qu'ici ça me fait marrer, là ça m'inquiète.
Je dois me faire trop vieux pour tout ça, ou plus simple je ne comprends rien
Je dois me faire trop vieux pour tout ça, ou plus simple je ne comprends rien
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Si l'enfer est ici alors autant s'en faire, si l'enfer est ici alors autant s'en faire, s'en faire un paradis. --- Shaka Ponk
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L'idée que tout le monde a quelque chose à dire d'intéressant, un talent de plume, etc., explique peut-être que l'offre devient pléthorique alors que la demande baisse globalement.
Il y a une demande non exprimée. Parce qu'il y a des territoires où il n'y a pas d'offres. Le fait qu'une partie du public ne sache pas que la fantasy c'est de la littérature et pas seulement des jeux vidéo, du cinéma et des séries et pour une minorité du jdr papier, c'est quand même grave ( de son côté chez une partie des ados la SF est perçue uniquement comme un genre cinématographique).
Le déficit de presse, l'absence de couverture de certains événement... joue peut être moins qu'on le croit.
Parce qu'internet n'est pas la panacée au niveau com. Parce que l'on ne recherche que des choses dont on connaît l'existence. C'est les limites du réseau.
Donc pour la com, il faut des événements. Il faut montrer au gens que ça existe parce qu'ils ne le savent pas.
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Parce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'ici nous sommes entre "connaisseurs", on connait la palette de genre, on vient y chercher des infos pour nos choix, alors oui là on arrive à se passer d'un libraire.
Si tu veux toucher plus de gens c'est avec une grosse promos, ce qui est rarement mis en oeuvre pour des auteurs fantasy (même anglo-saxons hors séries télé ou films).
Si tu veux toucher plus de gens c'est avec une grosse promos, ce qui est rarement mis en oeuvre pour des auteurs fantasy (même anglo-saxons hors séries télé ou films).
Si l'enfer est ici alors autant s'en faire, si l'enfer est ici alors autant s'en faire, s'en faire un paradis. --- Shaka Ponk
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Il y a une demande non exprimée.
J’aime moi aussi à penser que c’est vrai, mais j’en doute de plus en plus...
il faut des événements. Il faut montrer aux gens que ça existe parce qu’ils ne le savent pas.
Entièrement d’accord avec toi. Et j’admire ta foi et ton énergie à le défendre en tant qu’éditeur.
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Acheter en ligne et acheter en physique sont deux actes différents. Acheter en ligne suppose que l'on sait ce que l'on cherche. Lorsque l'on va en librairie c'est aussi pour regarder, flâner, découvrir.
Les petits éditeurs ne peuvent exister si cette consommation picorage, n'existe plus.
Ce que tu dis est faux, avant je passais des plombes à Gibert, la fnac et dans pleins de librairies parisiennes et pour tant je n'était pas informé du 10 ème des parutions et encore.... Une fois dans la boutique nous n'en trouvions pas non plus l'intégralité. Le petit éditeur il était en bas de l'étagère et le gros en tête de gondole.
L'argument de la découverte est bidon. Internet à démultiplié la facilité de découverte et la facilité à acquérir en affinant la sélection.
Les petits éditeurs, tous les auteurs y ont la même exposition, et bien plus qu'ils ne l'auraient eu jadis.
Donc si j'ai bien compris (j'exagère à dessein mais c'est l'impression que ça me donne), pas besoin de libraire, laissons Amazon nous préconiser ce que l'on doit/veut acheter
Soyons sérieux ... je n'ai pour ma part jamais été conseillé par un libraire... alors que maintenant entre les critiques sur le site de vente même, sur les blogs, les forums nous n'avons jamais eu autant de facilité à trouver ce que nous recherchons.
Quand à Amazon ou Fnac, certes ils vont présenter dans la recherche par défaut le "top vente" mais après rien n’empêche les gens d'apprendre à faire une recherche.
De toute façon il est évident que la personne qui veut s'initier au genre va faire des erreurs d'achat au début (acheter un auteur qui ne lui plait pas), mais dans le passé également, mais certainement dans une moindre mesure qu'auparavant grâce à tous les conseils de la toile.
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Gwendal a écrit :Donc si j'ai bien compris (j'exagère à dessein mais c'est l'impression que ça me donne), pas besoin de libraire, laissons Amazon nous préconiser ce que l'on doit/veut acheter (le fameux si vous avez aimé tellement efficace).
Je confirme qu'Amazon est un problème si tu aimes flâner en librairie, te laisser tenter par un bouquin au petit bonheur ou demander l'avis d'un libraire. Personnellement, je n'ai jamais, de toute ma vie de lectrice-qui-achète-ses-bouquins-avec-ses-propres-sous, compté sur un libraire pour me guider vers un livre (ça doit bien exister, les libraires fans de fantasy, vu qu'il y en a ici, mais je n'en ai jamais croisé dans la vraie vie). Si j'ai besoin d'idées, je vais sur les sites spécialisés, je regarde le planning de sortie des éditeurs, je lis des chroniques, je pose la question aux bonnes gens du forum... ou, effectivement, je me laisse tenter par les suggestions d'Amazon (c'est comme ça que j'ai découvert deux e mes séries préférées, les Chroniques de St Mary et InCryptid, donc je ne vais pas cracher dessus). Je ne suis pas d'accord avec l'idée du "acheter en ligne suppose que l'on sait ce que l'on cherche" ; il est tout aussi possible de craquer sur un livre au pifomètre après avoir tapé "éditeurs fantasy" dans Google et trouvé une couv' et un résumé sympas sur le site de l'Atalante/ActuSF/Brage/les Moutons.
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Parce qu'internet n'est pas la panacée au niveau com. Parce que l'on ne recherche que des choses dont on connaît l'existence. C'est les limites du réseau.
La encore c'est faux.
Si tu effectues une recherche par similarité du genre :
authors/movies/Tv show similar to X
Tu verras que beaucoup de gens cherchent à découvrir justement.
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Saffron a écrit :Je confirme qu'Amazon est un problème si tu aimes flâner en librairie, te laisser tenter par un bouquin au petit bonheur ou demander l'avis d'un libraire. Personnellement, je n'ai jamais, de toute ma vie de lectrice-qui-achète-ses-bouquins-avec-ses-propres-sous, compté sur un libraire pour me guider vers un livre (ça doit bien exister, les libraires fans de fantasy, vu qu'il y en a ici, mais je n'en ai jamais croisé dans la vraie vie). Si j'ai besoin d'idées, je vais sur les sites spécialisés, je regarde le planning de sortie des éditeurs, je lis des chroniques, je pose la question aux bonnes gens du forum... ou, effectivement, je me laisse tenter par les suggestions d'Amazon (c'est comme ça que j'ai découvert deux e mes séries préférées, les Chroniques de St Mary et InCryptid, donc je ne vais pas cracher dessus). Je ne suis pas d'accord avec l'idée du "acheter en ligne suppose que l'on sait ce que l'on cherche" ; il est tout aussi possible de craquer sur un livre au pifomètre après avoir tapé "éditeurs fantasy" dans Google et trouvé une couv' et un résumé sympas sur le site de l'Atalante/ActuSF/Brage/les Moutons.
Je veux bien être d'accord avec toi pour les gens qui passent par ici. Mais pour une grande partie des lecteurs qui n'ont pas les clés en fantasy, ou moins spécialisés c'est vachement moins pertinent. Je traine sur Babelio dans un groupe où il y a pas mal de jeunes lecteurs, ils ont des habitudes que je n'ai pas sur internet (achat d'auto-édition par exemple) donc connaissent l'outil à fond et ils ouvrent des yeux tout rond quand je leur parle des Imaginales ou de certains auteurs très appréciés ici (Jaworski par exemple).
Et de mon côté je dois reconnaitre que j'ouvre aussi des yeux tout rond quand ils me parlent de titres (majoritairement YA mais pas que) très coté chez eux que je ne connais absolument pas
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Si l'enfer est ici alors autant s'en faire, si l'enfer est ici alors autant s'en faire, s'en faire un paradis. --- Shaka Ponk